LE PERSONNAGE FAIT L’HISTOIRE

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Le personnage fait l’histoire. D’où vient-il ? C’est-à-dire comment une autrice ou un auteur engendrent-ils un personnage ? Construire un personnage commence par établir ce en quoi il croit. Du moins, si les croyances d’un personnage vous parlent d’emblée. Sinon, vous pourriez aussi bien vous pencher sur ses souvenirs, responsables pour une grande part de ses croyances.

Les croyances

Les croyances sont une voie d’accès privilégiée à un personnage. Le désir que peut concevoir un personnage dépend d’abord de ses croyances. En effet, comme dans la vie réelle, on ne risque pas sa santé physique et mentale à poursuivre une quête si l’on n’était pas convaincu de la nécessité de cette poursuite pour notre propre intérêt.
En fiction, il s’avère souvent que cette quête est d’abord une illusion mais le personnage ne fait pas la distinction exacte entre la réalité de ce qui l’entoure et la perception ou l’interprétation qu’il en fait. Parfois, la quête masque un besoin dont il faut prendre conscience.

Avoir un objectif implique de mettre en place une stratégie pour l’atteindre. Il y a autant de stratégies que d’individus car chacun agit selon son vécu. Ce sont nos expériences passées qui façonnent ce que nous sommes devenus et notre comportement actuel dépend énormément de celles-ci.

Ce que nous sommes à un moment quelconque de notre vie s’accompagne de forces et de faiblesses. Ainsi, ce que croit un personnage parce que son éducation l’a ainsi formé, parce qu’il a connu un trauma dans son enfance, parce qu’il est issu d’un milieu social ou familial qui a implanté en lui des a priori sur le monde.. toutes ces expériences qu’il a vécu se condensent pour donner au personnage, s’il était une phrase, son unité minimale de sens.

Lorsque nous faisons connaissance avec un personnage, son existence nous est d’abord expliquée par ses croyances. La lectrice et le lecteur ne se contentent pas seulement d’observer un individu qui s’agite dans un monde inventé par un auteur ou une autrice. Ils participent à la présence de ce personnage dans le monde ; ils parviennent à sentir comment il vit le monde.

C’est par les croyances d’un personnage qu’auteur et autrice établissent une problématique et une thématique et remplissent ainsi un récit avec du sens. Ce que croit un personnage sur lui-même et sur le monde lui donne une consistance intérieure et lui fournit aussi des points d’appui extérieurs lorsqu’il se réfère par exemple à une institution pour justifier ses actes à cause qu’il croit en cette institution.
Cela ne signifie pas qu’il détient la vérité car les impressions que l’on tire du monde et notre mémoire sont éminemment subjectives. Un personnage se construit sur des valeurs qui lui sont propres. Ce sont celles-ci qui détermineront son désir et son besoin.

Le désir & le besoin

Le désir est quelque chose de visible. Il porte sur un objet extérieur au personnage. Cette visée particulière qui fait d’un objet un objet de désir ne s’accorde pas avec n’importe quel objet qu’une providence heureuse ou malheureuse jette sur notre chemin, le désir pour un objet s’enracine dans nos croyances.

Le désir est une expérience subjective. Il est le rejeton de nos passions et il est changeant. Il est le résultat non pas de ce que nous percevons & prenons conscience du monde et de soi qui consiste en un pouvoir de transformation qui fait de nous non pas un autre mais l’être que nous sommes véritablement ; il est ce que nous comprenons du monde et de nous-mêmes à un moment donné de notre existence tout emplie à ce moment d’un vécu comme autant de propriétés qui ont fait de nous ce que nous sommes devenus.

La force antagoniste prend appui sur ce désir pour exister. Le désir du protagoniste cause une opposition. Si une héroïne par exemple s’est fixée comme objectif de mettre fin à la corruption qui règne dans une institution à laquelle elle croit, elle excite aussitôt une opposition qui peut prendre n’importe quelle forme.
Cette forme a alors pour but de contrarier le désir du personnage principal. Il y a drame et par conséquent récit lorsqu’un personnage veut quelque chose et que cette volonté provoque une réponse qui lui signifie son désaccord. Quelque chose ou quelqu’un d’autre n’accepte pas ce désir.

Si la succession d’événements qui construisent l’intrigue ne sont pas logiquement liés (lorsque la conséquence d’un événement est la cause directe d’une autre conséquence) alors la liaison est néanmoins possible parce que ce qu’il arrive au personnage s’explique par sa volonté à poursuivre un objectif.
Soit les faits s’enchaînent logiquement, soit, si manifestement deux événements n’ont pas de rapport, ils sont néanmoins liés à la volonté.

Qu’est-ce qui explique la volonté ?

Le besoin, c’est-à-dire un manque, est le fondement d’une volonté. Celle-ci peut avoir ou non conscience de ce manque (on peut se savoir lâche ou ignorer le besoin que l’on a de se sentir aimé). Névrose ou psychose, toutes deux décident pour une grande part de comment s’exercera une volonté.

Le besoin est la nécessité pour son propre regard de se détourner de ce qu’il concevait du monde et de soi et de découvrir en soi l’ensemble des potentiels qui, enfin mis au jour, font de nous des êtres entiers, en harmonie avec nous-mêmes afin de donner sens à notre place dans le monde.

L’objectif du héros n’est pas ce dont l’aventure d’un personnage est faite. Ce parcours héroïque consiste pour un personnage à évoluer en un être meilleur en prenant conscience que ce qu’il poursuit n’est pas un quelconque objet du monde extérieur (comme de sauver le monde d’une menace nucléaire par exemple) mais bien la quête personnelle de soi. Cette recherche est son véritable objectif et la finalité d’un récit.

Un personnage est d’abord en lutte avec lui-même. Il se débat avec un mensonge qu’il se fait à lui-même. Un personnage par exemple qui a connu une séparation douloureuse concevra à partir de ce moment que toutes les relations amoureuses sont vouées à l’échec. Son besoin est de connaître le véritable amour mais il devra d’abord se défaire de ses préjugés.

S’il ne triomphe pas de lui-même et s’il ne réussit pas non plus son désir, son récit devient tragique. Ce que le personnage doit comprendre, c’est que ce qu’il lui manque ne se trouve pas dans le monde, en dehors de lui, mais en lui. Et il doit le découvrir.

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