LE GENRE SCI-FI

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Un récit de fiction est en soi une réflexion sur la vie. Le genre sci-fi permet peut-être une interrogation plus aiguë de la chose.

genrePour Mikel J. Wisler, aucun autre genre ne parvient à être aussi directement philosophique ou à aborder ouvertement les questions existentielles, métaphysiques et épistémologiques auxquelles l’être humain est confronté.

Et si… ?

La base du brainstorming Et si… ? est au cœur même du genre de la science-fiction.

Et si… le voyage dans le temps était possible, que se passerait-il ? (Alors qu’il semble de plus en plus évident que nous ne pourrons jamais retourner dans le passé, le saut dans l’avenir pourrait être possible. Par ailleurs, on peut admettre que nos âmes survivent comme dans la série Altered Carbon où le physique est une sorte de manchon (sleeve) interchangeable).

Et si… des extraterrestres nous rencontrent, que feraient-ils de nous ? Et si… je connaissais le futur, serais-je capable de le changer ? Est-ce que j’en aurais seulement la volonté ? Et si… les IA devenaient sensibles, vraiment sensibles, seraient-elles morales ? Et si… la réalité n’était qu’une simulation ? On peut s’interroger sur tout avec le genre sci-fi.

La nature même de la question Et si… ? (d’où le succès du brainstorming) est d’émettre des hypothèses ou des théories, de supposer, d’imaginer.

La science-fiction touche souvent au cœur même de ce que signifie être être humain. Selon Mikel J. Wisler, un film comme L’Homme bicentenaire peut spéculer sur la nature essentielle de l’humanité en proposant l’histoire d’un robot qui devient lentement humain.
Cette interrogation contient des questions sur ce qui fait de nous des êtres humains en premier lieu.

Certes, un récit de fiction quel que soit son genre est une interprétation. Et chaque lecteur, chaque spectateur, peut se livrer après coup à tout un tas de réflexion sur le point de vue amené par l’histoire.
L’Homme bicentenaire nous demande si nous avons seulement une intelligence que démontre souvent brillamment notre esprit ou avons-nous aussi une âme ?

Et si… nous n’avions pas cette âme, serions-nous seulement de complexes machines biologiques ? Et si… quelque chose de non humain s’avérait posséder une âme, pouvons-nous lui accorder les mêmes droits qu’aux êtres humains ?

Une éthique

La science-fiction est souvent aux prises avec des questions éthiques. Minority Report traite des questions de déterminisme et de libre-arbitre avec son complot sur des êtres capables de prémonition qui leur permet de savoir quand quelqu’un est sur le point de commettre un meurtre.
Mais comment pourrions-nous être sûrs que quelqu’un est sur le point de commettre un meurtre ? C’est une question d’épistémologie, de connaissance.

Si des statistiques permettent de prédire nos actions, possédons-nous encore un libre-arbitre ? Cela est une question de métaphysique. Et si… cette liberté n’est qu’illusoire, serions-nous alors responsables de nos actions ? Et là, nous sommes sur une question de morale.

genreDans A Scanner Darkly de Richard Linklater, d’après le roman Substance mort (ou A scanner Darkly) de Philip K. Dick, nous sommes confrontés à l’histoire d’un flic infiltré si profondément ancré dans un monde technologiquement alambiqué d’identités cachées et de trafic de drogue que personne ne sait qui est le flic infiltré, pas même les flics.

La question soulevée par A Scanner Darkly est de savoir jusqu’où on peut aller ? A quel moment devient-on la chose même que l’on est censé combattre ? A quel moment allons-nous perdre notre propre identité ? Ne peut-on voir dans A Scanner Darkly la métaphore ou le reflet de notre propre société ?

La réalité

L’un des plus grands exemples d’une science-fiction qui pose une véritable question philosophique est Matrix. La principale interrogation dans Matrix est l’une des questions centrales de l’épistémologie : comment savons-nous que le monde qui nous entoure est réel ?

Et si… nous considérions que Matrix est une allégorie de l’allégorie de la caverne de Platon ?

Le parcours de Neo dans Matrix pour s’extraire du monde simulé de la Matrice reflète le besoin d’illumination et de liberté que l’esclave de la caverne de Platon doit satisfaire pour accéder au monde réel.

Au cœur de la philosophie de Platon se trouve la notion selon laquelle il existe une existence supérieure et plus essentielle que le monde physique, qu’il compare aux ombres projetées sur la paroi de la grotte.
Neo n’incarne t-il pas à la fois les figures du Christ et de Bouddha ?

Les grandes questions Et si… ? ont des implications majeures sur la nature de la réalité et sur l’humanité.

De nombreuses histoires du genre sci-fi sont des histoires de cupidité, de corruption ou de soif de pouvoir. Et elles décrivent le chaos.

La science-fiction est un genre qui ne s’affranchit pas du conte. Qu’elle débride le progrès dans la plus grande des confusions morales (Frankenstein, Le meilleur des mondes) ou qu’elle décrive un devenir terrible pour les sociétés telles que nous les connaissons aujourd’hui (Hunger Games, The Giver), le genre sci-fi se veut moral.

Ce sont des histoires qui pénètrent profondément dans les éventuelles catastrophes qui nous attendent si nous choisissons de suivre une certaine voie sur le plan scientifique ou politique. En cela, ce genre est essentiellement moral.

Une sombre vision du future

L’histoire de Bienvenue à Gattaca illustre parfaitement ce que pourrait être la vie dans un monde où le génie génétique nous permet d’avoir des enfants sur catalogue dont les traits ont tous été soigneusement sélectionnés à l’avance pour une productivité, une esthétique, une efficacité maximales.

Ce type de pouvoir scientifique, non contrôlé par une introspection philosophique et éthique plus approfondie, crée dans Bienvenue à Gattaca un monde qui discrimine sans conteste toute personne née par fécondation naturelle (et donc nettement désavantagée par rapport aux êtres humains conçus artificiellement).

Il est clair aussi que le concept central de l’intrigue de Jurassic Park provient de la préoccupation de l’auteur Michael Crichton concernant les développements scientifiques rapides que l’humanité pourrait ne pas être prête à gérer de manière éthique.

C’est comme si le genre de la science-fiction avait cette particularité de nous mettre face à face avec nos responsabilités, donc à notre passé, et de nous dire voilà ce qui vous attend.
En cela, ce genre est proche du conte parce qu’il joue sur un sentiment bien humain : la culpabilité.

Parce qu’on essaie de faire sens du passé, on se crée une vision terrible du futur.

S’il est facile de voir le côté tragique et sombre des récits de la science-fiction, il est important de se rappeler qu’il existe de nombreux récits pleins d’espoir.

genreL’un des exemples les plus récents et les plus élégants d’un conte de science-fiction vraiment plein d’espoir, bien que sombrement drôle, est probablement The Martian d’Andy Weir.
Le roman d’Andy Weir est plus qu’un thriller de science-fiction sur un astronaute solitaire coincé sur Mars et essayant désespérément de trouver un moyen de rentrer chez lui.

Un espoir commun

C’est une histoire profondément humaine qui incarne l’acte même de la découverte et du progrès scientifique. En fin de compte, elle est porteuse d’espoir quant à la capacité de la science et de l’humanité à travailler ensemble pour un objectif commun.

En quoi le genre de la science-fiction s’il est porteur d’espoir est-il philosophique ? Pour Mikel J. Wisler, la science-fiction incarne des visions du monde qui voient l’humanité et le progrès scientifique sous un certain jour.
Elle est souvent encore aux prises avec les questions éthiques et morales dans lesquelles plongent les récits plus prudents, mais sa vision plus optimiste des choses conduit à une conclusion plus optimiste.

SCÈNE : IN MEDIA RES

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