RÉSUMER SON SCÉNARIO AVANT DE L’ÉCRIRE

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Alors que le synopsis est un outil destiné à convaincre sur votre scénario, écrire une esquisse de ce dernier vous sera utile personnellement pour mettre à plat vos idées avant de vous lancer dans l’écriture du scénario proprement dite.
A vocation personnelle, ce résumé vous permettra de tester vos idées auprès d’un petit nombre de lecteurs extérieurs aux regards sans complaisance et de vous guider lors de la continuité dialoguée, expression absconse qui ne signifie rien d’autre que votre scénario (c’est-à-dire l’écriture des scènes et de leurs dialogues éventuels dans l’ordre où elles apparaîtront dans le récit).

Chacun est libre d’écrire comme il le sent (c’est de la responsabilité de l’auteur et de l’autrice, leur choix) mais voici cependant ce que propose H. R. D’Costa sur ce que devrait contenir un tel résumé.
Vos personnages seront jetés dans une histoire et une intrigue. Les événements s’ordonneront de façon à obliquer le parcours de ces personnages. Cet ordonnancement est une structure qui articule ces événements dans la totalité de l’histoire.

Tout commence par donner un but à votre personnage principal. Ce qui signifie une stratégie, un plan pour accomplir un objectif.

Les articulations

H.R. D’Costa distingue 8 moments importants dans une structure. Pour garder les choses pratiques, nous avons préféré réduire le nombre de nœuds dramatiques non pas en les éliminant mais en les fondant les uns dans les autres.
Ces moments doivent figurer dans le résumé que vous vous apprêtez à écrire. Donc avant même de vous lancer dans le résumé, il est important d’identifier ces nœuds dramatiques. Ils vous serviront de guide pour le résumé et plus tard pour le scénario. Vous n’avancerez pas aveuglément.

La séquence d’ouverture et le dénouement de votre histoire

Pour William Friedkin, “Citizen Kane is the film that made me want to become a filmmaker.” ; Citizen Kane est le film qui m’a fait vouloir devenir réalisateur.

Et voici ce que qu’explique Jim Mercurio : Pour lui, la séquence d’ouverture est habituellement à propos du thème.

Et la question qui viendrait immédiatement à l’esprit, c’est de savoir ce qui doit venir ensuite : les personnages, le contexte, le genre ? C’est une fausse interrogation. Pour Jim Mercurio, il faudrait que dans les quelques minutes que dure la séquence d’ouverture soient présentés plusieurs choses.
Prenons l’exemple de la séquence d’ouverture de Citizen Kane :

 Xanadu.
Mais est-ce seulement Xanadu que met en avant cette séquence ?
Des animaux en cage.. Mais ce n’est pas une image posée là sans signification. L’auteur va au-delà de ces animaux en cage et semble suggérer une sorte de prison. L’atmosphère est sombre. Ténèbres et clartés sont symboliques. La prose d’un auteur de scénarios n’est jamais gratuite.

Et il y a ce panneau No Trespassing (interdit d’entrer) que passe la caméra volontairement et nous pénétrons plus profondément jusqu’au moment Rosebud.
Au terme de cette séquence, nous avons le sentiment que le thème et l’histoire sont de nous faire pénétrer dans la vie de quelqu’un et de creuser cette vie un peu comme l’archéologue qui franchit le seuil sacré d’un tombeau oublié.

Le dénouement fera défiler les dernières images. Et le totem de la séquence de fin de Inception pourrait bien changer toute notre interprétation de cette histoire :

Vu l’importance de ces deux séquences dans la structure de l’histoire, il serait préférable d’attendre d’avoir écrit davantage de matière afin de pouvoir y consacrer une réflexion appuyée par la compréhension et le développement du thème tel qu’il apparaîtra dans ce qui aura été écrit.

L’incident déclencheur

Cet événement sans lequel la vie du héros ou de l’héroïne aurait pris une toute autre voie que celle que vous lui avez inventée doit figurer aussi dans votre résumé.

Pour en découvrir davantage sur cet événement (qui prend assez souvent la forme d’une rencontre) :

Le passage dans l’acte Deux

C’est un nœud dramatique important après que vous ayez introduit les personnages centraux de l’histoire (y compris l’antagoniste). Votre lectrice et votre lecteur connaissent votre héros ou votre héroïne. Ils savent quelle sera leur mission dans le récit et qu’il ou elle est prêt (plus ou moins forcé) à s’engager dans l’aventure qui les attend.

Ce passage dans l’acte Deux est comme le franchissement d’un seuil. Même s’il peut éventuellement y avoir une possibilité pour que ce personnage principal arrête tout, bien souvent, une fois qu’il a pris en charge son problème, il ne lui reste aucune possibilité de revenir en arrière.
Il a atteint un point de non retour.

L’acte Deux est l’espace de l’intrigue. C’est dans ce lieu que se passeront les pérégrinations du héros ou de l’héroïne quant à surmonter les obstacles rencontrés. Mais surtout comme le mentionne Peter Dunne, cet acte Deux est l’espace où l’évolution de la personnalité du personnage sera le point de focalisation de l’auteur.
En d’autres termes, il doit concevoir l’action des personnages en gardant à l’esprit les conséquences émotionnelles que celles-ci peuvent non seulement avoir sur le personnage qui agit mais aussi sur autrui.

Le point médian

D’étendue variable, le point médian caractérise ce qu’on peut nommer le milieu du récit. Il permet si nécessaire de scinder l’acte Deux en deux. A partir de ce point médian, l’histoire est censée prendre une nouvelle direction.

Dans le combat traditionnel entre le bien et le mal, on peut admettre que le bien n’a connu que revers sur revers jusqu’au point médian et à partir de celui-ci, la fortune change sembler de main.
Il y a enfin une possibilité de victoire. Un chant d’espoir illumine de sa clarté un horizon qui ne semblait pourtant qu’obscurci par les souffrances vécues.

Le point médian est une séquence qui décrit un événement qui oriente le récit dans une toute nouvelle direction. Concrètement, le point médian est généralement négatif. Pourquoi ? parce que dans cette négation germera dans l’esprit ou l’âme de l’héroïne ou du héros une force qui poussera à trouver en lui ou en elle les ressources nécessaires pour remonter la pente. En somme, ce point médian correspond au moment de crise, étape structurelle de l’évolution et de l’histoire et de l’arc dramatique du personnage.

Voici ce qu’en dit Blake Snyder : pour lui, deux choses doivent surgir au point médian :

  • Les enjeux sont réaffirmés (le risque est plus grand de perdre quelque chose),
  • Un compte à rebours est mis en place. C’est-à-dire que la situation du héros ou de l’héroïne se drape d’une urgence.

Après que nous ayons fait la connaissance de cet héroïne ou de ce héros au cours de l’acte Un et que ceux-ci aient décidé de se lancer dans l’aventure (c’est-à-dire le moment du passage dans l’acte Deux), pour Snyder, ce personnage principal a encore le choix de revenir en arrière, de tout arrêter.
Mais au point médian, lorsque les enjeux sont élevés et qu’une urgence se fait sentir, c’est précisément à ce moment que se situe le point de non retour et que le personnage décide vraiment d’aller jusqu’au bout de sa mission dans l’histoire.

Titanic

Dans Titanic, Rose nous est présentée comme une jeune fille choyée, fiancée malgré elle, surprotégée par une mère inquiète de leur devenir et Rose est suicidaire. Puis elle rencontre Jack.

Pendant toute la durée de la première partie de l’acte Deux, il nous est montré comment Rose et Jack tombent amoureux. Et au point médian, deux choses se produisent :

  • Ils font l’amour. Ce n’est pas une signification gratuite. Cet acte d’amour est le signe de l’émancipation de Rose envers Cal, sa mère et son milieu social.
  • Le Titanic heurte l’iceberg.

Cette désaliénation force Rose à prendre ses responsabilités et à s’interroger. Aime-t-elle vraiment Jack ? Est-elle prête à tout quitter pour vivre son amour ? Elle doit trouver des réponses et ne peut atermoyer dans l’indécision car le bateau coule.
Le capitaine par ailleurs confirme l’urgence lorsqu’il demande combien de temps il leur reste.

Pour Snyder, la clef pour comprendre le point médian est de comprendre ce que vous cherchez à dire avec votre histoire (son thème, son message).
L’élévation des enjeux renforce les possibilités du héros et de l’héroïne et la pression qu’ils subissent quant aux décisions qu’ils doivent prendre participe au changement de la personne qu’ils étaient en la personne qu’ils sont réellement (une fois débarrassé de toutes les couches qui les aveuglaient sur leur véritable nature).

Le All is Lost

Le point médian et le All is Lost sont à distinguer. La différence se situe dans le moment où les événements se produisent.

L’art scénaristique étant ce qu’il est (une fiction d’abord), il s’imprègne avec délectation de l’adversité. La moindre once d’espérance sera contrasté avec une profonde désespérance. C’est ainsi qu’il faut prévoir dans le résumé une situation de profond découragement pour le protagoniste où il lui semblera que son objectif est définitivement hors d’atteinte.

Le All is Lost habituellement clôt l’acte Deux. Néanmoins, le début du troisième acte sera alors dédié à une sorte d’illumination. Le héros ou l’héroïne est passé par tant de tribulations que des révélations se sont faites en lui ou en elle.
Ils comprennent enfin cet enlisement dans lequel ils s’étaient eux-mêmes fourvoyés. Ils trouveront en eux des ressources dont ils ignoraient l’existence. Et ils auront la force et l’énergie nécessaires pour affronter une ultime confrontation avec l’antagonisme : c’est alors le moment du climax.

Le climax

Donc votre protagoniste a maintenant suffisamment de ressources (à la fois extérieures et intérieures) qui lui permettront de tester sa force de caractère contre les forces antagonistes qui n’ont cessé de déjouer ses plans jusqu’à présent.

Nous savons que les ressources intérieures sont très subjectives faites de révélations que le protagoniste a découvert en lui-même et par lui-même au cours de ses pérégrinations. S’il était lâche par exemple, il sait maintenant pourquoi il se comportait ainsi. Il a intégré cette blessure qui jadis lui donnait une telle attitude. Maintenant, il sait qu’il possède le courage nécessaire pour mener à bien sa mission.
Quant aux ressources extérieures, ce sont les objets qui lui manquaient pour affronter son adversaire. Si votre héros ou votre héroïne est un scientifique par exemple, il ou elle possède maintenant le vaccin qui leur permettra de vaincre ce virus qui décime l’humanité. Le climax en conséquence sera d’affronter ce virus, de trouver le moyen de lui inoculer le vaccin afin de le détruire.

En règle générale, le climax est ce moment où le protagoniste fait la démonstration de tout ce qu’il a appris au cours de son aventure. Une sorte d’examen de passage avant de devenir meilleur, avant de retrouver sa véritable nature (oblitérée depuis la blessure dans son passé qui avait fait de lui ce qu’il était lorsque nous avons fait sa connaissance).

La résolution

Il est bon de connaître la fin de son histoire avant de l’écrire. Je vous renvoie à nos articles :

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