LES ÉMOTIONS DES PERSONNAGES

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Lorsque les personnages sont émotionnellement soumis à une pression, il finit toujours par se produire un violent relâchement. Les émotions éprouvées par la présence de la mort par exemple peuvent atteindre un état plus élevé que jamais.

Lorsqu’un personnage connaît un moment de crise profonde (le récit en a structurellement besoin), cet état de détresse rend sa victoire éventuelle beaucoup plus douce. Ce qui est bien, c’est que l’inverse est également vrai nous apprend H.R. D’Costa.

Des émotions contrastées

Le creux émotionnel du héros sera encore plus bouleversant s’il est précédé d’un moment d’émotion positive.
Cela est dû à la puissance du contraste nous dit H.R. D’Costa. Bien que sous-utilisé, c’est l’un des moyens les plus efficaces d’intensifier l’impact émotionnel de la crise personnelle de votre héros. La pratique d’un contraste est d’opposer deux choses dont l’une fait ressortir l’autre. Contraste signifie différence et surtout lorsque cette différence est très perceptible.
Le héros et le méchant de l’histoire par exemple forment un contraste (relativement à leurs fonctions dans l’histoire).

Le contraste apparaît habituellement par paires. Au sein d’une même histoire, vous pouvez avoir de forts contrastes émotionnels, par exemple entre la peur dans une scène et l’amour dans une autre. H.R. D’Costa insiste quant à lui sur la nécessité de faire précéder la crise par un moment plutôt positif.

Car quelque soit la profondeur de la crise (tout n’est pas tragique), vous pouvez intensifier son effet sur le lecteur (c’est lui le destinataire de votre effort) en modifiant les événements qui précèdent immédiatement le passage en enfer du héros (et cet enfer dépend de votre histoire). Dans les faits, il s’agit plutôt d’un purgatoire car ce héros n’y restera pas.

Plus vous accentuez la différence, plus les événements constituant le gouffre auront un effet important sur le lecteur.

Prenez Harry Potter et l’Ordre du Phénix. Quatre-vingt-quinze minutes après le début du film, les jumeaux Weasley, toujours aussi malicieux, lancent un feu d’artifice dans les salles sacrées de Poudlard.

personnagesRéprimés par la directrice par intérim de l’école, Dolores Ombrage, les élèves sont ravis à la vue d’une célébration aussi exubérante.

Cependant, les festivités contrastent fortement avec ce qui suit. Grâce à une connexion psychique avec le méchant de l’histoire, Harry assiste à la torture de son parrain Sirius Black.

Avant que Harry ne puisse sauver Sirius, le jeune sorcier est empêché par Ombrage. Elle le menace d’une malédiction si néfaste qu’elle est interdite.
La torture de Sirius et la menace de Dolores Ombrage sont des événements négatifs en soi, mais leur contraste avec la scène vivifiante du feu d’artifice les rend encore plus intenses.

Reconnaître les émotions

Votre héros n’a pas besoin de participer à une véritable célébration pour que vous puissiez exploiter la puissance du contraste. Il a simplement besoin de ressentir une émotion intense à laquelle le spectateur et le lecteur peuvent s’identifier.

Si votre scénario fait appel à l’ironie dramatique, alors peut-être que seul le lecteur – et non votre héros – éprouvera l’émotion requise.

personnagesTraffic de Stephen Gaghan et Steven Soderbergh en est un exemple frappant. Montel Gordon et son coéquipier, Ray Castro, sont deux agents de la DEA qui protègent un témoin dont le témoignage est essentiel pour mettre un baron local de la drogue derrière les barreaux.

À leur insu (c’est là où se situe l’ironie dramatique), un cartel de la drogue a engagé un tueur à gages, Flores, pour éliminer le témoin. Pour accomplir le travail, Flores place une bombe sur leur véhicule. Comme le lecteur/spectateur est au courant de l’action de Flores, il est en proie à une forte émotion lorsqu’il observe Gordon, Castro et le témoin quitter le palais de justice.

Heureusement, le témoin est fatigué d’être enfermé depuis deux semaines et il supplie les agents de le laisser rentrer à pied à son hôtel. Gordon accède à sa demande car Castro veut lui aussi marcher. Alors que la menace qui pèse sur la vie des agents semble avoir été écartée, le lecteur/spectateur pousse un soupir collectif de soulagement intense.

Mais le soulagement est malheureusement de courte durée. Alors qu’il suit le groupe dans sa traversée du parking du palais de justice, Flores est abattu par un sniper. Castro se précipite vers sa voiture pour appeler une ambulance. Lorsqu’il entre dans le véhicule, celui-ci explose, le tuant instantanément.

Le lecteur/spectateur éprouve certainement un sentiment de malaise face à cette tragédie, mais ce sentiment est d’autant plus fort qu’il contraste avec le bien-être qu’il a ressenti quelques instants auparavant.

Une crise inévitable

L’utilisation du contraste présente un avantage supplémentaire nous dit H.R. D’Costa. Outre le fait qu’il renforce la réaction émotionnelle du lecteur, il aide également à surmonter l’anticipation de cette crise comme évidente conséquence de la perte subie par le personnage principal vers la fin de l’acte Deux.

Le lecteur peut sentir que ce revers est imminent, même s’il n’est pas en mesure de prédire comment il va se produire.

Cependant, lorsque cette crise est présagée par un moment émotionnellement positif, il n’en laisse pas moins d’être surprenant. Et le lecteur aime être surpris.

Considérons La revanche d’une blonde de  Karen McCullah Lutz, Kirsten Smith, d’après une nouvelle d’Amanda Brown (Robert Luketic en 2001).

Elle Woods est une étudiante californienne qui décroche une place convoitée à Harvard Law. Pourtant, tout le monde la traite comme si elle n’avait pas le droit d’y être. Grâce à sa détermination, elle parvient à gagner le respect de ses camarades de classe et de ses professeurs.

Mais à la fin du deuxième acte, Elle découvre que tout cela n’était qu’une illusion.

personnages

Le professeur qui a décidé de la faire participer à l’une de ses affaires réelles l’a choisie en raison de son buste et non de son cerveau. Mais il ne lui révèle pas tout de suite ses véritables intentions.

Tout d’abord, il loue l’intuition, l’initiative et l’intelligence de Elle. Ces compliments trompent l’héroïne et le spectateur, dans un faux sentiment de sécurité.

Ainsi, lorsque le choc tombe enfin, et que ses propos se transforment de compliments en prédateurs, la descente aux enfers de Elle n’a pas seulement un impact émotionnel plus important, elle a aussi le bénéfice supplémentaire de la surprise.

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