Dans le contexte de sa Morphologie du conte populaire, Propp considéra le concept de marque qui fait référence à un type spécifique de marque magique ou symbolique appliquée sur le corps du héros ou de l’héroïne. Cette marque joue souvent un rôle important dans le récit et peut prendre diverses formes, telles qu’une blessure, une étoile ardente, un tatouage ou toute autre marque distinctive.
Cette marque du héros qui correspond à la fonction 17 sert généralement de point crucial de l’intrigue ou de moyen d’identification dans le récit. Elle peut symboliser le destin unique du héros, un lien magique ou une marque du statut qu’il a choisi. Souvent, cette marque est le résultat d’un événement magique ou surnaturel survenu au début du récit.
Bien que tous les contes populaires ne comportent pas cet élément spécifique, lorsqu’il apparaît, il constitue généralement une partie importante du personnage et du périple héroïque. Il peut également servir à rattacher le héros ou l’héroïne à une quête, une lignée ou un destin particulier dans le cadre de la structure narrative décrite par Propp.
Ainsi, une marque est appliquée sur le corps. Le héros reçoit une blessure pendant l’escarmouche ; une princesse le réveille avant le combat en lui faisant une petite blessure à la joue avec un couteau ; une princesse marque le héros au front avec une chevalière ; elle l’embrasse en laissant une étoile flamboyante sur son front..
Le héros peut recevoir aussi un anneau ou une étole. Nous avons une combinaison des deux formes si le héros est blessé au combat et que sa blessure est pansée avec le mouchoir d’une princesse ou d’un roi.
Du point de vue psychologique
La signification psychologique d’une marque sur le corps dans un conte populaire ou un mythe peut varier en fonction du contexte spécifique et de l’interprétation culturelle.
La marque représente souvent le destin ou l’identité unique du héros. En termes psychologiques, cela peut représenter un but à atteindre ou une quête de découverte de soi. Le héros peut avoir besoin d’embrasser ou d’accepter son identité telle qu’elle est marquée par ce symbole.
Dans Black Panther, Killmonger explique que chaque cicatrice sur son corps signifie un meurtre. Cela représente la quantité d’entraînement ardu qu’il a subi, uniquement pour revendiquer le Wakanda tout en rappelant l’acte de meurtre du roi T’Chaka.
La marque peut symboliser une transformation ou un changement dans la vie du héros. Sur le plan psychologique, elle peut représenter une croissance personnelle, une maturité ou un changement de perspective. Le héros peut avoir besoin de subir une transformation psychologique pour accomplir son destin.
Dans la série Harry Potter, le personnage principal, Harry Potter, a une cicatrice en forme d’éclair sur le front, conséquence d’une malédiction lancée par le sorcier Lord Voldemort lorsqu’il était bébé. Cette cicatrice est un élément important de l’intrigue tout au long de la série. La cicatrice de Harry n’est pas seulement une marque physique, mais aussi une marque magique. Elle signifie son lien avec Voldemort et son rôle dans la prophétie qui prédit leur affrontement final. Au fil de l’histoire, la cicatrice de Harry devient le symbole de son destin et de sa transformation en l’Élu destiné à vaincre Voldemort.
Les marques sur le corps peuvent suggérer un lien avec les forces divines ou surnaturelles. D’un point de vue psychologique, cela peut représenter un lien entre l’esprit conscient du héros ou de l’héroïne et des aspects plus profonds et inconscients de la psyché. Elles peuvent symboliser l’accès de l’héroïne ou du héros à des connaissances cachées ou intuitives.
Dans le roman à succès de Dan Brown Da Vinci Code, le personnage principal, Robert Langdon, découvre une série de symboles et de codes liés au Saint Graal et à la lignée de Jésus-Christ. L’un des éléments clés du récit est la notion de Féminin sacré, représentée par le pentacle ou l’étoile à cinq branches, qui est souvent associée à la déesse et à la féminité divine. Le pentacle se trouve sur le corps d’un personnage central, Sophie Neveu, sous forme de tache de naissance, et il signifie son lien avec l’histoire cachée et les mystères entourant le Saint Graal. Tout au long du roman, ces marques et symboles sur le corps de Sophie jouent un rôle important dans la découverte de la vérité et l’élucidation des mystères de l’histoire, suggérant un lien avec des forces divines ou surnaturelles. Dans l’adaptation cinématographique du Da Vinci Code, réalisée par Ron Howard et basée sur le roman de Dan Brown, il a été décidé d’omettre la tache de naissance de Sophie Neveu. Les raisons de cette omission peuvent varier, mais en général, de tels changements sont effectués pour une combinaison de raisons artistiques, pratiques et narratives. Dans les adaptations, des changements sont souvent apportés pour mieux s’adapter au support visuel et pour raconter l’histoire de manière efficace dans les limites de la durée d’un film. Bien que certains détails du matériel d’origine puissent être modifiés ou omis, les éléments essentiels du récit sont généralement conservés afin de capturer l’essence de l’œuvre originale.
La marque peut servir de défi ou d’épreuve pour le héros ou l’héroïne. Psychologiquement, cela représente l’adversité ou les obstacles qu’il ou elle doivent surmonter pour atteindre leurs objectifs. Elle peut être considérée comme un test de la force intérieure et de la résistance du personnage.
Dans le roman dystopique The Giver de Lois Lowry, le protagoniste, Jonas, vit dans une société hautement contrôlée où on assigne des rôles à chacun et où les émotions sont réprimées. Lorsque Jonas est choisi pour être le Receveur de Mémoire, un poste qui lui demande d’absorber les souvenirs de la douleur et de la souffrance du monde, il commence à voir des couleurs pour la première fois. Cette capacité à percevoir les couleurs est une marque de différence significative et signifie l’adversité à laquelle il est confronté en apprenant les dures réalités du monde. Dans ce cas, la marque n’est pas physique sur le corps de Jonas, mais symbolique dans sa nouvelle capacité à voir les couleurs et à ressentir le poids émotionnel des souvenirs qu’il porte. La couleur représente les obstacles qu’il doit surmonter dans sa quête de changement et de compréhension de sa société. Si The Giver explore principalement le parcours émotionnel et psychologique de Jonas, sa capacité à voir les couleurs peut être considérée comme une marque symbolisant l’adversité et les obstacles qu’il doit affronter pour atteindre ses objectifs, à savoir éveiller sa communauté à une existence plus riche et plus émotionnellement connectée.
Du point de vue philosophique
La marque peut représenter une crise existentielle ou un choix pour le héros ou l’héroïne. Elle pourrait symboliser le fardeau de l’individualité et la responsabilité pour eux de définir leur propre identité et leur propre but face à cette marque unique. Des philosophes existentialistes comme Jean-Paul Sartre ont souligné l’importance du choix personnel et de l’authenticité dans la définition de l’existence.
Dans le roman d’Oscar Wilde Le portrait de Dorian Gray, le personnage principal, Dorian Gray, est un beau et riche jeune homme vivant à Londres. Il conclut un marché faustien avec son propre portraitiste, Basil Hallward, et un portrait symboliquement significatif de lui est créé. Dorian souhaite que le portrait vieillisse et supporte les conséquences de ses actes, alors qu’il reste à jamais jeune et intact. Au fur et à mesure que Dorian s’engage dans une vie d’hédonisme, d’excès et de corruption morale, le portrait devient de plus en plus grotesque et reflète sa déchéance morale et ses péchés. La marque de sa crise existentielle n’est pas une marque physique sur son corps, mais le portrait lui-même, qui devient un symbole de ses choix et des conséquences de ces choix. Tout au long du récit, Dorian doit faire face au portrait et au reflet de sa propre âme. Sa crise existentielle tourne autour de la question de savoir s’il doit continuer son style de vie pécheur et indulgent ou tenter de se racheter. Le portrait est une représentation puissante de cette lutte intérieure et des choix qu’il doit faire. Le portrait de Dorian Gray est un exemple classique d’histoire où une marque, en l’occurrence un portrait, représente une crise existentielle et les choix moraux auxquels le héros doit faire face.
La marque peut symboliser une dualité dans la nature du héros ou la nature dualiste de la réalité elle-même. Les traditions philosophiques telles que le dualisme (par exemple, le dualisme du corps et de l’esprit) ou les philosophies orientales qui explorent l’interaction des opposés (le yin et le yang) pourraient être pertinentes. Le héros peut avoir besoin de réconcilier ou d’intégrer ces aspects opposés de lui-même.
Dans L’Étrange Cas du docteur Jekyll et M. Hyde, le Dr Henry Jekyll est un scientifique respecté et moralement intègre qui devient obsédé par la compréhension de la double nature de l’humanité, la lutte entre le bien et le mal à l’intérieur de chaque personne. Il crée un sérum qui le transforme en M. Edward Hyde, un être sinistre et amoral. Cette transformation s’accompagne d’un changement physique de son apparence, symbolisé par la marque de la dualité. Comme le Dr Jekyll continue d’expérimenter le sérum, il a de plus en plus de mal à contrôler ses transformations, et les actions maléfiques de Hyde deviennent de plus en plus dépravées. Dans cette histoire, la marque de la dualité n’est pas une marque physique visible, mais plutôt la transformation elle-même, qui représente le conflit interne et la dualité au sein de la nature du Dr Jekyll.
La marque peut soulever des questions sur la destinée et le libre arbitre. D’un point de vue philosophique, elle peut susciter des discussions sur le déterminisme et le libre arbitre, et sur la question de savoir si le destin de l’héroïne et du héros est prédéterminé par des forces extérieures ou s’ils ont le pouvoir de façonner leur propre chemin.
- Ce classique de la science-fiction qu’est Matrix soulève des questions sur la nature de la réalité et du libre arbitre en suivant Neo, un pirate informatique, qui découvre que le monde qu’il connaît est une réalité simulée contrôlée par des machines.
- Situé dans un futur où les crimes peuvent être prédits et évités à l’avance, Minority Report suit un détective joué par Tom Cruise qui devient un fugitif lorsqu’il est accusé d’un futur meurtre qu’il n’a pas encore commis.
- Donnie Darko, ce classique culte et déroutant, raconte l’histoire d’un adolescent perturbé qui reçoit des messages cryptiques d’un lapin géant et qui doit naviguer dans un réseau complexe de destin et de libre-arbitre.
- Dans L’Agence, une étoile montante de la politique, jouée par Matt Damon, découvre l’existence d’une mystérieuse organisation qui contrôle les destinées humaines, ce qui l’amène à s’interroger sur le rôle du libre arbitre dans sa vie.
- Cours, Lola, cours explore le concept de destin et de libre arbitre à travers trois scénarios différents dans la vie de Lola, qui n’a que 20 minutes pour sauver son petit ami.
Ces films proposent des explorations inspirantes de l’interaction entre le destin et le libre arbitre, et poussent souvent le lecteur/spectateur à réfléchir aux choix qu’il ou elle font et à leur impact sur leur propre vie.
D’un point de vue philosophique, la marque peut être liée à l’exploration de l’identité et à la découverte de soi. Elle peut soulever des questions sur ce qui définit le véritable moi d’une personne (qui ne se dévoile souvent qu’au-travers du regard d’autrui sur nous) et sur la manière dont les facteurs externes (comme une marque qui symbolise alors ce regard de l’autre) influencent ou façonnent l’identité d’une personne. Cela peut être lié aux concepts philosophiques d’identité personnelle et d’authenticité.
La présence de cette marque peut poser des dilemmes éthiques ou moraux au héros et à l’héroïne. D’un point de vue philosophique, cela peut conduire à des discussions sur leurs responsabilités et les choix qu’ils doivent faire à la lumière de leur marque unique. Il est possible d’explorer la philosophie morale et le parcours éthique conjointement au parcours héroïque. Ces récits explorent souvent les complexités du bien et du mal, les dilemmes moraux auxquels sont confrontés les personnages, ainsi que leur évolution et leur transformation dans le contexte de leurs décisions éthiques.
Les Misérables est un roman classique qui a été adapté dans de nombreux films et comédies musicales. L’histoire suit la vie de Jean Valjean, un ancien bagnard en quête de rédemption et d’une chance de renouveau moral. Son parcours n’est pas seulement celui de l’héroïsme, mais aussi celui d’une exploration profonde de la philosophie morale et de l’éthique. Tout au long du roman, Jean Valjean est confronté à des questions de justice, de compassion, de pitié et à la responsabilité éthique d’aider ceux qui sont dans le besoin. Ses interactions avec d’autres personnages, tels que Javert, l’inspecteur implacable qui le poursuit, créent une tension morale constante. Les actions et les choix éthiques de Valjean ont un impact profond sur ceux qui l’entourent, notamment l’orpheline Cosette et le révolutionnaire Marius. Les Misérables est une histoire où le cheminement du héros est indissociable de son cheminement éthique. Il explore les thèmes du pardon, de la rédemption et du pouvoir de transformation des choix moraux. Le roman aborde en profondeur la philosophie morale, les dilemmes éthiques et l’évolution morale de ses personnages qui naviguent dans un monde tumultueux et moralement complexe.
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