PROPP : LA RECONNAISSANCE DU HÉROS

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Vladimir Propp, linguiste et folkloriste russe, a systématiquement analysé les contes populaires russes dans son ouvrage clé, Morphologie du conte. Il y divise les contes en 31 fonctions, des actions récurrentes constituant la trame narrative.

archétypes

Propp identifie des étapes spécifiques dans chaque conte. Par exemple :

  1. Absence : Un personnage important quitte la maison.
  2. Interdiction : Un héros reçoit une interdiction.
  3. Violation : L’interdiction est enfreinte.

Le moment où le personnage principal est salué pour ses actions héroïques survient après qu’il les a accomplies. Dans de nombreux contes, cela se traduit par le retour du héros à la maison et la reconnaissance de son identité et de ses actes, souvent symbolisée par un mariage royal ou une récompense. Cette méthodologie permet de décortiquer les récits en éléments fondamentaux, facilitant ainsi la compréhension de la structure narrative et l’analyse comparative des contes. Par exemple, dans Cendrillon, l’héroïne est reconnue par sa pantoufle de verre, illustrant la fonction de reconnaissance.

Ce moment où le héros ou l’héroïne sont enfin applaudis pour leurs actes de bravoure, c’est le nœud de tout bon conte de fées. C’est un instant de triomphe pur, quand leur vraie nature héroïque, longtemps cachée ou ignorée, se révèle enfin sous les projecteurs. Toutes les épreuves et obstacles qu’ils ont surmontés deviennent alors des médailles de leur victoire, restaurant justice et équité.

L’apogée du récit, ce moment de reconnaissance, est souvent illustrée par une image saisissante, un éclat éblouissant. Et ce n’est pas juste un truc de cinéma, car cette révélation est cruciale pour le héros lui-même, qui comprend alors pleinement son mérite et sa puissance. Et pour nous aussi, car notre empathie et notre attachement pour le personnage s’intensifient. Cette reconnaissance du héros, voyez-vous, elle met en lumière des valeurs essentielles comme le courage, la persévérance et la justice. Elle booste l’estime de soi du héros, et du même coup, elle renforce notre empathie pour lui. Parce qu’après tout, nous nous reconnaissons dans ce miroir. Et qui n’aime pas un bon reflet flatteur ?

Dans ce récit épique, l’auteur et l’autrice ne se contentent pas de mettre en scène les exploits d’un héros solitaire. Ils nous plongent en fait au cœur d’un royaume plongé dans le doute et le chaos. C’est comme si l’endroit était dirigé par David Lynch lors d’une journée particulièrement confuse. Mais ensuite, entre en scène notre individu extraordinaire, dont le courage et l’abnégation apportent un souffle d’air frais à toute la contrée.
ForrestCe à quoi nous assistons puisque nous y participons aussi, c’est à une véritable catharsis collective, une vague de fierté retrouvée qui déferle sur la population toute entière. Notre héroïne et notre héros incarnent non seulement leurs propres idéaux, mais aussi ceux d’une nation entière qui avait perdu de vue ses valeurs fondamentales au milieu du désordre ambiant. Son triomphe devient le symbole d’une renaissance, où chacun trouve une nouvelle foi en l’avenir. C’est comme Forrest qui traîne tout un pays avec lui.

FélicitéLe récit prend une allure onirique, tant ce renouveau semble surréel après les ténèbres traversées. L’autrice, l’auteur crée une ode épique et fédératrice, où un être remarquable rallume l’espoir d’un peuple entier. C’est un véritable chef-d’œuvre cathartique, annonçant l’aube d’une nouvelle ère. C’est un conte qui insuffle la vie à la notion qu’une personne peut vraiment faire une différence, même si le reste d’entre nous ne sont que des figurants dans le grand film de la vie. Un peu comme Félicité de Alain Gomis, où un seul personnage dépasse sa propre histoire pour toucher toute une communauté.

L’ordre, autrefois fragile et menacé, est rétabli avec une vigueur nouvelle. Les principes qui cimentent la cohésion sociale se voient renforcés, tandis que le désarroi, tel un mauvais rêve, s’efface pour laisser place à une harmonie renouvelée. La communauté, soudée par cette victoire partagée, se réinvente dans un élan de solidarité et de détermination.
Cette dynamique de renaissance ne se limite pas aux frontières du royaume ou de la communauté ; elle peut s’étendre et inspirer d’autres groupes, d’autres sociétés en quête de stabilité et d’espoir. Ainsi, l’exemple d’un seul peut devenir le phare qui guide une multitude vers une ère de prospérité et de sérénité.

C’est la classique histoire du prince exilé qui fait son grand retour. Notre prince, ayant été banni du royaume pour des raisons qui impliquent probablement un oncle maléfique ou une intrigue de palais complexe, passe ses années de formation à aiguiser ses compétences et à prouver sa valeur. Il est l’Aragorn de notre histoire, moins sombre et avec un peu plus de charme.
ProppPuis, le moment tant attendu arrive : il est identifié par une marque de naissance en forme de blason royal ou peut-être un anneau qui appartient à la famille depuis des générations ou bien encore une cicatrice. Ce n’est pas simplement une fin heureuse ordinaire. C’est le triomphe de la vérité et de la justice sur la tromperie et la vilenie. C’est Luke Skywalker détruisant l’Étoile de la Mort. Notre héros ne reçoit pas juste une tape dans le dos ; il reprend sa place légitime, restaurant l’ordre et l’harmonie dans le royaume comme nous le montre la scène finale de Star Wars IV.

Alors, voilà le truc : la reconnaissance du prince est le rebondissement clé qui boucle la boucle. Il ne s’agit pas seulement de lui ; il s’agit de remettre le monde en ordre. Il obtient une légitimité complète, rétablissant son droit de naissance et mettant fin à toutes ces histoires en suspens de manière satisfaisante. La lectrice et le lecteur obtiennent leur catharsis, et nous sommes satisfaits de cette justice poétique.

L’apothéose de la reconnaissance

L’écho résonne profondément dans notre psyché, touchant des cordes sensibles de validation, d’identité, et le plaisir des récompenses bien méritées pour les efforts sincères. C’est comme dans Casablanca, quand Rick laisse partir Ilsa : c’est doux-amer, mais cela nous touche parce que nous aspirons tous à être reconnus pour notre véritable valeur et nos accomplissements.
Notre vie, semblable à un drame bien écrit, est une quête constante pour ces moments où le rideau se lève et où nos véritables personnalités brillent sous les projecteurs.

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