NÉCESSAIRES COMPLICATIONS

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Dans une histoire, les personnages ont un but. Mais que veulent-ils ? C’est la vérité qu’autrices et auteurs doivent d’abord affronter. S’engager dans une quête, en fiction comme dans la vraie vie, n’est point chose facile.
Sinon, qu’aurions-nous à écrire ?

Opportunités, défis et conflits constituent l’étrange quotidien d’un être de fiction totalement soumis à sa volonté d’accomplissement.

D’incessantes complications

En vérité, il s’agit davantage d’une série d’événements qui sont autant de conditions (défis, tests sur la détermination du personnage à accomplir son désir, informations, obtentions d’objets aux significations autres que ce qu’ils laissent paraître, ne serait-ce que pour justifier la nécessité de les posséder) qui participent à la réalisation de l’objectif ou, au contraire, entravent celle-ci.

Les complications sont essentiellement des conditions parce que même lorsqu’un personnage subit un revers qui apparemment l’éloigne du succès, ce contretemps n’en est pas moins nécessaire car cette épreuve est une illumination ou une révélation vers la voie à suivre.

Autant d’étapes successives aux difficultés de plus en plus exigeantes.

D’un point de vue pratique, ces complications qui montent progressivement en puissance (la mort du héros, dramatique en soi, n’est pas la fin de l’histoire mais le passage obligé de sa résurrection) provoquent chez le lecteur et la lectrice la tension dramatique nécessaire pour les river à l’histoire.
Lecteurs et lectrices se demandent si votre personnage pourra atteindre ou non son objectif. Ainsi, lorsque votre personnage est confronté à des conflits successifs, le lecteur s’inquiète de plus en plus sur le résultat. Et c’est ce sentiment d’inquiétude qui accroche lectrices et lecteurs, qui les stimulent à vouloir connaître la suite, à découvrir ce qu’il se passera.

Les épreuves révèlent ce que nous sommes

Lorsqu’une personne est confrontée à un problème, elle doit réagir et prendre des décisions sous la pression. Ces moments de conflit et de pression sont autant d’opportunités de montrer au lecteur/spectateur qui est vraiment votre personnage – ou ce qu’il apprécie, ce en quoi il croit et ce pour quoi il est prêt à se battre.

Et c’est l’une des choses pour lesquelles les lecteurs viennent dans les histoires. Ils veulent comprendre et apprécier comment votre personnage fait face à des situations difficiles et comment ces situations l’affectent, le défient et le changent en retour.

Les complications sont pensées en regard de l’objectif. Héroïnes et héros ont un désir et ce désir est contrarié. Cette volonté d’accomplir quelque chose (qui peut consister à obtenir ou à se départir de quelque chose comme un renoncement) est ce que la théorie (et pratique) narrative Dramatica nomme le Story Goal.
Et c’est objectif doit être clair dès le moment de l’incident déclencheur car lectrices et lecteurs accompagnent le héros ou l’héroïne tout au long de leur quête. Il se crée une liaison empathique car nous croyons reconnaître dans la situation du héros ou de l’héroïne des bribes plus ou moins nettes de notre propre vécu.

Le héros qui recherche l’assassin de sa femme ne crée pas de lien émotionnel avec le lecteur et la lectrice mais ceux-ci reconnaissent néanmoins le sentiment de perte, le vide laissé par la disparition de l’être aimé et ce sentiment est universel.
C’est le mouvement de la quête qui importe plus que la quête elle-même. Plus il se rapproche de sa vérité, plus le personnage souffrira. Il n’obtiendra peut-être jamais ce pour quoi il se bat, mais dans cette lutte désespérée, il aura grandi. Ce n’est pas une question de morale, seuls les imbéciles penseraient qu’il en soit ainsi. C’est un accomplissement de soi, qui que l’on soit. Et si cette adéquation à nous-mêmes ne se fait pas, alors ce sera une tragédie.

Un mouvement vers l’avant

C’est dans la confrontation de forces contradictoires (par exemple celles représentées par les fonctions de protagoniste et d’antagoniste) que se crée le battement qui fait avancer le récit. Mais d’où se sourcent ces forces ?

Dans les enjeux. Que met en péril chaque nouvelle complication pour chacun des personnages ? Le risque encouru crée une incertitude et du malaise surgit aussitôt la tension dramatique. L’amoureux éconduit pourra t-il récupérer le cœur de sa bien-aimée ?
S’il échoue, la tristesse sera son nouveau compagnon de route. Ainsi, les efforts fournis seront de plus en plus épuisants jusqu’à détruire le personnage. C’est cet engagement envers un résultat incertain qui passionne lectrices et lecteurs. C’est ce qu’ils admirent chez un personnage : sa résistance ou résilience malgré l’écrasante opposition qui ne cesse de l’harasser.

Comme dans la vie réelle, on a tendance à appliquer à un nouveau problème ce qui a fonctionné pour nous autrefois. Cela est néanmoins voué à l’échec car même s’il existe de fortes similitudes avec des problèmes autrefois rencontrés et surmontés, nos habitudes nous mènent à l’erreur.
Pour sortir de l’illusion dans laquelle on se fourvoie, on trouve en nous de nouvelles ressources. Chez un personnage et cela nous concerne probablement aussi, ces moyens existent déjà. Il suffit de les révéler et les épreuves successives de plus en plus bouleversantes sont autant d’opportunités à saisir pour grandir et changer (en un être meilleur que nous étions dans le meilleur des mondes ou, du moins, nous avons le sentiment d’obtenir de la vie ce que nous en attendons).

Par ailleurs, le désir est une chose et le besoin en est une autre. Votre personnage a besoin de changer afin qu’il puisse tenter de réaliser son désir. La révélation a donc lieu avant l’affrontement final avec l’adversité (ce moment se nomme le climax et l’issue du combat porte le message de l’autrice et de l’auteur).

La variété des situations conflictuelles illustreront les différentes étapes du changement qui s’opère chez un personnage. C’est une question d’arc dramatique : dans son Hero’s Journey, Joseph Campbell discerne lors de la neuvième étape la récompense du héros (Reward ou Seizing the Sword) car après avoir vaincu l’ennemi, survécu à la mort et finalement surmonté son plus grand défi personnel, le héros est finalement transformé en un nouvel être, ou du moins en un être plus en adéquation avec lui-même, émergeant de la bataille comme une personne plus forte et souvent avec un prix.

Pour la théorie narrative Dramatica, cette transformation s’ordonne en quatre étapes avec des moments de transition entre les étapes. On conçoit aisément que les événements qui rendent légitimes cette récompense ou ces différentes étapes doivent être diversifiés afin de montrer par quoi sont passés le héros et l’héroïne avant de devenir ce qu’ils sont devenus car leur destinée n’était certainement pas écrite d’avance.

Le conflit interne

Ce qu’il se passe à l’intérieur du personnage vous aidera à déterminer ce qu’il se passe à l’extérieur, c’est-à-dire ses actions et réactions. S’interroger sur l’intériorité de ses personnages est une bonne approche après avoir posé la prémisse de son histoire.

On peut établir un rapport de cause à effet entre le conflit interne (un trauma par exemple) et l’action (lorsque le personnage crée l’événement) ou la réaction (lorsqu’il répond à un événement).

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