ÉVITER LE SUPERFLU

5
(1)

Le superflu est facile à écrire. On craint que les mots posés ne communiquent suffisamment alors on en rajoute. On écrit des scènes entières qui, isolément, sont correctement composées mais lorsqu’il s’agit de les assembler afin de constituer un tout, on s’aperçoit que ces scènes entières ne sont pas pertinentes dans la signification de ce tout.
Elles ne participent pas de sa continuation.

Le résultat est que la lectrice ou le lecteur d’un tel scénario s’ennuie. Lutter contre ce sentiment de vide ou d’inutilité consiste alors à travailler la dramatisation des scènes. Qu’est-ce que cela signifie ? Que les éléments qui participent d’une scène, c’est-à-dire le lieu, la temporalité (puisqu’une scène existe dans le temps) et les personnages nous montrent la situation. Par exemple, colorer une scène des premières lueurs de l’aube est un signe qui donne du sens pour dire (c’est ce qu’on nomme diegesis : le fait ou l’acte de raconter) que le personnage au cœur de la scène dont le regard porte vers cet horizon connaît dorénavant une nouvelle destinée.

L’aube, le regard sont des éléments dramatiques qui donnent une forme à la scène (c’est ce qu’on nomme mimesis parce qu’elle nous donne à voir). Écrire un scénario, c’est être économe. Ce n’est pas d’aller droit au but, ce qui serait tout autant ennuyeux, mais de penser une forme qui exprime précisément ce qu’on a à dire. Ce qu’on a à dire ne se voit, ni s’entend ; néanmoins, cela existe derrière ce qu’on aperçoit.

Cause & effet

Un procédé narratif possible pour atteindre à la signification d’un récit est le jeu des causes et des effets. Ce procédé a le mérite d’assurer une continuité.

Souvent, autrices et auteurs procèdent à rebours. Ils savent quel effet ils souhaitent (ou même veulent) obtenir sur le lecteur et la lectrice, et depuis cet effet, ils remontent vers les causes possibles. Pour un effet, de multiples causes sont possibles. L’inventivité s’accorde avec la créativité.

Un point qu’il faut clarifier d’emblée est de savoir précisément ce qu’on a à dire. Par exemple, le héros est un adolescent sans but lorsque nous faisons sa connaissance. Le message à faire passer est que pour devenir un homme, la souffrance et la douleur (autant physiques que morales et spirituelles) sont nécessaires.
Votre intention ainsi posée, vous savez où vous allez.

Mais diegesis n’est pas évidence ; il faut qu’elle soit démontrée par une représentation en quelque sorte palpable, sensible ; c’est-à-dire comment voulez-vous montrer ce que vous voulez dire ? Par exemple, une séquence a pour but de montrer l’erreur que fait une héroïne en croyant que son amour qui se bat pourtant pour le rejoindre l’a oubliée. Ce qu’elle ignore et qui conduit à l’effet, c’est que les lettres qu’elle écrit afin de maintenir le lien avec son amour sont interceptées par ceux chez qui elle réside.
Si les circonstances décrivent un triangle amoureux entre un prince qui fascine notre héroïne et un manant qui est son amour d’enfance, alors la naïveté de la jeune fille autorise cet effet.

La cause immédiate ici, ce sont les lettres. Non seulement celles qu’elle écrit mais aussi celles que son amour d’enfance essaie de lui adresser. Nous entendrons les mots que ces deux amants s’écrivent et nous comprendrons aussi la décision de la jeune fille de s’abandonner au doute et d’y répondre en cédant à sa fascination pour le prince.
On peut se demander maintenant pourquoi la jeune fille résidetelle en ce lieu ? Elle semble sy habituer mais estelle venue volontairement ou futelle forcée ?

La question est donc de connaître la cause possible pour un effet donné. Cette cause est essentiellement déterminée par la vraisemblance. Si un jeune homme riche brûle sa vie dans l’insouciance, cela peut s’expliquer par le rejet de sa famille. Cette incurie est l’effet de ce rejet. On peut alors imaginer un mentor qui guidera notre héros vers cette expérience épiphanique qui consistera, pour lui, à descendre en soi (douloureusement d’ailleurs) et y rencontrer l’homme qu’il doit être.

La conséquence posée, le travail consiste en la recherche des causes les plus pertinentes pour assurer la continuité du récit. Ainsi, chaîner les événements à rebours peut aider à discerner ce qui est utile pour le scénario de ce qui n’est que superficiel.

Pour nous permettre de continuer à vos côtés, pensez à nous faire un don de temps en temps. Merci

Comment avez-vous trouvé cet article ?

Cliquez sur une étoile

Average rating 5 / 5. Vote count: 1

No votes so far! Be the first to rate this post.

Cet article vous a déplu ?

Dites-nous pourquoi ou partagez votre point de vue sur le forum. Merci

Le forum vous est ouvert pour toutes discussions à propos de cet article

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.

HTML Snippets Powered By : XYZScripts.com