DÉFINIR SES PERSONNAGES PAR LEUR COMPORTEMENT

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Il est presque impossible d’avoir une bonne histoire sans des personnages dépeints sur au moins trois dimensions. Des personnages pleinement réalisés et possédant leurs propres idiosyncrasies ressemblent à de vraies personnes et le lecteur peut éprouver de l’empathie ou de la sympathie envers de tels personnages.

Néanmoins, avoir créé des personnages tridimensionnels n’est pas suffisant car il faut aussi trouver le moyen d’exprimer, de révéler la nature de ces personnages au lecteur d’une manière dramatique et crédible.

Le comportement est dramatique

Un scénario, c’est montrer les choses. Montrer les choses, c’est dramatiser. C’est-à-dire qu’on prend une idée et on la présente dans une forme propre au drame.
Si on se contente de l’exposer par des descriptions dites par les personnages, on échoue à écrire un scénario. Les traits de la personnalité des personnages seront ainsi dramatisés.

PersonnagesDans Green Book : Sur les routes du sud de Nick Vallelonga, Brian Hayes Currie et Peter Farrelly, il n’y a nul besoin que Tony fasse un étalage de ses opinions racistes pour comprendre qu’il a certains préjugés. Une seule scène a suffit et l’intelligence du lecteur (ne jamais sous-estimer l’acuité de celle-ci ce qui serait méprisable) a fait le reste.

Lorsque la femme de Tony offre un verre d’eau fraîche à deux ouvriers noirs, Tony jette ensuite nonchalamment les verres à la poubelle. Sans un cri, sans un mot, ce comportement nous dit que pour Tony les verres ne seront jamais assez propres après que ces hommes noirs aient bu avec.

Et cela va encore plus loin car cette action initie l’arc dramatique que va suivre Tony tout au long de cette histoire. Au dénouement, Tony invite Shirley à partager le repas familial de Noël. Cette action d’inviter un homme noir à partager un repas aussi important sur un plan symbolique que celui de Noël peut être rapprochée de la scène où Tony jette les verres.

En comparant ces deux scènes, nous comprenons que Tony n’est certainement plus la même personne après avoir vécu toutes les expériences de l’intrigue. Et son arc dramatique est complété.

PersonnagesDans Can you ever forgive me ? de Nicole Holofcener et Jeff Whitty, nous apprenons beaucoup sur la personnalité de Lee Israel lorsqu’elle se rend à une fête organisée par son agent. En fait, Lee est seulement intéressée pour soumettre des idées à son agent mais celui-ci la rabroue. Ce n’est ni le lieu, ni le moment. Lee s’en va en volant le manteau de quelqu’un d’autre dans la foulée.

Cette scène qui n’ajoute rien à l’intrigue est pourtant nécessaire pour nous en dire un peu plus sur la personnalité de ce personnage. On comprend ainsi que Lee a un total désintérêt des rapports sociaux et nous avons aussi un aperçu de son manque d’honnêteté ou d’intégrité.

Bien sûr, nous sympathisons avec elle car ses difficultés financières sont terribles et nous comprenons sa situation mais cela nous prépare aussi à accepter que du vol d’un manteau à la contrefaçon, Lee franchit le pas d’une manière tout à fait crédible.

Et cela seulement par son comportement. Aucun dialogue s’est avéré nécessaire.

Le contraste

Nous pouvons aussi illuminer un personnage par contraste avec un autre. La théorie narrative Dramatica utilise le contraste pour définir une relation de dépendance (Dependent Pair) entre deux personnages. En effet, le contraste sert à définir par comparaison un personnage donné. Souvent, vous verrez que les personnages offrent des points de vue alternatifs sur la problématique soulevée par l’histoire.

PersonnagesDans BlacKkKlansman : J’ai infiltré le Ku Klux Klan de Charlie Wachtel, David Rabinowitz, Kevin Willmott & Spike Lee, nous apprenons beaucoup sur la personnalité de Ron par le contraste qu’il offre avec son Love interest Patrice Dumas, la présidente de l’organisation étudiante.

Alors que Ron essaie de s’intégrer dans la société conventionnelle et s’appuie sur la loi pour la défense de la justice, Patrice croit seulement en la résistance et la rébellion. Elle rejette la société et assume sa propre culture.
Face à cette détermination de Patrice, Ron n’ose lui avouer sa véritable activité. Cette décision, cette action illustre combien est compliqué la voie empruntée par Ron.

Par ailleurs, nous avons le personnage de Flip Zimmerman qui n’a jamais vraiment assumé sa judéité. Flip connaîtra aussi son propre arc dramatique lorsque confronté à l’attitude anti-sémite du Ku Klux Klan, il commencera à reconsidérer cet aspect de son identité et ce que cela signifie vraiment.

Gardez en tête que tous les personnages d’une histoire sont susceptibles de vivre un arc dramatique entre le début et la fin de l’intrigue. Réfléchissez à la personnalité de vos personnages. Considérez ceux sur lesquels vous pourriez imprimer un arc dramatique, c’est-à-dire un changement de personnalité lié aux expériences qu’ils vivront au cours de l’intrigue. Cela enrichira votre scénario.

Dans BlacKkKlansman : J’ai infiltré le Ku Klux Klan, le contraste de paires de personnages (et certains peuvent représenter une entité comme le Ku Klux Klan) par leurs perspectives sur les questions de race et d’assimilation nous permet de bien mieux comprendre l’attitude de chacun d’entre eux pris individuellement.

PersonnagesDans Roma d’Alfonso Cuaron, nous avons Antonio le père et nous avons Sofia la mère. Pour décrire la personnalité de chacun d’entre eux (et encore une fois, cela n’ajoute rien à l’intrigue. Comprendre la nature des personnages est en quelque sorte hors de l’intrigue mais nécessite un certain nombre de scènes dédiées à ce seul examen), nous voyons Antonio garer sa voiture avec mille précautions.

Puis plus tard, une autre scène nous montre Sofia qui gare la voiture sans prêter la moindre attention à la carrosserie qui en souffre sévèrement. Qu’est-ce que cela nous apprend sur ces personnages ? Nous comprenons qu’Antonio est un personne qui agit avec circonspection, qui saisit la prudence comme une vertu alors que Sofia est un être singulièrement émotif, sensible.

Peut-être est-ce là pour Cuaron une manière de définir ses personnages comme raison et passion, la raison ne pouvant s’expliquer que par la passion et réciproquement. En d’autres termes, on n’accepte l’aspect émotionnel de Sofia qu’en le comparant à l’aspect raisonnable d’Antonio. Ces deux personnages forment une paire parce que pris isolément, il n’apporte aucune signification. Seule leur relation les justifie dans l’histoire.

Pour conclure, mettez vos personnages en situation pour expliquer à votre lecteur/spectateur qui ils sont.

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