Quatre éléments participent à la fondation du récit :
- Le personnage principal
- Un objectif à atteindre. Il est appelé Story Goal parce qu’il se situe au niveau du récit et non à celui des personnages. Le Story Goal caractérise un désir, quelque chose d’extérieur au personnage. L’héroïne ou le héros veulent sauver le monde par exemple. Cet objectif est l’expression d’une intention, d’une volonté.
On pourrait croire que le personnage existe parce qu’il possède cette intention. Cela est vrai dans un certain sens. Mais ce qui donne du sens à ce personnage est qu’il doit se trouver lui-même, justifier cette existence. Très proche en cela de notre réalité, la fiction nous rappelle que nous sommes des individus jetés dans un monde que nous ne comprenons pas ou qui ne nous comprend pas. L’objectif (ou le désir) est un moyen d’accès au besoin particulier d’un être qui se cherche. - Un obstacle se dresse contre la volonté du personnage principal (qui est très souvent aussi le protagoniste). Quelque chose ou quelqu’un possède une intention contraire. La différence entre le protagoniste et son antagonisme est que le protagoniste en tant que personnage principal est appelé à changer. S’il échoue en cela, ce sera une tragédie personnelle.
- Un enjeu est nécessaire pour que nous comprenions en tant que lectrice et lecteur de cette fiction pourquoi le personnage principal s’arc-boute sur ce désir. L’enjeu se situe dans le besoin : la petite princesse des contes de fée doit apprendre à devenir une femme par exemple. Pour cela, elle doit vaincre sa répugnance à quitter l’enfance.
Son désir est de récupérer son jouet favori échoué au fond de la mare quitte à faire de fausses promesses (ce qui traduit le mensonge que l’on se fait à soi-même). Le désir doit être connu rapidement, c’est-à-dire qu’il nous faut comprendre pourquoi ce désir est si important aux yeux du protagoniste. Progressivement, nous comprendrons le besoin car s’il y a échec en fin de compte, c’est à une tragédie personnelle que nous assisterons si l’échec porte à la fois sur le désir et sur le besoin.
Ces quatre briques sont constitutives d’un récit. Cela facilite la tâche de l’écriture qui les consomme en trois actes. Il s’agit de garder à l’esprit que ce n’est pas une règle formelle. Ce qui importe est l’évolution des personnages et des relations qu’ils entretiennent entre eux. La manière dont l’autrice et l’auteur mettent en intrigue cette intersubjectivité est affaire personnelle.
Il faut penser néanmoins au rythme du récit qui s’articule par des moments tels que l’incident déclencheur, le passage dans l’acte Deux, le point médian du récit ou encore le climax, c’est-à-dire l’affrontement du personnage principal avec l’antagoniste qu’il peut ou non vaincre. Ces moments sont attendus par le lecteur/spectateur qui les anticipe parce qu’il y est habitué.
La structure est utile
La structure est ce qui permet au lecteur/spectateur de comprendre ce que l’autrice ou l’auteur cherche à dire. Elle est le support qui permet à un locuteur de convaincre un interlocuteur dans la tentative de le changer. C’est l’effet du récit sur le lecteur/spectateur qui est recherché au-delà du divertissement offert par la fiction. En somme, la structure est une commodité.
Le moyen de parvenir à cet effet est multiple. La question est de savoir comment faire pour que lectrice et lecteur s’investissent émotionnellement dans le récit. La structure devient un outil. Elle ne guide pas la main de l’autrice ou de l’auteur. Ceux-ci sont toujours les artisans de leur œuvre et la structure est comme la gouge du sculpteur ; elle donne sa forme au récit.
Il y a toujours moyen de surprendre le lecteur/spectateur. Et la surprise se prépare. Elle survient le plus efficacement aux articulations du récit (les turning points dans une autre langue). Considérez Psychose de Joseph Stefano : le passage dans l’acte Deux est précisément le moment de la mort de Marion.
Cette articulation qui oriente le récit est le commencement de l’intrigue.
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