QUELQUES NOTIONS D’ÉCRITURE – 1

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Pouvons-nous commencer à écrire au kilomètre ou bien le scénario doit-il avoir déjà une structure en place avant de commencer ?
L’argument principal est que l’écriture d’un scénario est dominée par des préoccupations structurelles. Une attention particulière est portée à l’élaboration de chaque scène pour faire avancer le récit et ne pas prendre de tangente.

Une liste des principales actions du récit peut être élaborée. Cette feuille de route compte de 3 à 20 pages, selon la quantité de détails, et est généralement rédigée avant d’écrire les scènes, mais peut aussi être utilisée pour planifier une réécriture (beat sheet dans un autre langage).

Les avantages de créer une structure claire du récit avant de commencer à écrire les scènes sont nombreux. Si vous considérez devoir vous débarrasser de la seconde moitié de l’acte deux de l’intrigue par exemple, un tel changement dans le plan peut équivaloir à jeter trois paragraphes, mais si vous devez le faire dans un scénario, vous perdez trente pages ou plus de travail.
Les auteurs et autrices qui se lancent dans la rédaction de 40 à 50 pages sans se soucier de la structure doivent avoir suffisamment de discipline pour relire ces pages d’un œil critique et n’en extraire que les plus intéressantes, même si elles ne sont qu’une poignée, qui fonctionnent réellement dans le projet actuel.

Comment faire ?

D’abord choisissez un mot et une phrase. Ce mot est l’essence de votre récit. Lorsque vous avez trouvé le mot, écrivez une phrase simple, déclarative, qui utilise ce mot et qui décrit de manière concise l’action du récit. Par exemple, le mot serait foyer : ET veut retourner chez luiAmour : Rick veut reconquérir son amour pour son pays, pour Ilsa et pour lui-même (Casablanca). Sacrifice : Un homme se sacrifie pour en sauver un autre.

Deux questions sont maintenant nécessaires. Ces deux questions dominent le récit tout entier. Dans Munich par exemple, les deux questions qui orientent le récit seraient :

  • Parviendra t-il à tuer tous les terroristes de la liste ?
  • Et s’il y parvient, est-ce que cela le satisfera ? Ou satisfera son pays ou le monde ?

Ces deux questions sont de nature tout à fait différente. La première concerne le monde du récit, c’est-à-dire les objectifs et l’action principale, le concret. La réponse à cette question sera donnée lors du dénouement.
La seconde question est davantage conceptuelle. Elle interroge une idée. La première est extérieure et la seconde, intérieure.

La première question qui concerne le monde du récit détermine si l’objectif du personnage principal sera accompli ou non. La seconde question aborde la signification du récit. Alors qu’un objectif peut être commun à différents récits, ce qui distingue un récit en particulier est d’ordre thématique. Ainsi, si le but de l’histoire est de savoir si cette fille et ce garçon convoleront en justes noces, la question thématique portera sur le concept d’amitié entre une fille et un garçon.

Ces deux questions sont nécessaires parce qu’elles dessinent les contours de votre récit. Sans nuire à votre créativité, elles vous fixent un cadre dans lequel celle-ci s’exprimera.

Maintenant, vous pourriez déjà connaître votre monde et l’action qui s’y déploie. Demandez-vous alors pourquoi cette action vous importe autant. Si vous avez une idée qui a une signification profonde et qui regorge de thèmes et de symboles, assurez-vous que vous pouvez étayer ces idées avec une question forte et spécifique.
Et que vous pouvez illustrer d’une manière ou d’une autre cette idée par une action.

Votre monde contiendra toujours l’objectif principal de l’histoire. En le clarifiant, vous clarifierez votre récit. D’autant plus que cet objectif se dit facilement car il est déterminé et tangible.

Le plan puis le synopsis

Obligez-vous à écrire un synopsis d’au moins trois pages. Cela sera suffisant pour vous donner un aperçu d’ensemble de votre récit. N’entrez pas dans le détail des scènes et limitez les éventuels dialogues.
Si le synopsis vous semble difficile à écrire, procédez avec des espèces de post-it qui contiendront chacun une scène ou une action et arrangez-les de différentes manières afin de tenter de les organiser de manière cohérente, c’est-à-dire de façon à ce qu’ils soient un récit cohérent, logique. Néanmoins, cette logique apparente n’est pas figée car lors du processus d’écriture du scénario, il est probable que de nouvelles idées surgiront. Et elles refaçonneront le plan afin d’adapter celui-ci aux nouvelles idées.

L’écriture d’un scénario est une lutte constante entre laisser libre cours à sa créativité et en tirer le meilleur parti et discipliner votre récit au sein d’une structure contrôlée. Ne gaspillez pas une grande quantité d’énergie créatrice pour peaufiner et perfectionner une ébauche ou un traitement qui évoluera probablement dès que vous commencerez à écrire.

Penser en scènes intervient sur la structure. Une scène peut amener à reconsidérer la structure de son récit et à retravailler le plan car les conséquences de cette scène singulière orientent le récit dans une toute autre direction et c’est un nouveau chemin qui s’ouvre devant vous.

La lectrice ou le lecteur de votre projet devrait comprendre immédiatement dès la première page le genre de votre récit.
Et le ton de celui-ci, la manière dont vous allez le conter (un ton humoristique, tragique, polémique..), sera aussitôt identifié. Faites-nous entrer dans l’univers de l’histoire. Votre voix et votre style doivent être évidents dès les premiers mots de la première page.

A titre d’expérience, écrivez la dernière scène du scénario. Quelque chose qui résume l’ensemble du récit ou dit autrement, le dénouement. Ne vous y accrochez pas, car il est probable que cela change, mais voyez si une image ou un motif puissant ressort de cet exercice et demandez-vous s’il n’y aurait pas une manière circulaire d’incorporer ou d’intégrer cette idée ou cette image finale à l’image d’ouverture.

Le personnage principal

Il est convenu que le personnage principal et le contexte dans lequel il évolue sont présentés durant les premières pages du scénario. Ce contexte, le monde extérieur, possède son espace, son temps et ses lois. Par exemple, dans Le Secret de Brokeback Mountain, le monde extérieur est celui des années 1960 dans lesquelles l’intolérance et un esprit conservateur n’autorisent pas les amours masculines.
Situé dans un autre temps et un autre lieu, ce monde qui s’oppose directement aux deux personnages centraux du récit, serait incongru.

L’étonnement et le changement sont deux notions qui participent de l’essence d’un récit. L’étonnement provient de l’incident déclencheur. Quelque chose de nouveau et de significatif intervient dans la vie du héros ou de l’héroïne et ce moment initie le mouvement vers l’intrigue.
Posez-vous un instant et interrogez votre personnage principal. Demandez-lui (ce sera un monologue durant 3 à 10 pages) de se dire lui-même : les événements marquants, ses références personnelles.. nombre de détails qui vous permettront d’affiner l’incident déclencheur et pourquoi cet événement est possible maintenant et non à un autre moment.

D’autres notions seront abordées dans le prochain article. En attendant, si vous nous appréciez, Merci de faire un don. Votre aide nous permet de persévérer dans nos recherches.

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