INTRIGUE & HISTOIRE : DIFFERENCES

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Une intrigue n’est pas l’histoire. Pas plus qu’une histoire a besoin d’une intrigue forte.

N’importe quelle intrigue peut donner une bonne histoire d’amour, le très célèbre genre de la Love Story.
L’intrigue consiste en la description des événements qui se produisent au cours d’une histoire.
Et qu’est-ce que l’histoire autrement que la façon dont les personnages réagissent aux événements.
Le lecteur et peut-être plus sensiblement celui d’un scénario a des attentes. L’auteur doit aller à la rencontre de ce que le lecteur espère trouver dans une histoire.

Une structure narrative

C’est par le biais d’une structure qu’un auteur peut répondre aux attentes de son lecteur. On peut nous rétorquer qu’une structure pourrait donner une impression de fabrication et celle-ci est peut-être rédhibitoire envers notre créativité.

Sans détailler outre mesure, considérons que satisfaire le lecteur est la priorité d’un auteur et à moins que vous ne vous lanciez dans un cinéma expérimental, une structure sera indispensable pour ne pas frustrer le lecteur.

Ensuite, lorsqu’on connait les règles, il est probablement plus facile de les briser.

De très nombreuses histoires adhèrent à une structure. Et cela n’impose en rien la manière dont l’histoire est racontée ni ne décide d’un thème particulier.
L’auteur est responsable de son projet. C’est lui qui fera la différence et non qu’il utilise telle ou telle structure ou bien l’absence de structure.

La tradition

Les traditions culturelles ont forgées les attentes du lecteur. Elles sont donc un guide pour l’auteur. Cependant, l’expérience de ce dernier et son intuition le convaincront du moment où il peut briser les normes sans frustrer son lecteur.

L’intrigue

L’intrigue est donc la série d’événements qui génèrent du conflit dans le cours de l’histoire.
Trouver l’assassin ou survivre à un cataclysme sont des intrigues car ils sont constitués de moments qui aboutissent à la résolution de l’histoire.

Globalement, une intrigue est action alors qu’une histoire relate les émotions qui sont liées à l’action. Bien sûr qu’un événement peut être causé par la réaction émotionnelle d’un personnage mais l’action est définitivement affaire d’intrigue.

L’intrigue est la conséquence des décisions que prennent les personnages. Ne pas choisir, c’est encore prendre une décision.
Et les événements se produisent à la suite des choix faits par les personnages (et en particulier ceux du protagoniste).

Trois mouvements dans une structure

Depuis Aristote, on considère qu’une histoire est faite d’un début, d’un milieu et d’une fin.
L’acte Un (le début) se termine lorsque l’intrigue (c’est-à-dire l’acte Deux) se lance. Et habituellement, le milieu de l’histoire se termine par un climax, c’est-à-dire l’ultime confrontation entre le protagoniste et son antagonisme.

Un découpage arbitraire pourrait statuer que sur un scénario de 100 pages, les 30 premières pages concernent l’introduction des personnages et des enjeux, c’est-à-dire tous les éléments dramatiques et constitutifs  qui figureront dans l’intrigue.
Le milieu qui décrit les pérégrinations et tribulations du personnage principal durera une cinquantaine de pages.
Et il serait accordé une vingtaine de pages au dénouement. Notez que celui-ci pourrait tout aussi bien s’étendre sur deux pages. Tout dépends des exigences de l’histoire.

Planifiez les événements

Afin de se faciliter la tâche et de rester logique avec ce qui se passe dans son histoire, un auteur pourrait planifier l’ordre des événements.
Cela l’aidera à comprendre où les décisions sont prises et où l’action se produit.

L’intrigue est sous l’influence d’une Rising Action, c’est-à-dire que la tension dramatique monte en puissance progressivement.
Il existe une dialectique au sein de la fiction. Les relations entre les personnages, la dynamique qui s’installe entre eux, l’action elle-même, tout cela conduit à créer un mouvement qui va en s’amplifiant.

D’aucuns le nomment le rythme de l’histoire. Et ce rythme s’accélère au fur et à mesure de l’avancée de l’intrigue. Par exemple, alors que les événements décrits dans l’acte Un pourrait durer plusieurs jours, les événements illustrés vers la fin de l’histoire auraient une durée de quelques heures.
Le temps est effectivement un moyen de jouer avec le rythme. Mais il est aussi possible de multiplier les événements. La précipitation ainsi créée revient au même.

Un arc dramatique

Une histoire (et non l’intrigue) dépeint le changement, la transformation, l’évolution d’au moins un personnage (généralement le personnage principal).

L’intrigue est l’explication de cette transfiguration du personnage en signalant les prises de conscience dont il est la proie en regard des épreuves qui l’attend dans le cœur de l’intrigue.
Par exemple, un personnage qui se dévalorisait au début de l’histoire peut faire preuve d’un courage immense (proche du sacrifice) et découvrir sur lui-même qu’il n’est pas l’être lâche qu’il pensait être.

La transformation du héros au cours de l’histoire est la preuve que nous faisons nous-mêmes de nous quelque chose d’autre que ce que l’on a fait de nous. Ce changement nous permet pleinement de comprendre notre place dans le monde.

Passé, présent, futur

L’avantage de considérer une structure en trois mouvements, c’est qu’on peut les considérer comme le passé, le présent et le futur. Ensuite, ces trois mouvements peuvent s’intervertir. Commencez par le futur est alors possible.

Et illumine ces périodes comme parties intégrales à l’histoire.
Le temps peut aussi être employé alors que le protagoniste doit compléter une mission ou réaliser quelque chose avant un temps limite.
Cette sorte de course contre la montre est aussi très efficace auprès du lecteur.

Il est possible aussi de suggérer le passé et le futur par quelques indices qui autorisent le lecteur à créer ses propres variations personnelles de l’histoire.
Dans Shining de Stephen King adapté par Stanley Kubrick, les fantômes et les hallucinations marquent l’assujettissement au passé d’une famille de classe moyenne, par exemple.

L’intrigue : une prémisse simple

Une intrigue peut se réduire à une ou deux phrases. C’est sa simplicité qui la désigne en tant qu’intrigue. L’histoire est complexe. Si une intrigue vous force à la décrire en trop de phrases, elle sera beaucoup trop complexe.

Les intrigues de Shakespeare sont simples mais les histoires sont des merveilles de complexité.
Une intrigue est d’abord un conflit basique à partir duquel d’autres conflits seront créés (simultanément ou en dehors de ce conflit central).

Une intrigue efficace expose un conflit majeur. Et celui-ci s’exprime simplement.

Antagoniste contre protagoniste

Cet intrigue classique et terriblement efficace expose un personnage central et une opposition (plus précis qu’un opposant).
Une opposition peut prendre n’importe quelle forme. Par exemple, votre héros veut faire partie de la troupe de théâtre où sa petite amie participe déjà. Mais le directeur de la troupe lui met des bâtons dans les roues parce que lui aussi a des vues sur le petite amie.

Il n’y a donc pas de véritable opposant mais bien une opposition qui se manifeste sous la forme d’un opposant. Si votre héros a un rendez-vous important et que des embouteillages lui bloquent le passage, nous aurons là aussi une opposition mais pas d’opposant déclaré.
Bien que l’objectif du héros soit contrecarré (l’issue de ce rendez-vous oriente la suite de l’histoire).

La relation qui unit l’antagoniste et le protagoniste est conflictuel car d’un côté, nous avons un personnage principal qui a un but et de l’autre, une opposition qui va tenter de le stopper avant qu’il n’atteigne ce but.

Des personnages transcendés

Une intrigue montrant deux personnages en conflit ou un personnage luttant contre lui-même est une façon de faire d’expliciter quelque chose de plus global à partir du particulier.

Par exemple, Luke luttant contre Darth Vader n’est pas une finalité en soi. C’est la description d’une république libre luttant contre un empire dictatorial.
Et même cette intrigue renvoie à un motif encore plus universel : la lutte du bien contre le mal.

Les personnages sont apparemment présentés à travers une intersubjectivité conflictuelle (qui nourrit l’intrigue) mais objectivement, l’histoire est beaucoup plus que cela.

Le protagoniste lutte contre le monde

Ce type d’intrigue montre le combat du personnage principal contre les éléments naturels ou un quelconque phénomène (qui peut être sociétal) qui menace le héros ou quelque chose qui est important pour lui.

Cette intrigue est très bien utilisée pour des personnages qui manquent de confiance en soi. Si le parcours initiatique du jeune Luke n’avait pas été au centre de la démarche de George Lucas, l’intrigue de Star Wars aurait très bien pu être celle-ci.

Le monde ne porte pas en lui une éthique. Il est simplement là. Vaincre l’adversité requiert alors quelque chose d’interne. Le personnage doit s’élever contre le monde. Cela nécessite un courage, une force que l’on ne peut trouver qu’en soi.

Le protagoniste lutte contre lui-même

L’homme est son pire ennemi. La résolution de son problème commence par comprendre que ce problème est lui-même.
Ce type d’intrigue qui décrit  un combat intérieur est généralement l’occasion d’intrigues secondaires.

L’intrigue principale est constituée d’actions, d’une mission à accomplir. Elle est en quelque sorte spectaculaire.
Mais la véritable histoire, elle se situe dans l’intrigue secondaire qui illustre la façon dont le héros essaie de vaincre sa propre malédiction, ses propres démons.
Un exemple classique serait un personnage alcoolique dont les tribulations à travers l’intrigue l’amène progressivement à se sevrer (si cela est possible).

Puisqu’un protagoniste ou bien un personnage principal s’ils sont différenciés dans l’histoire a nécessairement (presque par définition) une faille dans sa personnalité, un problème émotionnel qu’il doit résoudre d’ici la fin de l’histoire, on peut considérer que toutes les histoires inclut une intrigue où une subjectivité se combat elle-même.

Elle doit donc triompher non pas tant de quelque chose qui est extérieur à elle-même mais elle doit au préalable découvrir et conquérir ce quelque chose qui en elle-même empêche le personnage d’avancer dans sa vie, d’aller à la rencontre de sa vraie nature.

Les trois briques d’une histoire
Le libre-arbitre des personnages

Ecoutons cette réplique d’un personnage :
Je suis un lâche, il ne peut en être autrement.

La fausseté de cette assertion est évidente. Le sujet (je) présuppose que sa lâcheté est dans sa nature, qu’il s’agit de son essence comme s’il était déterminé originairement à être un lâche (il ne peut en être autrement).

Or, le fait qu’il prenne conscience de sa lâcheté est une ouverture vers des possibilités. En effet, pour juger de sa lâcheté, il est bien obligé de comparer ses actes qui lui inspirent de la lâcheté à d’autres actes qui sont autant de preuves de courage.

Le fait même de cette comparaison l’autorise à se juger lâche. Ce jugement fait ce qu’il pense être. Il n’est pas lâche en soi, il se voit seulement comme un lâche.

S’il prenait un peu de distance, il pourrait choisir entre des actes qui font de lui un lâche et d’autres actes qui le montreraient courageux.
Le personnage a toujours le choix. Ce sont ses décisions qui le définissent. A tout moment, il peut cesser d’être une chose et devenir autre chose.

Lorsqu’on regarde le vide, nous avons de même le choix entre nous jeter dans cet abysse et de ne pas nous précipiter dans le vide. Nous sommes libres de nos actes.
Personne ne nous contraint à prendre la décision de faire ou de ne pas faire le grand saut.

Cette liberté de choix doit être au cœur de vos personnages. Et la difficulté qu’elle suppose ne doit pas être éludée même si à l’évidence, vous avez en tant qu’auteur, une idée de où mèneront les décisions que vous ferez prendre à vos personnages.

Une série de décisions

Une histoire peut se réduire à une série de réactions émotionnelles et de choix. Quels que soient les motifs, les finalités des décisions prises par les personnages, les choix se commutent en nœuds dramatiques.

Ces derniers proposent ensuite de nouveaux choix. Gardez à l’esprit que les décisions s’accompagnent toujours d’émotions. Vous ne pouvez montrer une décision sans impliquer un impact émotionnel lié à celle-ci.

Une histoire, c’est d’abord un message

Que vous illustriez une idée ou une théorie personnelle sur la nature humaine ou quoi que ce soit d’autre, il est important que l’histoire est un but cohérent.

Vous avez un message à transmettre. D’aucuns diraient qu’une histoire véhicule une leçon de vie.
La question préalable qu’un auteur devrait se poser est de savoir ce qu’il a à dire en écrivant une histoire.

Je sais bien qu’on hésite parfois à participer à l’aventure de quelqu’un que l’on ne connaît pas. Et si vous ne pouvez pas m’aider, je le comprends vraiment.
Cependant, si vous pouvez le faire et que vous appréciez Scenar Mag, Merci de me soutenir financièrement

 

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