Le personnage de thriller est au cĹ“ur du suspense. L’une des choses les plus enrichissantes qu’un auteur de suspense peut faire avant de commencer Ă Ă©crire est de dĂ©velopper assez intimement ses personnages, suggère l’autrice Christina Kaye.
Mais il ne s’agit pas seulement d’énumĂ©rer leurs attributs physiques ou d’autres choses matĂ©rielles les concernant.
Les cinq critères d’un personnage
La description physique
Ce qui peut ĂŞtre intĂ©ressant Ă faire, c’est de rĂ©vĂ©ler dans le cours de l’intrigue un ou deux caractères physiques cachĂ©s. Ne pas rendre tout apparent d’emblĂ©e, dès l’exposition de l’acte Un.
Parfois, on peut avoir de la difficultĂ© Ă comprendre comment des symptĂ´mes tels qu’une fatigue extrĂŞme, des Ă©tourdissements, quelques douleurs de-ci de-lĂ et des dĂ©ficiences cognitives peuvent ĂŞtre si dĂ©bilitants pour un individu qu’il peut mĂŞme rencontrer une certaine hostilitĂ© dans ses relations sociales.
L’auteur d’une fiction et particulièrement dans le thriller peut jouer de ces symptĂ´mes et les faire participer Ă quelques rebondissements.
Les traits de personnalité
Chaque ĂŞtre humain possède des traits de personnalitĂ© positifs et nĂ©gatifs, tout comme chacun de vos personnages. Je vous propose de parcourir notre catĂ©gorie Le Personnage comme source d’inspiration du moins de connaissances.
Le passé du personnage
Il s’agit de comprendre puis de communiquer au lecteur et Ă la lectrice ce Ă quoi ressemblait la vie de votre personnage avant que le lecteur ne le rencontre Ă l’ouverture du rĂ©cit et qui influence tant ce qu’il manifeste aux autres dès ce dĂ©but tout en obscurcissant ce qu’il est vraiment.
Ce qu’il est vraiment, c’est ce Ă quoi il aspire. Il tend Ă devenir autre et il en a la possibilitĂ© s’il parvient Ă intĂ©grer les Ă©vĂ©nements passĂ©s de sa vie qu’il s’est toujours refusĂ© d’accepter consciemment ou non d’ailleurs.
La blessure émotionnelle
Quelque part dans l’histoire personnelle de votre personnage, il pourrait avoir subi une sorte de traumatisme émotionnel qui affecte la façon dont il gère le stress aujourd’hui.
Je vous renvoie Ă notre catĂ©gorie Émotion pour davantage d’inspiration ou de connaissances.
La motivation ou l’objectif
Qu’est-ce qui motive votre personnage à se comporter et à réagir aux choses de la façon dont il le fait, bonne ou mauvaise ? Qu’est-ce que votre personnage espère accomplir d’ici la fin du récit ?
Nos catégories Objectif du héros et Motivation pourraient vous aider à éclaircir et à étendre cette problématique des motivations.
L’Ă©laboration du protagoniste
Selon votre sous-genre, vous pourriez avoir besoin d’un domaine d’activitĂ© spĂ©cifique et d’expĂ©riences passĂ©es singulières pour votre protagoniste, suggère Christina Kaye.
Kaye note nĂ©anmoins que le thriller se concentrent fortement sur le personnage principal, sur son parcours dramatique connu sous l’expression d’arc dramatique.
Le monde ordinaire du personnage
Montrez ce qu’est sa vie au quotidien, avant de lui imposer l’incident déclencheur et de le forcer à agir.
Par exemple, disons que votre histoire tourne autour d’une femme détective. Votre scène d’ouverture pourrait montrer votre protagoniste dans le département de police et discuter (ce mot suppose un débat, ce qui est dramatique en soi) avec son partenaire ou lieutenant à propos d’une affaire en cours.
Bien que cela ne semble pas si intĂ©ressant, cette scène implique nĂ©anmoins le lecteur dans l’histoire. Plus important encore, une telle scène aide les lecteurs et lectrices Ă faire connaissance avec le protagoniste avant de le mettre en danger, afin qu’ils puissent commencer Ă se prĂ©occuper de ce qu’il peut lui arriver ou le soutenir au cours de ses tribulations.
L’incident dĂ©clencheur
L’incident dĂ©clencheur est une articulation du premier acte. Il devrait se produire assez tĂ´t. Il peut ĂŞtre un simple dĂ©tail comme de recevoir une lettre Ă laquelle on ne s’attendait vraiment pas.
En utilisant l’exemple de la femme dĂ©tective ci-dessus, disons qu’elle reçoit un appel de sa hiĂ©rarchie l’informant qu’un corps a Ă©tĂ© trouvĂ©, jetĂ© dans la rivière. C’est votre incident dĂ©clencheur. C’est le moment qui pousse votre protagoniste hors de son monde ordinaire puis, après habituellement quelques rĂ©ticences, dans l’intrigue.
Le Hero’s Journey
Christina Kaye propose d’organiser son rĂ©cit selon le Hero’s Journey tel que l’a conçu Joseph Campbell.
Ce Hero’s Journey consiste en un certain nombre d’Ă©tapes (notez que vous pourriez en dĂ©finitive choisir une autre structure pour votre rĂ©cit. Ici, il s’agit d’Ă©claircir votre idĂ©e Ă partir du personnage).
- Il dĂ©cide d’accepter de prendre en charge son problème. Il se lance volontairement dans son aventure (Call to Adventure). Notons que Syd Field de son cĂ´tĂ© prĂ©sente cette Ă©tape comme deux Ă©vĂ©nements distincts.
- Le personnage principal franchit le seuil de l’intrigue. A ce moment du rĂ©cit, nous devrions connaĂ®tre quel est son objectif, ce qui le motive Ă agir. Cela amènera naturellement un point de non retour.
- Il rencontre des alliĂ©s (ou sidekicks dans la langue anglaise) et il fait face Ă des obstacles parce qu’une force antagoniste quelle qu’elle soit ne veut pas le voir triompher.
- Puis c’est la rencontre avec le mĂ©chant de l’histoire. On peut considĂ©rer l’acte Deux en deux parties. Dans la première partie, l’adversitĂ© se montre facilement contournable (ou consommable). Le hĂ©ros se sent rassurĂ© mĂŞme si ses victoires sont mineures. C’est alors que la vĂ©ritable force antagoniste se dĂ©voile dans la seconde partie et que le personnage principal comprend que cette force le dĂ©passe en tous points.
On peut s’interroger si le personnage principal n’est pas admiratif de ce mĂ©chant. Après tout, cette force antagoniste pourrait reprĂ©senter ce qui manque au hĂ©ros pour s’accomplir pleinement. - Puis c’est la confrontation finale avec le mĂ©chant, connu sous le nom de climax. Selon l’issue de cette confrontation, auteur et autrice communiquent ce qu’ils ont Ă dire.
- Le Hero’s Journey a pour habitude de se terminer sur le triomphe du hĂ©ros. Vous pourriez en dĂ©cider autrement.
Lorsque vous envisagez de mettre fin au voyage de votre protagoniste, pensez toujours Ă la façon dont il change (c’est l’essence de son arc dramatique). Qu’il s’agisse d’une Ă©volution personnelle, Ă©motionnelle ou spirituelle, il retourne chez lui après le conflit comme une nouvelle personne, avec un point de vue nouveau sur lui-mĂŞme ou sur le monde et qui traduit, en somme, la projection de l’auteur ou de l’autrice dans son Ĺ“uvre.
L’Ă©laboration de l’antagoniste
L’arc dramatique de l’antagoniste sera similaire Ă celui du protagoniste ! Affirme Christina Kaye. Eux aussi devraient avoir un passĂ© significatif et des blessures Ă©motionnelles qui façonnent qui ils sont et pourquoi ils font ce qu’ils font.
Eux aussi poursuivront un objectif spĂ©cifique (perpĂ©trer un attentat par exemple). Ce qu’il faut bien comprendre est que le but du mĂ©chant de l’histoire n’est pas d’entraver les plans du hĂ©ros. Il s’avère que, par un jeu de circonstances, le personnage principal se trouve sur le chemin de l’antagoniste ce qui le dĂ©signe comme un adversaire pour celui-ci.
Certes, on aurait tendance Ă affubler l’antagoniste de sentiments moins honorables que ceux du protagoniste telles que la cupiditĂ©, la vengeance ou la quĂŞte du pouvoir. C’est une erreur de penser cela et cela crĂ©e des stĂ©rĂ©otypes.
Le hĂ©ros peut très bien vouloir se venger après le meurtre de sa femme et de son enfant, par exemple. Peut-ĂŞtre que sa rĂ©demption viendra du pardon qu’il saura faire Ă l’assassin.
S’identifier Ă l’antagoniste
Habituellement, l’auteur recherche Ă crĂ©er l’empathie pour son personnage principal. Lecteurs et lectrices peuvent ainsi reconnaĂ®tre dans son personnage des choses qu’ils ont plus ou moins vĂ©cues ou ressenties. Il y a une certaine ressemblance et cela est suffisant pour focaliser l’attention du lecteur ou de la lectrice sur ce personnage et de craindre pour lui (ou elle si c’est une hĂ©roĂŻne).
Cela n’interdit pas de tenter la mĂŞme chose envers l’antagoniste. Ses raisons d’agir mĂŞme si elles nous paraissent immorales ou dĂ©nuĂ©es du moindre sens commun ne sont pas moins, Ă ses yeux, justifiĂ©es et lĂ©gitimes.
Dit autrement, on peut comprendre l’antagoniste. Par exemple, on ne voit pas la nature comme la violence aveugle d’un tsunami. On aurait plutĂ´t tendance Ă trouver une cause première quelle qu’elle soit.
Une chose que tous les antagonistes rĂ©ussis ont en commun est qu’ils ont au moins un petit trait humain qui fait que les lecteurs se sentent liĂ©s Ă eux et se trouvent partagĂ©s au sujet de leur fonction dans l’histoire.
Par exemple, dans Rebecca de Daphné du Maurier, Mme Danvers est sans doute cruelle et manipulatrice pour la seconde Mme de Winter, mais on ne peut s’empêcher de souscrire à son attitude après avoir appris qu’elle connaissait la première et défunte Mme de Winter depuis son enfance.
Bien sĂ»r, vous voudrez toujours montrer l’antagoniste comme le mĂ©chant qui est fermement opposĂ© Ă votre hĂ©ros. Mais si vous pouvez trouver un moyen de faire voir aux lecteurs ce lambeau d’humanitĂ© — très probablement sous la forme d’une vulnĂ©rabilitĂ© (un amour immodĂ©rĂ© pour les chats par exemple) — qui se trouve au plus profond de lui, vous aurez un antagoniste qui n’est pas seulement un dispositif narratif constitutif de l’intrigue, mais qui rĂ©sonne vraiment avec les lecteurs.
Un adversaire digne de ce nom
Votre antagoniste devrait être un dur à cuire, pas un idiot minable qui est facile à trouver et à vaincre ! Et quand votre protagoniste et son antagoniste ont leur ultime confrontation en fin de deuxième ou début de troisième acte, vous devriez vous assurer que la bataille est bien menée des deux côtés.
Cependant, le protagoniste devrait finalement vaincre le mĂ©chant. Personne ne veut lire ou voir un thriller, s’investir dans les personnages, et anticiper la confrontation finale, seulement pour que le mĂ©chant gagne et le gentil meurt. Le thriller n’est dĂ©cidĂ©ment pas une tragĂ©die.
Les grecs, civilisation Ă©panouie, avaient besoin de la tragĂ©die pour compenser le malheur qu’ils ne connaissaient pas. Mais les choses ont changĂ©es.
L’histoire personnelle de votre antagoniste doit finir d’une manière ou d’une autre, mĂŞme s’il survit au conflit. Il peut se fondre dans l’obscuritĂ© mortellement blessĂ© ou se replier vers son repaire pour lĂ©cher ses blessures et se prĂ©parer pour la prochaine bataille (si vous Ă©crivez une sĂ©rie).
Mais pour que votre thriller soit satisfaisant, le protagoniste doit l’emporter.
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