RÉVÉLER LES MYSTÈRES

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Dans l’univers de la scénarisation, la tâche de tisser un récit intéressant et des arcs dramatiques pour les personnages se trouve souvent liée, de façon inattendue, à des réflexions philosophiques. L’affirmation de Platon, disant que l’initiation de l’homme aux mystères parfaits est parfaite, fournit une toile de fond où les scénaristes peuvent richement puisés s’ils sont désireux de créer des œuvres qui résonnent avec une vérité profonde auprès de leur lecteur/spectateur.

Il est véritablement bouleversant de voir comment ces pensées millénaires illuminent le chemin de transformation des personnages, se manifestant dans le cinéma d’aujourd’hui avec une force qui traverse le temps et l’espace, touchant profondément nos cœurs et nos esprits.

L‘initiation de l’homme aux mystères parfaits est parfaite

Dans le domaine de la philosophie, l’initiation est couramment perçue comme un cheminement vers une compréhension approfondie ou un éveil spirituel. Les textes classiques foisonnent de métaphores et d’allégories qui mettent en scène cette transition vers une appréhension plus claire et raffinée de la vérité. L’un des exemples les plus significatifs de ces récits symboliques détaille un processus éducatif ou une initiation philosophique, orchestrant le passage de l’âme hors de l’ombre, c’est-à-dire une métaphore de l’ignorance, à la lumière éclatante, qui symbolise l’accès à une connaissance véritable.

L’emploi des allégories ne se réduit pas à une simple forme d’expression artistique ; il s’agit d’un instrument conceptuel vital, une clé qui nous permet de déchiffrer les méandres complexes de l’acquisition du savoir et de la sagesse. À travers le prisme de cette approche, les mystères parfaits de Platon se révèlent comme une révélation des Formes parfaites et immuables, et surtout de la Forme du Bien, qui préside au plus haut échelon de la hiérarchie des idées platoniciennes.
Pour Platon, comprendre ces vérités va bien au-delà de simplement empiler des faits théoriques ; c’est une transformation profonde, une sorte de métamorphose de l’esprit qui change complètement notre façon de voir le monde et d’interagir avec lui. C’est comme si on passait d’un vieux film en noir et blanc à un grand spectacle en couleur : tout devient plus vif, plus réel, et soudainement, les choses ont plus de sens et d’épaisseur.

Cette transformation va bien au-delà d’une simple évolution ; elle est essentielle, car elle sculpte notre intellect et redéfinit notre être le plus profond, changeant du tout au tout notre manière de vivre et d’interagir avec le monde. Ainsi, l’initiation aux mystères parfaits devient une ascension vers des vérités ultimes, une transition du monde concret, avec toutes ses imperfections et sa nature éphémère, vers la compréhension d’un monde idéal, constant et éternel.

Cette initiation est dite parfaite parce qu’elle culmine dans la réalisation de la philosophie platonicienne : une union parfaite de l’âme avec le Bien suprême, établissant une connexion indéfectible avec la vérité authentique. Plus qu’une simple quête de savoir, c’est une recherche de sens profond, une tentative de créer une harmonie entre notre existence intérieure et les vérités éternelles, résonnant à travers les âges comme un doux murmure qui nous guide.
Au cœur de la philosophie de Platon, l’initiation aux mystères est moins une formalité ennuyeuse qu’une série de révélations qui vous mettent la tête à l’envers, transformant tout ce que vous pensiez savoir en une grande lumière aveuglante d’illumination. Dans l’univers du scénario, c’est un peu comme réécrire le scénario de la vie de vos personnages. Peut-être commencent-ils dans les ombres, un peu perdus, un peu confus.

Considérez l’allégorie de la caverne, une pièce maîtresse de la pensée philosophique, où nos héros et héroïnes se libèrent des chaînes de l’ignorance. Dans leur fuite, ils rencontrent des vérités brutales, ébranlant profondément leurs perceptions antérieures, et brisant les illusions avec la force d’un réveil inévitable.
Cette évasion n’est pas seulement une fuite, mais une marche vers une compréhension plus profonde et authentique de la réalité, dépeignant avec acuité le douloureux mais nécessaire voyage de l’ignorance vers la lumière.

En concoctant votre histoire, imaginez votre personnage comme quelqu’un qui va de l’obscurité à la lumière, mais avec la grâce d’un vaudeville plutôt qu’une tragédie. Chaque pas, bien que parfois comique, le libère peu à peu des illusions, comme s’il jetait des vêtements trop serrés en pleine canicule. Ce périple, c’est ce qui forge sa destinée et tricote l’intrigue de votre film, transformant chaque obstacle en une scène de révélation édifiante, chaque éclair de vérité ajoutant un peu de sel à sa vie.

Intégrer les Idées de Platon dans le Développement des Personnages et le Scénario

Intégrer cette philosophie dans l’écriture d’un scénario, c’est comme donner à chaque personnage un billet pour une aventure extraordinaire vers les mystères parfaits. Cette méthode encourage les scénaristes à construire des parcours pour leurs personnages où ils partent de petites compréhensions pour arriver à de grandes illuminations, un peu comme Platon l’aurait imaginé. Imaginez cela comme une série d’ampoules qui s’allument au-dessus de leurs têtes, chacune illuminant un peu plus leur compréhension du monde.

Ce n’est pas juste une affaire de rendre les personnages plus complexes ; c’est enrichir l’histoire de thèmes profonds. Chaque défi ou chaque conflit est une chance de balayer un peu plus l’obscurité de l’incompréhension, révélant peu à peu des vérités de plus en plus touchantes et chargées d’émotions.

Le Poison par Billy Wilder (1945)

PlatonDon Birnam est dans le ring, ganté pour un match titanesque contre son addiction à l’alcool, et le film, tel un arbitre attentif, nous guide à travers les rounds tumultueux d’un week-end épuisant qui pousse ses limites au maximum. C’est une exploration poignante et sans détour des conflits intérieurs de Don, dévoilée avec une franchise si percutante qu’elle semble vous frapper en plein visage, révélant les moments crus où il est confronté sans échappatoire à la réalité implacable de son existence. Ce voyage, où Don se mesure à ses propres démons et envisage par moments de se racheter une conduite, capte avec une verve cynique la nature tragi-comique de l’existence humaine, oscillant entre l’ombre du bar et la lumière du jour. C’est une transition de la noirceur au salut.

Les Contes de Canterbury par Pier Paolo Pasolini (1972)

PlatonCette version astucieuse des contes de Geoffrey Chaucer nous catapulte dans un monde où chaque personnage est pris dans un tourbillon de découverte morale et spirituelle, un peu comme si chacun avait son propre épisode de réalité augmentée. Chaque histoire est comme un épisode d’une série où chaque personnage affronte ses désirs, ses folies et ses vertus, non sans une bonne dose d’humour. C’est un peu comme assembler un puzzle où chaque pièce est chargée d’histoires et de leçons de vie, apportant sa propre couleur à l’ensemble.

En se plongeant dans ces aventures, les personnages, et par extension nous-même, errent à travers des situations qui oscillent entre l’ironie et la prise de conscience, le tout enveloppé dans une humanité crue et touchante.
Il y a quelque chose de magique dans la façon dont ces récits se déroulent ; ils savent nous arracher un rire ou une larme, et parfois, réussissent les deux à la fois. Et finalement, n’est-ce pas un peu ce que Platon avait en tête avec ses initiés? Sauf que là, nos héros et héroïnes traversent la comédie et la tragédie pour saisir les vérités de l’existence. Cette alchimie entre le rire et les larmes rend les contes de Chaucer incroyablement admirables et éternels. Ils nous rappellent que les grandes questions sur la moralité, le désir et la vertu transcendent le temps. Nos propres quêtes de sens, tout comme celles de ces héroïnes & héros, continuent de tisser la trame de l’expérience humaine, prouvant que, peu importe l’époque, nous sommes tous des acteurs dans la grande comédie (et tragédie) de la vie.

Norte, la fin de l’histoire par Lav Diaz (2013)

PlatonNorte, la fin de l’histoire de Lav Diaz est une immersion lente et minutieuse dans la vie quotidienne d’une petite ville des Philippines à l’ombre imminente de la loi martiale. Ce film, méticuleux et introspectif, examine en profondeur les vies bouleversées par les turbulences politiques et sociales. Comme un poète contemplatif, il explore les profondeurs de l’âme humaine, capturant avec une sensibilité nuancée la résilience et les fractures des individus confrontés à des forces bien au-delà de leur contrôle.

Chaque histoire se déroule comme un long poème visuel, où chaque cadre est chargé de l’histoire silencieuse des luttes et des rêves interrompus. Chaque parcours est une aventure, parsemée de moments tantôt comiques, tantôt tragiques, où chaque personnage doit jongler avec les bouleversements qui redessinent le paysage de leur vie quotidienne.

C’est une exploration touchante et par moments presque maladroite de ce que cela signifie d’être pris dans la grande machinerie du monde, rappelant un peu les pitreries où chaque chute a son rebondissement, chaque obstacle sa parade inattendue. Les personnages, gravant leurs pas dans un sol instable, se trouvent au cœur d’une véritable initiation, une descente dans les arcanes de leurs luttes personnelles ainsi que dans les abysses des réalités sociétales plus larges et souvent très dures.

Ce voyage est empreint de douleur, de sacrifice et de révélation, évoquant la quête platonicienne d’une vérité supérieure au-delà des apparences trompeuses du monde matériel. Dans cette odyssée, les personnages sont confrontés non seulement à leurs dilemmes internes mais aussi à des forces extérieures oppressives. En affrontant leurs défis, les personnages se reflètent dans les enseignements classiques sur la façon dont l’âme peut s’élever vers la lumière de la vérité et de la justice.
C’est comme s’ils voyaient leur propre lutte à travers un prisme qui réfracte les idées philosophiques et spirituelles à travers un chemin de souffrance sur lequel on trébuche souvent. Norte, la fin de l’histoire devient alors une allégorie moderne de la quête philosophique de l’illumination, un écho des thèmes de Platon sur l’éveil douloureux et la poursuite impérieuse de la sagesse.

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