Il y a des moments dans un récit qui déterminent la trajectoire que suit un personnage. Ils ne sont pas nombreux, quelques étapes suffisent mais elles sont néanmoins nécessaires.
Ces moments s’organisent et en tant qu’ensemble, ils supposent une structure. La matière dramatique qui fonde cette structure est la notion de choix. Les décisions que prend un personnage lors du fragment de sa vie qui nous est représentée dans le récit sont l’un des principaux éléments dramatiques qui constituent son évolution personnelle, essentiellement d’ordre psychologique.
Des croyances remises en cause
Comme dans la vie réelle, un personnage est amené à prendre une décision qui déterminera sa destinée. Il ne s’agit pas ici de prédire ce que deviendra un personnage. Cette décision nous dévoile en tant que lectrice et lecteur un trait caché de la personnalité du personnage. Par les décisions qu’il prend, nous connaissons plus intimement qui est vraiment ce personnage et cela participe à établir une relation de sympathie (nous comprenons sa situation) ou d’empathie (nous reconnaissons les sentiments qu’il éprouve pour en avoir fait nous-mêmes l’expérience mais dans des conditions autres).
Pour prendre la pleine mesure de cette décision, il nous faut connaître ce en quoi croit le personnage. Croit-il que l’amour est hors de sa portée ? S’il décide de baisser sa garde, cette croyance sera bouleversée. Mais si nous ignorons les raisons qui expliquent pourquoi & comment le personnage s’est construit sur cette croyance, la valeur de ce choix nous échappera.
Pour installer le personnage dans sa croyance, l’élément utilisé est un désir. Un personnage veut quelque chose qui lui est extérieur. Par exemple, l’héroïne veut venger sa famille qui a été massacrée.
Alors qu’elle était encore enfant, un homme la recueillit et fit nourrir en elle ce désir de vengeance. Ce que notre héroïne ignorait, c’est que cet homme est en fait l’antagoniste qui se sert de cette croyance inculquée en la justice pour armer un bras innocent comme moyen de se débarrasser de ceux qui gêneront bientôt son ambition.
L’incident déclencheur
L’incident déclencheur est un élément dramatique qui appartient à la structure du récit et qui met en place les circonstances qui président au premier choix que devra faire le personnage principal. C’est une situation nouvelle pour le personnage. Elle l’effraie et naturellement, il commence par refuser cet appel à l’aventure qui résulte de cette toute première décision.
Cependant, le passage de la cause à l’effet, de l’acceptation de l’aventure au bouleversement des croyances maintenues jusqu’à présent, dure jusqu’au point médian.
Le point médian n’est pas l’exacte milieu du récit ; il désigne une articulation majeure au cours de laquelle le personnage principal s’aperçoit que tout ce en quoi il croyait est vain, chimérique.
Il est alors face à un second choix. Posons qu’un personnage a toujours été animé par l’appât du gain contre le sens de la famille. L’intrigue a fait en sorte que son propre frère est la clef qui ouvre le coffre aux richesses mais cela signifie qu’il doit sacrifier ce frère.
La décision qu’il doit prendre maintenant est soit de tenter de rétablir les croyances erronées qui ont construit sa personnalité, soit il reconnaît enfin s’être trompé et découvre avec joie que la famille est la vraie richesse et qu’il est vain de posséder les richesses du monde si l’amour d’un frère est le prix à payer.
Si le personnage prend la bonne décision, alors il grandit en tant qu’être humain car c’est bien cela le sujet du récit : il décrit le cœur humain.
Si on accepte la notion de catharsis qui consiste, suivant Aristote, à ce que le lecteur/spectateur réalise lui-même qu’il existe d’autres horizons alors l’arc dramatique suivi par un personnage est le moyen de faire passer ce message.
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