CE QUI CARACTÉRISE LE PERSONNAGE

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Vouloir ; Reconnaître son besoin, c’est-à-dire identifier ce qui nous manque ; Vivre incessamment des situations conflictuelles ; Savoir que nous avons des faiblesses : voici donc ce qui caractérise un personnage lorsque celui-ci est appelé à participer à une intrigue dans lequel ce qui le caractérise constitue la trame.

Car en effet, ses choix, les dilemmes qu’il doit résoudre sont les articulations majeures qui permettent à de telles intrigues de fonctionner.

L’importance de la faille

Ce qui attire dans un personnage dès l’abord, c’est ce par quoi il est vulnérable. Il a un problème d’ordre intime, une vérité qu’il confronte au quotidien et qu’il ne peut avouer tant est qu’il en a un peu conscience.

C’est dans son effort à surmonter son problème personnel que nous apprécions un personnage. Et que nous comprenons aussi ce qui le motive. Cette mise en place d’un personnage est d’ailleurs assez passionnante à écrire.

Considérez cette petite communauté d’étudiants piégés dans leur université envahie de zombies. La communauté a sa propre volonté qui est un fait social : survivre à ce qu’est devenu le monde.
Cependant, chacun des membres qui la constitue doit résoudre un problème personnel ; ce problème interfère grandement sur les relations que chacun d’entre eux entretient avec les autres. Ce peut être par exemple ce refus d’accepter que l’amitié est maintenant amour. La survie, ce désir de vivre, sert clairement les intérêts particuliers des personnages en leur permettant de s’épanouir dans cette ouverture aux autres.

C’est alors qu’intervient la notion d’enjeu car sans enjeu, il est plus difficile d’expliquer non pas tant la manière d’être ou d’agir d’un personnage que pourquoi il est ou agit ainsi. Dans l’exemple donné, il existe même un double enjeu : celui de la communauté et ceux, diversifiés, qui préoccupent chacun des membres.

Maintenant une opportunité s’offre au personnage. Disons que notre personnage principal est un garçon. Il aperçoit une jeune fille qui fait du vélo et qui est totalement ignorante de lui.
Le garçon est totalement subjugué par cette silhouette, déjà une présence. Mais le regard qu’il lui porte ne lui est pas rendu. Même si vous décidez en tant qu’auteur et autrice que la silhouette doit s’éloigner sans qu’il y ait eu de contact entre les deux personnages, vous avez offert une opportunité, c’est-à-dire une possibilité pour votre personnage de prendre conscience d’une situation personnelle.

Considérer l’opportunité est plus facile pour donner forme à cette notion abstraite d’incident déclencheur.

Y a t-il une formule ?

Certes, on peut suivre le hero’s journey de Joseph Campbell résumé d’ailleurs par Christopher Vogler ou encore les différentes étapes énoncées par Michael Hauge ou Blake Snyder ou encore Field, Truby, McKee..

Souvent ils énoncent la même chose sous une expression différente. Ce qui importe surtout, c’est de comprendre que les structures proposées par ces théoriciens servent à rendre un texte intelligible par le plus grand nombre.

Concernant l’intrigue, lorsqu’elle est façonnée par le personnage lui-même et pour le personnage par l’autrice & l’auteur, elle viendra de vous et de personne d’autre. On craint qu’une structure ne tue la créativité ; comme tout ce qui vient de l’extérieur de nous, une structure représente une contrainte et si vous ne comprenez pas, ou plutôt si vous n’adaptez pas cette structure à votre goût, vous perdrez l’avantage que néanmoins, elle procure.

Car ce que vous avez à dire, personne ne vous le soufflera.

Une chose qu’il faut d’abord admettre, c’est que tous les personnages agissent parce qu’ils croient que ce qu’ils font est juste, y compris le méchant de l’histoire. Qu’ils soient jugés par le lecteur ou la lectrice ou les autres personnages comme mauvais importe peu tant que vous décrivez comment et pourquoi un personnage est ainsi et non autrement.

Chaque personnage est légitime dans ses actes même si ceux-ci sont répréhensibles. Le lecteur/spectateur est tout à fait apte à comprendre n’importe quel personnage, de sentir ce par quoi il passe, de reconnaître avec plus ou moins d’acuité les sentiments qu’il éprouve car ces sentiments et autres affects font écho à ses propres expériences, excitent en lui des réminiscences.

Alors que dans la vie réelle, la singularité d’une personne nous échappe totalement, même après l’avoir côtoyée quelques années, un personnage de fiction a quelque chose d’universel en lui. Nous sommes d’abord observateurs d’un objet qui gesticule devant nous et soudain, une espèce d’alchimie opère un transfert.
Nous nous emparons de quelques indices apparents et ainsi, même chez les méchants de l’histoire, nous réagissons émotionnellement à ce qu’ils font et disent. Notre esprit fonctionne sous l’empire de la raison et de la passion : nous ne nous amputons ni de l’une, ni de l’autre.

Nous pouvons haïr un personnage ; cependant, au fur et à mesure que l’autrice et l’auteur nous révèlent son passé, les difficultés qu’il a connues au cours de son enfance, les détails qui ont déterminé son point de vue actuel sur le monde, un regard qu’en tant que lectrice & lecteur nous jugeons immoral, nous sommes progressivement amenés à minimiser nos préjugés à son égard et à nous ouvrir, si non à accepter, sa perception du monde.

L’autrice et l’auteur

Dans tous les personnages qu’ils posent sur le papier, l’autrice et l’auteur y mettent quelque chose d’eux-mêmes. Ce n’est habituellement pas la meilleure part car cela serait ennuyeux parce que ce n’est pas dramatique.
En tant qu’auteur et autrice, nous traduisons nos préoccupations à travers nos personnages. C’est une manière de se soulager plutôt que de se soigner. Même lorsque nous interprétons en mots ce que nous observons chez un autre individu, une autre personnalité réelle ou fictive, nous posons alors les sentiments et sensations qu’elle a suscités en nous.

C’est ainsi que nous convoquons chez nos personnages des préoccupations sincères. Nous ne décrivons pas de manière générale qu’un personnage est malheureux. Nous le montrons extérieurement parce qu’il faut que nous le percevions dans son univers mais les situations que nous détaillons font ressentir intérieurement ce qu’il se passe en lui.

Ainsi, ce sont deux sujets : un lecteur/spectateur & un personnage qui établissent une relation. Par celle-ci, nous tentons, en tant qu’autrice et auteur, de communiquer à un lecteur/spectateur quelque chose d’invisible et qui, néanmoins, trouvera son chemin jusqu’à lui.

Un père qui risque sa vie pour sauver son enfant menacé tombera à plat si, au préalable, nous n’avons pas détaillé la relation entre le père et son enfant, qui sera conflictuelle parce que c’est ainsi que les générations s’opposent, et que nous ne prenons pas le temps de décrire les obstacles qui l’empêchent d’atteindre l’enfant à temps parce qu’il y a un compte à rebours qui ne cesse de s’égrener.

L’émotion est dans le comportement. Un homme qui pleure sa femme nous touchera émotionnellement s’il nous invite dans ses souvenirs des petites attentions que sa femme lui offrait de son vivant. L’émotion se communique bien plus aisément que la froide raison.

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