L’HORREUR EST UN ART TRANSGRESSIF

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L’horreur cherche à montrer l’aspect le plus sombre de la nature humaine dans toute sa laideur. L’horreur explore des thèmes qui sont inacceptables chez les autres genres.
L’horreur peut être considérée comme un sous-genre du fantastique mais elle ne respecte pas tout à fait les mêmes règles. Pour le moment, considérons que l’horreur explore les tréfonds les plus noirs de la vie et procure au lecteur ou à la lectrice tout comme à l’auteur ou à l’autrice une véritable expérience cathartique. Elle agit effectivement comme une purgation de nos passions, c’est-à-dire avant que celles-ci ne nous fassent imploser.

Voyons maintenant quelques concepts que nous devons comprendre à propos de l’horreur.
La notion la plus importante lorsqu’il s’agit d’écrire sur l’horreur (d’en tirer un scénario en ce qui nous concerne) est que nous allons traiter avec une émotion honteuse : la peur.
Donc, si vous envisagez d’effrayer votre lecteur/spectateur, vous devez savoir ce qui crée la peur.

L’auteur qui se lance dans le genre horrifique a un avantage certain : on paie pour avoir peur (au cinéma, dans les parcs d’attraction à thème ou encore en visitant des maisons hantées). Vous pourriez écrire les scènes les plus horribles et les plus terrifiantes qui soient et le public paierait pour voir vos scènes prendre vie sur un écran.

La plupart d’entre nous aiment être effrayés ; l’horreur procure un exutoire à un quotidien trop banal. Nous sommes à la recherche du frisson que ce soit sur un roller coaster, au cinéma ou à la télévision. En tant qu’auteur ou autrice, vous devez procurer ce frisson.
A noter que selon les individus, le frisson éprouvé peut l’être aussi avec un autre genre comme la Love Story, par exemple (juste pour remettre un peu les choses à leur place).

La peur

D’un point de vue physiologique, la peur est une réaction naturelle à une menace (réelle ou imaginaire). Elle excite en nous un vieux mécanisme : fuir ou combattre. Cette réaction provoque une poussée d’adrénaline ; notre cœur se met à battre plus vite ; nos pupilles se dilatent et tous nos sens sont réhaussés.
C’est une réaction naturelle à ce qui nous effraie. Notre instinct de survie doit beaucoup à la peur parce que cette émotion nous permet de rester en vie lors de situations horribles ou atroces.

Cependant, cette réaction est la manifestation de ce qu’il se passe en notre for intérieur. Le siège de la peur se situe en effet dans notre esprit et c’est là que les auteurs de scénarios d’horreur doivent concentrer leurs efforts.
La peur est donc une émotion ou au moins elle a une accointance très intime avec elle. L’horreur ressentie par un individu ordinaire peut l’amener à faire des choses irrationnelles et surtout irraisonnées ce qui nous ouvre, à nous auteurs et autrices, de belles perspectives d’actions.

Passons en revue quelques causes communes de peurs pour avoir une idée de comment nous pouvons les appliquer dans un scénario.

La peur de l’inconnu

Peur fondamentale s’il en est, ne rien savoir à propos de quelque chose peut être un puissant inducteur de peur. Considérez comme cette simple réplique Je ne sais pas peut donner froid dans le dos face à une situation inconnue (et par nature déstabilisante).
Pour un auteur, il suffit que son lecteur n’en sache pas plus que le protagoniste (il est certain que l’ironie dramatique fonctionne assez mal avec l’horreur). En effet, il faut que le lecteur n’en sache pas plus ou bien juste un peu plus que le héros ou l’héroïne pour que l’effet fonctionne.

Cette peur de l’inconnu se matérialise aussi dans notre quotidien. Il y a encore peu où le virus du SIDA terrifiait le monde. Alors que les recherches à son propos n’étaient encore que balbutiantes, les réactions envers ceux qui n’étaient même que suspectés furent extrèmement violentes parce que le monde était face un serial killer inconnu hautement fatal.
C’est un exemple malheureusement réel qui peut expliquer pourquoi les histoires de pandémie ont un tel  succès (la peste noire qui frappa les populations européennes entre 1347 et 1352 est encore un exemple historique inscrit dans notre mémoire collective). Comment se défendre contre un ennemi invisible ?

Face à une menace inconnue, un auteur peut jouer sur l’étrangeté des situations jusqu’à ce qu’une explication leur soit donnée. Placer ses personnages dans des situations qu’ils ne comprennent pas est un moyen simple et efficace de communiquer la même peur dans l’esprit du lecteur ou de la lectrice (par le biais de l’identification : on croit éprouver ce que le personne ressent peu ou prou). Cette menace annoncée est ce qui attire et retient l’attention du lecteur.

Vous noterez aussi que la menace que laisse planer le progrès sur la destinée du monde n’interpelle pas la peur. Une menace écologique relève davantage de la morale et s’interprète plutôt dans le contexte de l’anticipation. C’est ainsi que Contagion écrit par Scott Z. Burns se situe davantage sur le terrain de l’éthique que de la peur (même si son sujet est davantage la pandémie que l’écologie et se base sur la grippe espagnole de 1918).

La différence aussi est une source irraisonnée de peur. Gardez à l’esprit que la première réaction est la peur (plus ou moins intense) face à ce que l’on ne connait pas, dans lequel on ne peut ancrer des points de repère familiers et donc naturellement soumis à la vindicte populaire ou à la paranoIa.
Pour soulager sa peur, il est aussi facile de pointer vers celui ou celle qui sont différents (race, culture, religion) : tout est bon pour désigner l’autre des frayeurs irraisonnées qui nous assaillent. American Horror Story : Freak Show en est un passionnant exemple.

Les phobies

Les phobies sont communes parmi les peurs irrationnelles. L’agoraphobie ou l’acrophobie sont des exemples répandus. Beaucoup d’auteurs ont passé au peigne fin les phobies de toutes natures et en ont tiré des histoires puissantes et il n’y a aucune raison que l’inspiration s’assèche.

Ce qui est intéressant avec les phobies, c’est qu’elles rendent aisées l’identification du lecteur avec le personnage. La phobie est connue et reconnue et permet d’ajouter une humanité au personnage plus facilement partagée avec le lecteur.

Un des avantages des phobies (pour l’auteur) est que celles-ci concernent un domaine généralement bien documenté et que cela facilite grandement les recherches préalables à l’écriture du scénario.

L’arc dramatique d’un personnage (le genre n’influe nullement sur la présence indispensable de cet élément dramatique) peut se focaliser sur une phobie et la courbe de cet arc constituerait alors pour le héros à surmonter cette peur afin de compléter son arc.
Comme bien souvent, résoudre d’abord son problème personnel permet ensuite au héros ou à l’héroïne de réussir l’objectif global de l’histoire (encore appelé Story’s Goal).

Notre part d’ombre

Mis au jour par Carl Gustav Jung, la part d’ombre en chacun de nous est ce que notre psyché recèle de plus sombre. Cette ombre est censée nourrir nos pensées les plus malveillantes, les fait remonter à la surface et elles se manifestent pour finir dans nos actions.

L’idée que l’homme lui-même est son pire ennemi et que se cache un monstre sous les apparences vient du concept de l’ombre. A propos de monstre, il est parfois si difficile d’admettre qu’on en couve un en nous que l’on est prompt à désigner celui de l’autre.

De nombreux auteurs ont ainsi créé des personnages qui incarnent cette notion de mal et de méchanceté tapie sous le vernis d’un sourire charismatique. Le monstre se manifeste au grand jour. La haine que l’on engrange parfois pendant de nombreuses années peut soudain éclater dans les exactions les plus horribles qui soient. Les auteurs peuvent puiser sans fin dans cette manne nourricière de leurs intrigues.
Et la haine n’est pas le seul sentiment qui puisse aboutir à de telles extrémités. Un être refoulé, malmené ou en grand manque d’amour peut mener à la création de magnifiques personnages aux atours de monstruosités assumées.

Acceptez ces choses sombres et laides qui peuvent ramper à la surface de votre conscience si vous vous ouvrez à elles. C’est souvent comme cela que vous trouverez de bonnes idées pour une histoire d’horreur. Jung lui-même a dit que ce n’était pas une mauvaise chose d’avoir une ombre en nous mais ne pas reconnaître son existence, par contre, peut conduire à de graves déséquilibres.

Donc, si vous parvenez à vous analyser suffisamment pour déterminer ces pensées mauvaises qui vous habitent, réalisez qu’elles sont simplement une autre part de vous et en tant qu’auteur ou autrice, vous pouvez en tirer de bonnes histoires d’horreur.

La mort

Effectivement, la mort fait peur. Malgré les efforts déployés par les religions, les mythes, les légendes et les mythologies, la mort reste une magnifique inconnue. Et en tant que telle, on peut la considérer comme une extension de notre peur de l’inconnu car malgré toutes les assurances que l’on puisse nous donner, nous ne savons toujours rien de ce qu’il se passe après que notre corps se soit vidé de son énergie vitale.

De plus et ce qui ajoute probablement à la peur ou à l’horreur que l’on puisse ressentir face à la mort, nous ignorons l’heure de celle-ci. Nous avons seulement la certitude que l’on y échappera pas. Et les auteurs peuvent jouer sur cette certitude sinon dans l’horreur, au moins dans le fantatisque. Il suffit efffectivement d’ébranler cette certitude pour rendre fascinante une histoire.

En plaçant vos personnages dans des situations où leurs vies sont en danger, vous jouez avec le sentiment universel de notre propre mortalité. Il y a nécessairement un écho chez le lecteur et peut explliquer en partie du moins sa fascination devant des scènes même les plus gores.

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