PENSER LE PERSONNAGE

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Le personnage principal est non seulement nécessaire mais aussi un bon point de départ pour penser son futur récit. Il devrait retenir l’attention du lecteur/spectateur.
C’est-à-dire qu’un super-héros omnipotent ou à l’autre bout de la gamme, un personnage mortellement ordinaire, ne convaincront pas la lectrice et le lecteur. Il leur faut un compromis entre ces deux extrêmes.

Un personnage au-delà de la moyenne

D’emblée, ce personnage possède une compétence, une activité dans laquelle il est doué. Si preuve est faite a priori que le personnage est habile de ses mains, alors il lui sera facile de crocheter la serrure qui le maintient enfermé. Sinon, ce sera un deus ex machina, c’est-à-dire un moyen désespéré de sortir l’auteur et l’autrice de l’impasse dans laquelle ils se sont eux-mêmes engagés.

Ensuite, il faut différencier ce personnage. Par exemple, les deux amants d’une même femme auront des caractères physiques et psychologiques qui les distingueront clairement. En pensant vos personnages, pensez le contraste.
En mettant en place de telles oppositions, vous préparez les situations conflictuelles.

Nous sommes tous ainsi : emplis d’imperfections. Les personnages aussi ne sont pas parfaits. Ils sont vulnérables et c’est un point d’accès pour l’antagonisme. Un personnage peut être égoïste, cela ne nous le rend pas pour autant antipathique car nous pouvons le comprendre.
Ce qui importe est d’expliquer l’origine de cette faille dans sa personnalité. Le passé aide à déterminer ce qu’est un personnage. Une expérience qui perdure dans sa mémoire justifie ses actes au présent. Souvent, face aux défis nouveaux qu’il rencontre, il applique un comportement habituel parce qu’il se souvient qu’il se sentait soulagé autrefois. Mais il échoue car deux situations, même si elles paraissent identiques, ne sont jamais tout à fait les mêmes.

C’est ainsi qu’il prend conscience qu’il doit changer. Un autre point important lors de l’élaboration d’un personnage est le réseau de ses relations. Celles-ci sont différentes : un être aimé, un collègue, un ami..
Il pourrait même ignorer qu’il existe entre lui et d’autres une relation telle qu’une organisation gouvernementale qui s’intéresse à lui par exemple. Bien qu’il ne le sache pas, dans le récit, cette relation existe déjà.

Le personnage, et en particulier le personnage principal, est quelqu’un qui prend des décisions. Il ne subit pas et surtout il ne se fige pas (car dans ce cas, il n’y a plus de récit). Les choix qu’il fait oriente l’intrigue. Un personnage est un être complexe, tout comme dans la vraie vie, il est tout empli de contradictions.
Il oscille entre des valeurs selon les circonstances. Tantôt il est tout à fait crédule et tantôt il fait preuve d’un terrible scepticisme, par exemple. C’est dans son caractère et cette complexité le rend vraisemblable.

Vous pouvez forcer un personnage autrement léthargique à agir en lui donnant des rêves, des secrets, un désir (même si c’est une illusion), une instabilité tout comme nous-mêmes ou le temps qu’il fait changeons d’humeur d’un instant à l’autre, ou bien vous pouvez forcer sur lui une découverte, c’est-à-dire qu’il ouvre enfin les yeux sur une réalité qu’il s’est toujours caché comme le mensonge qu’il se fait à lui-même ou sur ce qu’est vraiment la personne qui lui fait face ; un événement peut le forcer à réagir car cela engendre en lui une réflexion si intense que c’est elle qui le pousse à agir (et non l’événement qui ne fait qu’exciter un processus) ; un retournement de situation (un élément dramatique important pour tout récit) peut aussi contraindre le personnage à agir.

Une interview possible
  • Comment jugez-vous de la proactivité de votre personnage principal ? Lorsqu’un scénario manque d’un protagoniste qui agit vraiment et se contente seulement de réagir seulement aux événements, le récit devient ennuyeux. Attention néanmoins : Est-ce que ses actions ont un but ? Applique t-il une stratégie que le lecteur/spectateur comprend ?
  • Comment jugez-vous du degré de sympathie de votre personnage principal ? Le personnage principal n’a pas besoin d’être sympathique, mais il doit être intéressant. Nous ne sommes pas obligés d’aimer le protagoniste, mais il devrait retenir l’attention suffisamment pour que nous ayons envie de le suivre et de voir ce qu’il fera ou dira par la suite. La chose la plus importante à faire est de rendre le personnage intelligible. Nous n’avons pas besoin de les aimer, mais nous devons les comprendre.
    L’autre façon de rendre les personnages antipathiques est de leur donner des attributs à la fois positifs et négatifs. Chaque personnage est un mélange de bon et de mauvais et il est important que vous connaissiez les défauts de votre héros ou de votre héroïne ainsi que ce qui rend votre méchant de l’histoire plus humain qu’il ne l’est en réalité.
  • Avez-vous suffisamment insisté sur l’aptitude singulière qui caractérise votre personnage ? La compétence rend un personnage plus sympathique car nous admirons ce que d’autres sont capables de faire (peut-être par comparaison avec nos propres aptitudes). Toutefois la perfection rend difficile les situations conflictuelles. Il est bon d’emmener les personnages hors des domaines dans lesquels ils sont compétents.
  • Quel est son trait de personnalité le plus marquant ? Car il s’agit de faire ressortir la faille dans sa personnalité. Laissons de côté le dualisme qui intuitivement nous fait juger si une chose est moralement bonne ou mauvaise. Le manque, l’absence ou la privation s’expliquent non par comparaison mais parce qu’il existe une autre qualité qui déborde du personnage. Chaque personnage a des caractéristiques que vous lui avez attribuées – à moins que vous n’ayez vraiment aucune idée de qui est votre personnage. Mais la question est de savoir pourquoi ils ont ces caractéristiques.
    Vous pensez que votre personnage est courageux mais sans intelligence ? Pourquoi ? Demandez-vous pourquoi le passé de votre personnage le pousse à agir si souvent avec bravoure ; même s’il ne comprend pas grand-chose à la situation actuelle dans laquelle il se trouve.
  • Quelle est la nature du problème qui préoccupe votre héroïne ou votre héros ? C’est en examinant le problème qu’on devine le but. Ce qui motive un personnage à agir ou à réagir d’une manière singulière parmi tout ce qu’il lui était possible de faire est d’ordre pratique : le problème est thématique donc abstrait, mais ce que vise un personnage s’inscrit dans l’action.
    C’est en comprenant l’objectif (d’où l’importance de le matérialiser avant le passage dans l’acte Deux, c’est-à-dire avant l’intrigue) que le lecteur/spectateur se pose la question dramatique de savoir si le personnage peut l’atteindre ou non. L’objectif rive le lecteur/spectateur sur le personnage même si ce but qu’il cherche à atteindre n’est qu’un prétexte à l’intrigue.
  • Qu’est-ce qui motive votre héroïne ou votre héros à agir ? Dit autrement, quel est l’enjeu pour elle ou pour lui ? L’émotion qui suinte d’un récit vient principalement du conflit auquel est confronté le personnage, des obstacles qu’il doit surmonter dans la poursuite de ses désirs, des blessures du passé et de ses craintes pour l’avenir. Mais une autre forme de conflit liée à tous ces éléments est le risque que votre héroïne ou votre héros doivent prendre au cours de leur aventure.
    Que risquent-ils de perdre s’ils échouent ? Qu’ont-ils mis en jeu pour réussir ? L’enjeu est tout aussi important que les situations conflictuelles. Dans les récits les plus puissants, les besoins des héros & des héroïnes représentent leur appel, leur devoir et leur destinée. Ces héroïnes & héros s’efforcent de protéger les idéaux qui les animent ou d’atteindre enfin un sentiment d’importance ou d’appartenance selon ce que l’autrice et l’auteur ont à dire. L’échec signifie un inachèvement, que la vie n’a pas de sens ou qu’elle est sans espoir.
  • La relation entre les situations conflictuelles et le thème est-elle pertinente ? Le personnage a une intention. Parmi tout ce qui l’entoure, il fixe son attention sur quelque chose de précis. Cette intention n’est pas le fruit d’un hasard (peut-être que dans la vraie vie mais en fiction, elle possède une raison). L’intention est ce que l’autrice et l’auteur cherchent à dire et pour appuyez leur démonstration, ils ajoutent des obstacles comme autant d’épiphénomènes qui n’auraient pas lieu d’exister s’il n’y avait d’abord une intention.
    Pour le dire simplement, quelqu’un veut quelque chose et il y a quelque chose ou quelqu’un qui s’en offusque et le font savoir. C’est l’essence du drame.
  • Une énergie avec une intensité donne naissance à une force. Lorsque cette force s’accompagne de mouvement, elle crée une dynamique. Celle-ci est la dynamique d’un processus qui consiste en une évolution du personnage. D’un état de conscience initial, il devient autre.
    Comment décrivez-vous cette énergie primordiale ? L’énergie nécessaire au personnage répond à la question : Qu’est-ce qui le pousse à vouloir être victorieux ? Alors que la réussite est toujours concrète, l’énergie qui l’inaugure est généralement intangible. Cette énergie que l’on pose par principe et qu’on n’explique pas (à cause que ce mystère ne justifie aucunement le récit) constitue le moteur émotionnel du personnage. Les émotions et les passions sont les aliments du cœur et celui-ci nous convainc de changer même si cela paraît déraisonnable.
  • Que cherchez-vous à dire avec votre personnage ? Vous vous adressez à une lectrice et un lecteur. Qu’est-ce que l’existence de cet être de fiction peut leur apporter ? Dans le mythe du héros, celui-ci revient vers sa communauté pour partager le fruit de ses expériences, ce qu’il a appris au cours de son voyage.
    Nous sommes tous des voyageurs et souvent nous nous sentons étrangers dans le pays même où nous résidons, c’est-à-dire à nous-mêmes. Le parcours héroïque est une exploration de soi et ce que nous y découvrons nous fait grandir. Un personnage de fiction est cet être qui nous montre le chemin et c’est ce qui justifie son existence dans un récit.

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