PERSONNAGE COMPLEXE

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Qu’est-ce qu’un personnage complexe ? Cela a tout à voir avec notre nature humaine. Une chose que nous a appris l’anthropologie est que nous nous regroupons pour survivre aux dangers de ce monde ou même à d’autres tribus.
Pour distinguer plus facilement les amis des ennemis (et pour trouver un sentiment de communauté basé sur une identité partagée), nous nous attribuons des sortes de marqueurs identitaires à nous-mêmes et à ceux qui nous entourent.

Nous partageons les caractéristiques qui, selon nous, définissent notre identité. Il peut s’agir de notre profession, de notre origine raciale ou ethnique, de nos affiliations politiques ou religieuses, de qui nous sommes par rapport à nos proches ou encore de nos loisirs et intérêts, tout ce qui peut indiquer notre appartenance à un groupe plutôt qu’à un autre.

Nous sommes faits de relations

Notre relation aux autres fonctionne aussi avec des personnages fictifs. Nous pouvons aussi nous reconnaître dans les genres que nous affectionnons plus particulièrement puis, peut-être à travers les conventions d’un genre, nous reconnaissons des qualités ou attributs : un protagoniste bienveillant est un héros ou une héroïne, tandis qu’un personnage secondaire qui le soutient est son acolyte (ou sidekick).
Un personnage plus âgé et plus sage sert de mentor au héros, et le personnage envers qui il éprouve une attirance est appelé son love interest. Identifier les personnages par les fonctions qu’ils occupent peut nous aider à comprendre et à nous engager dans l’histoire. Nous soutenons le héros et l’héroïne dans leur quête parce qu’ils sont héroïne et héros tout comme nous aspirons à la défaite du méchant (même si nous comprenons ses mobiles et motifs) et bien sûr, nous voulons aussi le retour d’affection de l’être aimé sur lequel héros et héroïne ont jeté leur dévolu.

Les traits caractéristiques d’un personnage qui définissent sa fonction peuvent être interprétés en archétypes, c’est-à-dire des classifications plus englobantes qui transcendent les genres et les media par lesquelles ils sont communiqués.
Ainsi, nous pourrions nommer l’archétype du guerrier (Warrior) qui s’applique autant aux femmes qu’aux hommes ; celui de l’enfant intérieur (Orphan) qui désigne selon Carl Gustav Jung la part enfantine ou infantile de l’adulte ; celui de la jeune fille (Maiden) souvent stéréotypée en demoiselle en détresse ; l’archétype de la laideur qui se manifeste par exemple dans la vieillesse ou le crapaud des contes de fée (Crone)..

Les archétypes sont pléthores et souvent la complexité d’un personnage provient d’emprunts auprès d’archétypes divers qui permettent alors de les distinguer davantage. Il est correct d’identifier les personnages par les archétypes qu’ils incarnent ou d’utiliser les archétypes comme point de départ pour créer des personnages.
En tant qu’autrices et auteurs, définir les fonctions de nos personnages peut nous aider à nous assurer qu’ils servent des objectifs narratifs clairs, et développer un casting archétypique peut nous aider à créer des personnages que les lecteurs aimeront ou détesteront. Néanmoins, le risque de créer des personnages unidimensionnels est présent.

Les personnages complexes sont ceux qui existent au-delà des limites des archétypes stricts de personnages. Et le plus souvent, le développement de tels personnages a tout à voir avec l’exploration et l’approfondissement des mondes internes de vos personnages.
Les personnages qui incarnent des archétypes spécifiques sont généralement définis, en partie, par quelques traits de caractère et de valeurs fondamentales qui déterminent la façon dont ils s’engagent dans le monde qui les entoure. Le héros au cœur noble est courtois et courageux ; l’aimable voyou est charmant, même s’il n’a pas de principes ; l’artiste torturé est brillant mais errant et la figure christique est aussi sage qu’altruiste.

Des émotions distinctes animent chacun de ces personnages : empathie, souffrance, nostalgie, espoir.. Mais nous sommes tous bien plus que les émotions fondamentales qui nous animent.

Se libérer de nos chaînes

Permettre à vos personnages de se libérer des chaînes archétypiques qui les entravent est essentiel pour créer des personnages réels et complexes sur la page. Cela ne signifie pas que vous devez permettre à vos personnages d’agir en dehors de leur personnalité. Au contraire, dépasser un archétype, c’est donner aux lecteurs et aux lectrices l’occasion de voir les facettes de vos personnages que ceux-ci ne partagent pas facilement avec le monde.
Bien que l’apparence nous a révélé une jeune fille en détresse, cette forme pourrait cacher néanmoins un trouble bien plus profond, un trauma, une vérité cachée, par exemple.

Dans la fiction comme dans la vie réelle, les situations de conflit et de vulnérabilité sont souvent ce qui nous permet de voir une autre facette de la personne (ou du personnage) que nous pensions connaître. Se demander dans quelles situations vos personnages seraient amenés à agir contre leur tempérament tel que défini par un archétype ou simplement parce que c’est sa personnalité peut être un exercice très instructif. Par exemple, qu’est-ce qui pousserait votre héros au cœur noble à agir par colère ou par haine ? Qu’est-ce qui ferait perdre son charme à votre adorable voyou ?

Dans la structure habituelle d’un récit, il y a un moment nommé la nuit obscure de l’âme (ou Dark night of the soul). Les circonstances ont amené votre héros ou votre héroïne a une désespérance telle que tout semble vraiment perdu pour elle ou pour lui et le lecteur/spectateur y croit car il n’y a apparemment aucune issue possible.

complexeC’est au cours d’un tel épisode dramatique que le personnage se révèle vraiment au monde. Dans L’empire contre-attaque, Leia avoue son amour pour Han juste avant que celui-ci ne soit emprisonné dans la carbonite.

La réponse de Han Je sais semble conforme à son personnage archétypal d’adorable voyou, cependant, son ton inhabituellement sombre témoigne d’une profondeur d’émotion bien plus grande que ce que le lecteur/spectateur avaient vu de lui auparavant.
C’était et c’est toujours un moment déchirant. C’est vraiment la seule façon pour Han de répondre – rude mais toujours vulnérable. À ce jour, ces quelques lignes de dialogue définissent Han et Leia.

Le mensonge que se fait le personnage (c’est-à-dire la croyance fondamentale qui contraint sa vision du monde) peut également le conduire à son point de rupture. Par exemple, lorsque Littlefinger trahit Ned Stark dans A Game of Thrones, Ned abandonne sa croyance selon laquelle il faut toujours agir avec honneur en avouant faussement une trahison dans une vaine tentative de protéger sa famille.

Submerger par les émotions

Bien qu’on soit souvent définis par nos traits de caractère les plus marquants (par exemple, la gentillesse, la colère, l’insécurité..), personne ne ressent ces émotions déterminantes en permanence. En fait, la plupart d’entre nous éprouvent un large éventail d’émotions au quotidien.
Définir les circonstances qui permettent à un personnage de connaître un large éventail d’émotions diverses et variées est un bon moyen pour développer sa complexité émotionnelle.

Tentez le brainstorming : choisissez une émotion que vous voudriez faire passer (colère, désespoir, dégoût, enthousiasme, gratitude, jalousie, confiance, bravoure, inspiration..) et demandez-vous quelles seraient les causes d’une telle émotion ou sentiment afin que le personnage en fasse l’expérience.

  • Dans quelles circonstances votre personnage sortirait-il de ses gonds ?
  • Quels sont ces détails qui apportent du plaisir à votre personnage ?
  • Comment votre personnage pourrait-il se sentir soudain vulnérable ?
  • Quand, comment et avec qui votre personnage se sent-il le plus en paix ?

Vous pourriez aussi vous aider des choses de son passé, de la vision du monde que vous souhaitez lui donner et des traits de personnalité minimaux tels que l’exige votre récit.

Ainsi que le niveau de conscience et de contrôle de ses émotions et sa capacité à établir et à maintenir des relations humaines saines et durables. Alors que nous croyons agir librement, nos passions peuvent nous déterminer à notre insu. C’est une question d’intelligence émotionnelle, notre aptitude à reconnaître et maîtriser nos émotions.

Les personnes dotées d’un haut niveau d’intelligence émotionnelle ont de bonnes capacités de communication, des limites personnelles claires et une bonne compréhension des comportements sains et malsains. En plus d’être tolérants, empathiques et patients, elles comprennent qu’elles ne sont pas leurs émotions. Elles réfléchissent avant de parler et agissent de façon calme et rationnelle plutôt qu’impulsive.
D’autre part, les personnages ayant une faible intelligence émotionnelle seront de médiocres interlocuteurs. Ils peuvent être égoïstes, exigeants, en manque d’affection ou narcissiques, et à ce titre, ils auront probablement un comportement toxique ou abusif. Ils ne savent pas comment gérer leurs émotions, alors ils parlent et agissent de manière impulsive.

Comme tout trait de caractère, l’intelligence émotionnelle présente un large éventail de possibilités. Comprendre le niveau d’intelligence émotionnelle de vos personnages peut vous aider à mieux comprendre comment ils pourraient agir et réagir tout au long de votre récit.
En fait, définir l’intelligence émotionnelle de vos personnages peut même vous aider à développer leur arc dramatique (c’est-à-dire la série d’événements qui explore le cheminement interne de votre personnage, d’un état en un autre).

Les personnages qui connaissent des arcs positifs développent généralement leur intelligence émotionnelle, apprenant à mieux gérer les obstacles internes, à établir des limites ou à renforcer leurs relations. Les personnages qui possèdent d’emblée un haut niveau d’intelligence émotionnelle chercheront non pas à changer radicalement mais plutôt à se renforcer dans leurs convictions, à transformer les doutes en certitudes, à s’efforcer de rester fidèles à leur valeur face à la tentation. Alors que les personnages qui connaîtront un arc dramatique négatif auront un faible niveau d’intelligence émotionnelle tout au long du récit.

Différentes étapes

Les différentes étapes par lesquelles passe un personnage est un bon moyen de démontrer leur complexité émotionnelle. La théorie et pratique narrative Dramatica a conclu qu’en quatre étapes majeures complétées de trois étapes mineures entre les majeures était suffisant pour décrire la complexité d’un tel cheminement.
Nous sommes des êtres compliqués et nos personnages de fiction doivent l’être tout autant.

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