INTRIGUE : QUESTION DE RIVALITÉ

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Un rival est quelqu’un qui se bat pour le même objet ou le même but qu’un autre. C’est un personnage qui conteste l’autorité d’un autre pour s’en accaparer.
Le même objectif pourrait être deux prétendants se battant pour la main d’une damoiselle. Ce pourrait être aussi deux chefs d’armée qui luttent pour la mainmise d’un territoire ou bien encore simplement une partie d’échecs.

Le but de la rivalité est certes identique mais les concurrents ont des motivations différentes. Ce qui ouvre de très nombreuses possibilités narratives pour l’auteur qui souhaite aborder une intrigue fondée sur une rivalité.
Toutes les fois où deux personnages s’affronteront pour un même but, vous êtes face à une rivalité. Peut-on faire remonter la genèse d’une telle intrigue au combat entre Dieu et Satan, pourquoi pas ? John Milton dès 1640 avait envisagé une telle rivalité bien que Le paradis perdu ne répond pas à la structure classique du héros tel que nous l’envisageons depuis quelques temps déjà.

Chez les grecs, la lutte des dieux pour la suprématie du Mont Olympe illustre déjà une rivalité pour le pouvoir. D’autres rivalités peuvent être causées par des accès de jalousie comme par exemple Caïn et Abel lorsque Caïn est jaloux du choix de Dieu envers son frère.

La rivalité est partout

Elle peut être le thème de la fiction tout comme elle peut être simplement mentionnée pour expliquer par exemple un tournant majeur de l’histoire.
On constate dans une telle intrigue bien que les faiblesses des deux opposants soient différentes, ils sont cependant de forces égales. C’est une relation différente de celle que l’on rencontre habituellement entre un protagoniste et son antagonisme. En effet, le personnage qui incarne l’antagoniste est généralement plus puissant que le héros de l’histoire.

Dans une rivalité, les forces en présence bien qu’égales ne sont pas forcément similaires. Par exemple, le héros pourrait être une demi-portion et le méchant de l’histoire un géant tout en muscles. Ce que n’a pas la demi-portion est cependant compensée par son intelligence. Cet esprit que ne possède pas la brute sans cervelle permet d’équilibrer le combat.

Il n’est pas nécessaire que la rivalité s’exprime selon l’éternel combat entre le bien et le mal. En fait, l’histoire sera plus intéressante si les deux rivaux sont tous deux méritants. C’est la tension dramatique qui est recherchée dans une telle intrigue.
Et cette tension s’explique simplement parce que deux personnages ne peuvent tout simplement pas occuper le même espace. La rivalité est une compétition. L’un doit gagner et l’autre perdre, c’est dans la nature des choses.

La rivalité s’adapte à tous les genres

On la trouve dans Le vieil homme et la mer de Hemingway qui décrit le combat épique d’un vieil homme et d’un gigantesque marlin ou bien encore dans Jules et Jim de François Truffaut. Le triangle amoureux est idéal pour illustrer une rivalité.

Pour que l’intrigue fonctionne, il est nécessaire que l’opposition entre les deux personnages ne soit pas traitée légèrement. Sa signification doit être profonde et étendue. La rivalité sert de métaphore à des idées bien plus universelles et qui s’avèrent contradictoires et incompatibles comme la domination du propriétaire foncier sur le serf, par exemple.
La rivalité peut alors s’exprimer comme un combat entre deux hommes dont l’un cherche à conserver des valeurs traditionnelles et l’autre faisant preuve d’une modernité qui tend à l’émanciper du joug historique qu’il ne reconnaît pas.

Pour que cette rivalité soit acceptée par le lecteur et qu’elle puisse porter ses fruits en lui, il est utile de rendre clairs les problèmes moraux qu’elle soulève. Ce sont les enjeux pour les personnages qui servent à les illustrer.

Dans un premier temps, l’antagoniste a l’avantage. On le reconnaît d’ailleurs parce que ses qualités fondamentales ne sont pas vraiment sympathiques. Le protagoniste sera lui reconnu comme étant plus honnête, plus vertueux. La première phase de l’intrigue montre ainsi un antagoniste qui prend l’initiative et l’emporte sur le héros.

Cette première phase a pour fonction de positionner les deux personnages l’un par rapport à l’autre. La relation qui les unit (les personnages et leurs relations forment l’infrastructure qui supporte l’histoire) se dégrade en défaveur du héros.

Deuxième phase de l’intrigue

Le héros reprend le dessus. Ou du moins, il cesse sa descente aux enfers. Ce qui est surtout remarquable est que le protagoniste a appris (parfois à l’aide d’un mentor) à comprendre qu’il avait autant de pouvoir que l’antagoniste (même si ce pouvoir n’est pas le même). Dorénavant, le protagoniste va pouvoir défier l’antagoniste avec des atouts qui le rendent aussi puissant que lui.
C’est à cela que sert la deuxième phase de l’intrigue. Cependant, l’aspect le plus humain du héros se rappelle à lui. La nature humaine est faible et le héros ne fait pas exception. Il lui faut mettre de l’ordre chez lui avant le climax, l’ultime confrontation.

De son côté, l’antagoniste est loin d’être bête. Il se rend parfaitement compte que le héros est maintenant en mesure de le vaincre. Il peut se sentir vulnérable et plus menacé que d’habitude. Cela renforce d’ailleurs la tension si l’anticipation par la force antagoniste de l’inévitable confrontation est rendue plus tangible en terme d’incertitudes et de doutes chez l’antagoniste.

Dans une rivalité, on ne peut faire l’impasse sur l’aspect moral. Il faut que les motivations du héros et de sa force antagoniste soient justifiées sur le plan moral. Si vous êtes mal à l’aise avec cela, il est préférable de ne pas s’attarder sur ce type d’intrigue.
Lorsque le héros a intégré sa faiblesse, qu’il l’assume désormais, peut alors intervenir la troisième phase de l’intrigue. C’est la confrontation finale avec l’antagoniste. Et lorsque le héros sort vainqueur de cet ultime combat, il en ressort (et ceux de son entourage aussi) bien plus élevé sur le plan de la conscience morale voire sociale.

Pour résumer :

La source du conflit est la non compromission. Aucun des deux personnages rivaux n’est prêt à céder du terrain à l’autre. Tous deux veulent la même chose. Si je reprends mon exemple du propriétaire foncier et du serf, quel est leur but commun ? C’est la liberté. L’un considère un droit ancestral et l’autre exige ce droit.
C’est-à-dire de posséder cette terre, de posséder l’outil de sa production.

La nature de la rivalité est une question de pouvoir entre le protagoniste et l’antagoniste. Bien que très morale, ce type d’histoire ne se résume pas à une lutte entre le bien et le mal. Il peut être question de spiritualité ou de lutte des classes.
Il est bon de considérer cette rivalité comme une métaphore pour des idées plus abstraites comme le pouvoir de l’amour sur celui des biens matériels.

Contrairement à la plupart des intrigues, l’antagoniste ne dépasse pas les capacités du héros. Ils sont de force égale bien que cette force s’exprime de façon différente chez l’un et l’autre. La sagesse est aussi puissante que la barbarie. En fait, la nature de la force chez l’un compense celle de l’autre.

Pour que l’intrigue qui met en avant une rivalité soit efficace, il est nécessaire de ne pas trop s’attarder sur le statut quo initial du protagoniste. Son quotidien doit être exposé assez brièvement et le conflit doit être engagé rapidement. Ainsi, l’incident déclencheur sera l’acte de l’antagoniste contre la volonté manifeste du héros. Le lecteur sait ainsi précisément ce que sera l’intrigue (autrement dit, de quoi parle l’histoire).

La relation de l’antagoniste et du protagoniste sera une question de position. D’abord, la force antagoniste prendra le dessus sur le héros le laissant souvent dans une situation désespérée. Profitant du désavantage évident dans lequel se trouve le protagoniste, le soi-disant méchant de l’histoire en profite alors pour renforcer sa propre position. Ce qui donne de la matière dramatique pour l’auteur.

Les actions et motivations des personnages reflètent des problèmes moraux. Lorsqu’un auteur est interpellé par de tels problèmes, la rivalité est un bon moyen pour communiquer son message.

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