CE QUI NOUS HANTE

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On peut admettre que nous sommes la somme de nos expériences. Il en est de même pour un personnage de fiction lorsque le récit commence. En langue anglaise, tout ce qui se réfère au passé du personnage est désigné par le terme Backstory.

Cette Backstory donne un aperçu de la personnalité, des valeurs, des croyances et des motivations de vos personnages, des éléments personnels qui peuvent avoir un impact sur leur comportement et sur les décisions qu’ils prennent. La Backstory permet de décrire des vies qui s’étendent au-delà des limites de l’histoire que vous racontez, ce qui aide finalement les lectrices et lecteurs à considérer que vos personnages sont pleinement réalisés.

En fiction, l’opportunité d’explorer un aspect du passé de vos personnages qui a peut-être le plus d’impact sur leur histoire actuelle nous est donnée.

Ce qui nous hante

Personne ne sort indemne de la vie. On a probablement tous une blessure émotionnelle qui, bien que subie il y a longtemps, continue de hanter un personnage jusque dans son présent. C’est une cicatrice intérieure qui n’a jamais complètement guérie, une expérience qu’il porte comme un fardeau permanent.

Cet aspect du passé d’un personnage qui soulève de fortes émotions négatives entre nécessairement en conflit avec sa volonté présente.

Bien que ce conflit soit interne par nature, il peut aussi se traduire par des paroles et des actes qui causent un préjudice externe. Ce qui hante un personnage alimente également l’erreur ou l’illusion, le regard biaisé qu’il porte sur le monde ou sur lui-même, la fausse croyance qui se dresse entre lui et la paix, le bonheur ou la satisfaction qu’il recherche.
À bien des égards, un trauma, par exemple, peut imprégner tous les aspects de l’identité et des expériences de la vie d’un personnage. Cette blessure interne peut influencer l’objectif qu’il s’est fixé, le motiver à agir, interférer avec ses relations, façonner son identité et avoir un impact sur la façon dont il évolue dans son monde.

Pour se faciliter la tâche, on peut travailler ses personnages à partir de trois catégories : la culpabilité, le chagrin et le sentiment d’injustice.

Dans les cas de culpabilité, votre personnage porte en lui un sentiment de honte, de reproche, de lâcheté ou d’échec pour la façon dont il a agi à un moment donné de son existence. Ses décisions à ce moment-là ont entraîné des conséquences terribles et potentiellement durables, qui peuvent être de nature personnelle (il est la victime de ses actes ou décisions) ou externe (c’est son entourage qui a souffert et peut-être souffre encore).

Parfois, un personnage se blâmera à tort pour un événement passé. D’autres fois, les personnages ressentent un sentiment de remords pour la souffrance qu’ils ont causée. Dans un cas comme dans l’autre, la culpabilité conduit souvent les personnages à croire qu’ils sont indignes d’amour, de pardon ou d’opportunité. En un mot, ils se méprisent pour ce qu’ils ont fait ou dit.

Certains personnages sont accompagnés d’une présence fantomatique de chagrin personnel, souvent à la suite d’un décès ou d’une perte. Dans certains cas, le désespoir d’un personnage peut se mêler à la culpabilité (par exemple, avoir causé une mort accidentelle, un emploi ou un mariage perdus à cause d’un comportement négligent).
Dans d’autres cas, un personnage peut se trouver incapable de guérir de la perte d’un être cher ou avoir du mal à accepter le tournant difficile ou inattendu que sa vie a pris.

Les personnages qui ont des griefs contre quelqu’un ou quelque chose sont convaincus d’avoir été lésés et ne peuvent pas pardonner ou oublier cette injustice réelle ou supposée. Un grief peut amener certains personnages à couver leur ressentiment, ce qui peut affecter leur attitude, leurs actions, leur vision du monde et leurs relations.

Il n’est pas rare que le ressenti d’injustice d’un personnage fasse appel à des sentiments de culpabilité ou de souffrance, de désespoir. Un personnage est souvent touché par plusieurs de ces blessures internes d’une manière ou d’une autre. Par exemple, il ou elle peuvent chercher à se venger du meurtre de leur enfant ou se lamenter de la perte d’un membre subie dans un accident de voiture alors qu’ils conduisaient en état d’ivresse.

Des blessures toutes simples

Il est vrai que ce qui nous hante n’a pas besoin d’être aussi horrifiant pour être efficace. Beaucoup d’entre nous vivent avec les cicatrices d’une enfance malheureuse, de relations amoureuses ratées, de la perte d’opportunités professionnelles convoitées ou de mots qu’il valait mieux ne pas prononcer.

Ces situations, parmi d’autres, peuvent également avoir un impact sur la façon dont vos personnages évoluent dans la vie. Les souvenirs difficiles de certains personnages sont une force qui les entraînent vers leur devenir, façonnant leurs objectifs, leurs motivations et leur évolution personnelle.

D’autres blessures internes peuvent simplement servir d’obstacle discret ou de source de tension discrète dans le périple de votre personnage pour trouver l’amour, réussir ou devenir la personne qu’il souhaite être.
Quoi qu’il en soit, ce qui hante un personnage ne fait pas nécessairement de lui ou d’elle une personne foncièrement négative ou malheureuse. Alors que certains personnages sont définis par leurs passés, d’autres ne sont hantés que lorsqu’ils sont placés dans des circonstances qui déclenchent des souvenirs malheureux.

Quelle que soit la façon dont les Backstories de vos personnages se manifestent sur la page, cet élément clé qui les caractérise mérite d’être pris en compte, non seulement pour le vaste impact qu’il peut avoir sur vos personnages et ce qu’il leur arrive, mais aussi pour le lien émotionnel qu’il peut créer avec les lecteurs et les lectrices.
Nous portons tous les blessures de la vie que nous avons menée. Et quelle que soit la façon dont nous gérons ces stigmates, ils nous font sans doute encore souffrir de temps en temps. Cette souffrance est quelque chose que nous partageons tous. Quelles que soient les sources variées de notre détresse ou les différences dans nos expériences de vie, nous partageons un même concept de souffrance. Ce n’est pas dans le détail propre à chaque récit et à chaque personnage que nous nous reconnaissons mais dans l’idée universelle de souffrance.

Il est important de garder à l’esprit ce rapprochement possible lors de l’élaboration du récit. Les personnages sont le cœur de l’intrigue. Si les lecteurs et les lectrices ne se soucient pas d’abord de nos personnages, ils ne s’intéresseront pas à nos histoires.
Il est donc essentiel d’encourager les lecteurs et lectrices à s’attacher à nos personnages, et ces traces de leur passé peuvent favoriser cette relation.

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