LE PERSONNAGE ET SON AUTREFOIS

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Dwight V. Swain

Jusqu’où pousser le passé d’un personnage ? Dwight V. Swain propose de le travailler suffisamment de sorte que votre lecteur et vous-mêmes croyez en lui.

Voici, un personnage. Il a un nom et un monde intérieur. Et il est étoffé avec des attributs, des qualités et des défauts appropriés, des traits de caractère spécifiques (il pourrait être maladivement timide par exemple ou bien un satyriase), des relations (c’est souvent à travers elles que toute une intrigue peut prendre du sens), et des préoccupations.

Question suivante : Qu’est-ce qui l’a façonné ainsi ?

La réponse, bien sûr, est son parcours, son vécu. Pour comprendre le présent et le devenir d’un personnage, explorez son passé, rappelle Dwight V. Swain.

Donc, vous donnez à un personnage un arrière-plan censé expliquer son agir dans le présent, des prises de décision qui orienteront son devenir.

D’où vient ce contexte ? De vous, bien sûr. Vous, l’auteur ou l’autrice, les créateurs.

Comprendre autrui

Concevoir un personnage de fiction implique une certaine perspicacité à lire autrui dans la vie réelle. La compréhension d’un personnage ne peut découler que d’une prise de conscience des éléments clés qui dessinent l’autrefois d’un personnage, c’est-à-dire ses racines, que vous choisissez ou non de révéler à vos lecteurs.

Ou, pour le dire autrement, votre rationalisation (c’est le terme employé par Dwight V. Swain) de chaque personnage et de son comportement actuel n’aura de sens que si le personnage a un passé.

La question fait retour : jusqu’où devrions-nous remonter pour que soient crédibles les actions du personnage ?

Pas plus que nécessaire pour rendre l’état émotionnel du personnage évident pour votre lecteur, juge Dwight V. Swain. Dans la plupart des cas, la constitution d’une personne, ses attitudes, sont des comportements appris, fondés sur un conditionnement de longue durée (l’éducation, l’appartenance à une communauté ou à une culture, la société dans laquelle on vit avec ses règles, ses lois…), la répétition d’une expérience ou d’un modèle encore et encore qui font que souvent on oppose à un événement ce qu’on croit qui fonctionnera parce que l’habitude nous en a convaincu. Mais chaque événement n’est jamais totalement identique et la congruence espérée mène souvent à une erreur et une incompréhension. L’adéquation d’une réponse ancienne aux circonstances nouvelles apporte rarement la satisfaction recherchée.

Mais aux fins de l’histoire que l’on s’apprête à écrire, un certain degré de simplification et de dramatisation est non seulement justifié, mais presque essentiel.
Vous devriez, conseille Dwight V. Swain, essayer de lier l’attitude majeure du personnage dans tout événement actuel (qui lui arrive dans le présent de la narration) à un événement unique, suffisamment mémorable (du point de vue de son effet sur le comportement du personnage), de son passé, dans la mesure du possible, nuance Swain.

Et Swain rajoute que si vous pouvez capter cet événement formatif dans une image mentale, un instantané sensoriel qui a tendance à se projeter dans l’esprit du personnage chaque fois qu’il pense à cet événement spécifique, ce n’en sera que mieux.

Votre histoire exige, par exemple, qu’un homme soit jeté dans un état de panique hystérique. Vous avez besoin d’une raison crédible pour ladite panique. Donc, vous allez rechercher à travers toutes les explications possibles celles qui pourraient correspondre aux circonstances, à l’histoire et opter pour celle qui sied le mieux à la situation actuelle.
Continuons sur cet exemple. Votre personnage a une peur irrationnelle des serpents. Il vous suffira alors d’introduire ce reptile dans l’intrigue afin qu’il fasse sens avec la ligne dramatique (souvent celle du personnage principal) pour en assurer la cohérence.

Remonter jusqu’à l’enfance par exemple

Question suivante : Pourquoi cette personne réagit-elle si fortement aux serpents ?

Réponse : Vous — l’auteur ou l’autrice, le concepteur ou la conceptrice — décidez que, dans l’enfance de ce personnage, une sœur aînée sadique, qui lui en voulait et était vindicative, a acquis un long serpent en plastique. Elle attendit patiemment que son petit frère s’endormît cette nuit-là, elle mit le serpent sur son visage, puis lui piqua le cou avec une aiguille.

Le petit frère se réveille. Le serpent se tord sur son visage. Hurlant, griffant, convulsant, le petit entre dans un traumatisme psychique si profond qu’il vit encore avec lui aujourd’hui. Vous n’avez plus qu’à mettre en mots cette expérience si elle s’avère nécessaire pour la compréhension du récit.

Le contexte, l’histoire passée, l’expérience antérieure, maintenant l’explicitation sous-jacente, de sorte que le lecteur accepte la réaction du personnage.

Et parfois, une simple réminiscence peut expliquer une réaction. Si vous parvenez à évoquer une fragrance, même chez un spectateur, quelques images ou quelques mots peuvent alors expliquer pourquoi votre personnage réagit comme il le fait. Certes, compense Dwight V. Swain, toutes les réactions ne nécessitent pas qu’on les explique. Ce sont les exigences de l’histoire qui le dicteront.

Observer autrui est une source passionnante pour élaborer ses personnages. Les faits divers, vos lectures, des personnes réelles peuvent vous inspirer ou bien des personnages inventés par d’autres auteurs (il s’agit d’inspiration, non de plagiat).

Cependant, et surtout, rappelle Dwight V. Swain, sonder votre propre passé, puis fusionner les morceaux que vous vous rappelez de votre petite enfance. Ils auront une couleur et une aura de vérité (votre vérité donc forcément subjective en tant que représentation et interprétation) que rien d’autre ne peut égaler. Ensuite, lorsque vous utilisez ces fragments, rendez-les importants pour vos personnages en attribuant à chaque souvenir une leçon apprise (de celle qui font grandir, peut-être) ou une émotion évoquée, conformément à la logique (donc essentiellement par un jeu de cause à effet, cet effet parmi de nombreux possibles pour une seule cause) à laquelle vous les reliez pour construire votre récit.

Je soulignerais la différence entre récit et histoire. Le récit est la suite chronologique des événements, donc la cause précède l’effet. L’histoire est une réorganisation des événements qui peuvent s’exposer entre autrefois et aujourd’hui sans préséance.

Gardez à l’esprit, cependant, que même si nous pouvons segmenter le « contexte » à des fins d’analyse, il demeure un tout où le personnage — et la vie — sont concernés. L’animal humain est une unité, une entité, qui n’a de signifiance que dans le tout. L’analyse révèle des éléments constitutifs qui pris séparément, hors du contexte du tout, ne sont pas suffisants pour expliquer le personnage.

Une telle unité organique met l’accent sur la cohérence, et la cohérence est l’élément essentiel de tout personnage, de toute personnalité, aussi disparate ou improbable que puisse paraître à première vue l’association de ses composantes.

Chaque jour, vous êtes sollicités pour faire des dons. Beaucoup d’initiatives en valent la peine. Depuis 2014, nous espérons vous avoir prouvé que notre initiative n’est point une passade sans lendemain. Nous souhaitons aider les auteurs et les autrices à aller jusqu’au bout de leurs projets avec quelques chances de réussite. Si vous estimez que nous participons effectivement à vos côtés, Merci de considérer de temps en temps quelques dons.

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