SUR LES CONFLITS

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Chaque personnage a un but : celui-ci veut se venger de tel autre, celui-là ne parvient pas à déclarer son amour, cet autre encore tente de faire face à ses propres responsabilités..

Et tout cela sera enrobé de conflits.

Pourquoi le conflit est-il si nécessaire ? Parce qu’il procure de la tension dramatique en rendant les choses plus difficiles à réaliser. Les complications ou difficultés alimentent les conflits. Les conflits alimentent le suspense et celui-ci est ce qui retient lectrices et lecteurs dans le récit.

Révélateur d’émotions

C’est par le conflit que les émotions des personnages transparaissent. Dans une situation conflictuelle, les personnages réagissent émotionnellement ; ce qui révèle ce qui est caché. Si un événement n’affecte pas les pensées, les émotions ou le comportement d’un personnage, cet événement semblera être un artifice que vous avez inséré dans l’histoire juste pour renforcer votre intrigue.

L’émotion se communique bien mieux par le conflit. Un personnage agit parce qu’il cherche à réaliser un objectif qu’il s’est fixé. Nous pouvons apprécier ses efforts mais ce désir, même justifié, ne suscite pas d’émotion particulière.
Par contre, cette fatigue, cet épuisement moral autant que physique qu’il ressent dans sa tentative, nous dit ce qu’il ressent intérieurement. Le conflit révèle les émotions de votre personnage ; lectrices et lecteurs reconnaissent les émotions même s’ils sont à cent lieues du personnage. On ne s’identifie pas à un personnage par les expériences qu’il vit, mais par les émotions qu’il ressent.

Si le conflit n’est pas émotionnel pour le personnage, il ne le sera pas pour le lecteur et pour la lectrice. Si vous voulez que le lecteur/spectateur s’intéresse à un personnage – et c’est cela votre intention -, faites appel aux sentiments de ce personnage.

Lorsqu’un personnage est forcé de faire un choix et d’agir en conséquence, de répondre plus ou moins adéquatement aux obstacles et aux conflits, ce moment est précisément ce qui l’individualise.
Ce qui le rend réel et distinct dans l’esprit du lecteur/spectateur.

Nous découvrons alors qui sont les personnages par la façon dont ils réagissent à cette résistance ; le conflit les met en lumière et les expose. Le personnage, et non l’action, est ce qui intéresse le plus le lecteur/spectateur.

Nous sympathisons avec les personnages en conflit, surtout si le conflit est de leur propre fait et qu’ils font de leur mieux pour en sortir. C’est à travers leurs réactions au conflit que nous apprenons qui sont ces personnes fictives et que nous voyons de quoi elles sont réellement faites.

Lorsque nous les voyons réagir, nous apprenons quelque chose sur eux.

De la signification

Dans le drame, rien d’important ne se produit si ce n’est par le biais d’un conflit. Il y a toujours un problème à résoudre. Pour chaque scène, comprenez ce que veulent vos personnages, quels sont les problèmes auxquels ils sont confrontés, et pourquoi ces problèmes doivent être abordés ici et maintenant.

C’est à travers les luttes que nous voyons l’importance réelle d’un objectif. Sans cette confrontation, l’action dramatique d’une scène peut sembler plate, et toute réussite de cette action peut sembler imméritée ou sans conséquence. L’art dramatique consiste à résoudre les problèmes et les dilemmes d’un personnage. Et les problèmes et les dilemmes surgissent lorsque quelqu’un dit : Tu ne peux pas faire ça ou Tu ne dois pas faire ça.

En bref, le conflit, c’est quelqu’un qui dit non. Un récit peut être envisagé comme une série de conflits liés entre eux par un principe de causalité qui sont finalement résolus par un conflit final et cathartique, appelé habituellement climax. Par exemple, un personnage est témoin d’un meurtre. Pour ne pas être dénoncé, le tueur se mettra alors en quête de supprimer ce témoin gênant. Un événement fortuit est à l’origine d’une chaîne de conflits divers et variés.

Le conflit ne se produit pas parce que les personnages ont des objectifs différents. C’est l’interaction de ces objectifs qui crée des situations conflictuelles. Par exemple, deux ados sont amis depuis l’enfance. Plus ils s’approchent de la frontière qui fera d’eux des adultes, moins ils reconnaissent le sentiment amoureux qui s’est lentement développé entre eux.
Cette relation est illustrée par des chamailleries incessantes ou même par un refoulement lorsque la jeune fille demande au garçon comment il la trouve si elle se coiffe de telle ou telle façon et que lui, malgré qu’il brûle de lui dire qu’il la trouverait encore plus jolie ainsi, est incapable de le lui dire.

Le conflit peut se résumer en une opposition entre le dedans et le dehors. Le dehors est évidemment ce que les autres perçoivent et auquel nos deux personnages ne veulent pas donner satisfaction et, quant au dedans, c’est effectivement le jeu des émotions qui frappe durement la relation qu’ils entretiennent.

L’émotion est alors issue du besoin de résoudre ce frottement entre deux attitudes, deux comportements qui ne sont pas nécessairement agressifs l’un envers l’autre (et dans notre exemple qui sont similaires).

La plupart des scènes sont conflictuelles

Une scène est un élément structurel dynamique avec un modèle interne défini car la plupart des scènes participent à l’avancement de l’histoire.

Chaque personnage possède son propre objectif. Si celui-ci est trop facilement atteint, il n’y a aucun sens sur le plan dramatique à présenter de telles scènes. La détermination à vaincre l’adversité engendre des scènes utiles à la progression de l’intrigue. C’est le manque de conflit qui fait qu’une scène ne se justifie pas dans l’ensemble et le risque est alors d’ennuyer le lecteur/spectateur.

On peut définir le conflit comme la raison qui explique pourquoi un personnage ne peut obtenir ce qu’il veut. Par exemple, un personnage veut se venger d’un autre mais l’autre offre une résistance inattendue.
La vengeance est motivée mais qu’est-ce qui explique la résistance rencontrée ? La réponse se trouve très souvent dans les enjeux. Qu’est-ce que l’autre a à perdre s’il se sacrifie ? On peut généraliser par la problématique de la survie, mais ce serait trop simple. Considérons une jeune fille harcelée : elle est le souffre-douleur de ses camarades de classe. On peut explorer l’état psychique dans lequel elle se trouve : elle s’est persuadée qu’elle ne valait rien et qu’elle méritait cette souffrance.

Et malgré son désir de mourir, elle prendra progressivement conscience de son besoin incoercible de vivre et de prendre sa place dans le monde d’une manière ou d’une autre.
Ce qui laisse la liberté à l’autrice et à l’auteur de ne pas s’appesantir sur la vengeance ou la justice mais plutôt sur le processus d’évolution de ce personnage qui lutte contre l’adversité pour s’affirmer.

Le conflit s’énonce par des verbes d’action : gagner ou perdre, accomplir, éviter, trouver, réussir ou échouer, réaliser. Ces verbes impliquent une motivation à l’origine : pourquoi doit-on gagner ou perdre, accomplir quelque chose ou ne pas y parvenir ? Car rien ne garantit que la motivation mène au succès mais si l’on prend un risque, c’est qu’on est motivé à le faire quel qu’en soient les conséquences.

Aucune action n’est vouée au triomphe. L’incertitude est maintenue jusqu’au moment où l’auteur et l’autrice délivrent leur message.

Le conflit, c’est l’autre

Une scène n’est pas efficace parce qu’elle est joliment peinte : c’est son contenu qui importe. Une scène ne décrit pas seulement l’animosité entre deux personnages ; même l’amour peut être un problème s’il interfère avec un désir. Sommairement, un personnage est à la poursuite d’une chose et un ou plusieurs personnages sont à la poursuite d’une autre. Un seul désir peut être satisfait. Les deux forces s’affrontent (cet affrontement se présente sous les formes les plus diverses : entre douceur et violence) donc. L’une seulement finira par l’emporter.

Cela signifie t-il que l’altérité est source de conflit ? C’est un sujet qui mérite une ample réflexion. Néanmoins, le conflit demeure la force motrice de la fiction quand l’autre, quel qu’il soit, entrave notre désir.

Ainsi défini, le conflit apparaît donc essentiellement extérieur. Il l’est par le désir qui cherche à tirer avantage de quelque chose qui est situé dans le monde et il l’est par l’opposition que ce même monde, presque naturellement, renvoie.
Le désir est justifié par l’importance des obstacles qu’il rencontre. Le conflit est l’obstacle ou l’empêchement auquel votre personnage doit faire face pour obtenir ou atteindre son objectif.

Dans un conflit, il sera utile de comprendre ce que veut un personnage et la nature de la résistance que ce désir singulier rencontrera.

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