L’ARC DRAMATIQUE

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L’arc dramatique en tant que forme narrative se concentre sur la révélation des motivations des personnages à travers les choix qu’ils font, plutôt que par le biais de l’intrigue et les marqueurs structurels (actes, scènes..).

Comme l’arc dramatique trouve sa propre forme et ses propres conventions, il peut aussi être considéré comme un autre ensemble d’impératifs à respecter. C’est sans doute le cas, mais l’arc dramatique peut être distinct en ce qu’il se focalise sur le personnage et le privilégie par rapport à la structure et à l’intrigue.

Un arc dramatique implique ou suggère un mouvement, un élan vers le changement ou le développement d’un personnage au cours d’un récit. Cela signifie que le protagoniste, l’antagoniste et quelques autres personnages qui ont une importance dans l’intrigue évolueront ou changeront au cours du récit. Parfois, l’antagoniste garde néanmoins ses positions sur sa place dans le monde, ce qui le distingue du protagoniste en cela que celui-ci porte un regard nouveau sur le monde.

Arc dramatique et créativité

La fonction de l’arc dramatique est de révéler les moteurs psychologiques et les motivations d’un personnage. Par conséquent, cet arc peut être spécifique aux personnages individuels et à leurs histoires individuelles, plutôt que de s’aligner sur des formes narratives globales singulières telles que le mono-mythe de Joseph Campbell (The hero’s journey de 1949), qui font passer l’intrigue avant le personnage.

L’arc dramatique privilégie donc le développement d’un personnage et ses motivations, ainsi l’enchaînement des actions résulte de causes psychologiques. Et c’est à cette lecture particulière que nous convieront autrices et auteurs.

Cette lecture invite aussi à une pensée universelle c’est-à-dire qu’elle est intemporelle et transculturelle, fondamentale pour toute société, civilisée ou primitive, remontant à travers des millénaires de contes oraux.

Pour Aristote, l’intrigue est la source et l’âme de la tragédie, le personnage n’en serait qu’un accessoire bien que Aristote ne cherche nullement à diminuer l’importance que représente un personnage dans une intrigue.

Nombre de récits passionnants s’articulent néanmoins sur l’évolution d’un personnage du fait de ces expériences dont les moindres d’entre elles sont pourtant significatives.

L’hamartia, c’est-à-dire ce qui provoque la chute du héros de tragédie, considérée comme une erreur de jugement, révèle l’importance du choix dans l’explication de ce qu’est un personnage. L’hamartia est le véritable mot que l’on traduit maintenant par faille du personnage, ce par quoi la force antagoniste peut l’atteindre.
La notion de catharsis, vue comme une purgation des émotions du lecteur/spectateur qui assiste à cette hamartia, est aussi un effet de l’évolution tragique d’un personnage.

Nul doute qu’une intrigue bénéficie de tels concepts. Aristote ajoute que les dispositifs les plus importants par lesquels la tragédie vibre d’émotions sont des parties de l’intrigue elle-même, c’est-à-dire des renversements de situation et des reconnaissances (dont le terme consacré est anagnorisis).
Ce qu’il faut retenir est que les renversements de situation et autres révélations et reconnaissances sont un moyen pour la lectrice et le lecteur de s’engager émotionnellement avec le récit. Un personnage possède le potentiel de prendre pleinement conscience de ses motivations et sera incité à renverser ses motivations actuelles et a orienté sa marche vers une vérité plus adéquate.

Les motivations décident des choix que fait le personnage et les choix deviennent alors thématiques. C’est par les décisions d’un personnage qu’autrices et auteurs traitent des thèmes, c’est-à-dire des choses dont ils veulent parler. L’arc dramatique décrit les motivations par les choix faits lors de situations particulières.

Motivations et décisions prises sont alors deux critères dans la construction d’un personnage et de son évolution au cours du récit cependant que ses expériences influencent ses motivations et de là, les choix qu’il fait ce qui illumine davantage le personnage dans l’esprit du lecteur/spectateur.

Le mono-mythe

Au cours de la dernière décennie, les études sur l’écriture (d’un scénario en particulier), fondées sur la pratique contemporaine, se sont penchées sur le modèle du mono-mythe proposé par Joseph Campbell dans le but de remédier au manque de complexité émotionnelle qu’il confère aux personnages.

L’idée consiste à établir et à intégrer la notion d’un arc illustrant un changement centré sur le personnage à l’intérieur des contraintes du modèle plus large du mono-mythe.

Considérons le genre romantique et son représentant le plus évident : la Love Story. Il est indéniable que ce genre fonctionne essentiellement sur l’arc dramatique des personnages. Quelques exemples suffisent pour en faire la démonstration : Le hussard sur le toit, Une liaison pornographique, Ma vie en rose ou encore Two days in Paris..

La question dramatique que soulève de tels récits est elle aussi évidente : les deux amants au cœur de l’intrigue passeront-ils ou non leurs vies ensemble ?

Le genre romantique peut être considéré comme opérant à un niveau relativement simpliste en termes d’impératifs narratifs structurels et de conventions de genre. Mais cela ne réduit pas la complexité de l’organisation des récits fondés sur les personnages plutôt que seulement l’action. Et cette complexité est due en grande partie par le développement des personnages et leurs motivations.

Le développement d’une relation mature est considéré comme un accomplissement et une progression par rapport à un état plus immature ou incertain. Ce développement est en corrélation étroite avec les idées relatives à l’arc dramatique du personnage, et plus particulièrement avec un arc positif, où l’on voit un personnage se développer et grandir à la recherche d’une relation appropriée et psychologiquement mature.
Cette approche se reflète à la fois dans les idées de Milton Erickson concernant le besoin d’aimer et d’être aimé comme principal moteur et récompense de la maturité psychologique, et les idées de Freud sur la nécessité pour les adultes de s’éloigner des complexes d’Œdipe et d’Electre immatures pour des relations plus matures. Dans cette perspective, l’arc dramatique ne met pas seulement en lumière les motivations spécifiques d’un personnage, mais aussi une couche de profondeur psychologique par le biais des choix qu’il fait pour lui-même à travers des dilemmes.

C’est l’histoire personnelle d’un personnage qui nous est contée par son arc dramatique. Cette histoire pourrait n’avoir qu’un rapport lointain avec l’intrigue. Cet arc bénéficie d’une autonomie par rapport à l’ensemble dans lequel il s’inscrit néanmoins.
La structure du récit permet à l’arc dramatique de s’exprimer, c’est-à-dire de révéler les motivations du personnage car celles-ci prennent place dans la structure comme si la structure du récit était prétexte à l’exploration d’un personnage.

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