CONSEILS POUR ECRIRE UNE TRILOGIE

4.5
(2)

Ecrire une trilogie a ses exigences. Voici quelques étapes à respecter si l’on souhaite garder l’attention de son lecteur jusqu’au bout.
Le chiffre 3 revient souvent dans l’art narratif : les Rois Mages, les Trois petits cochons… et le Père, le Fils et le Saint Esprit (bien que la Sainte Trinité les fasse participer de la même essence divine).

Le Seigneur des Anneaux

Le premier livre La Communauté de l’Anneau établit les personnages récurrents de l’histoire. Nous faisons la connaissance d’un héros improbable Frodon et de son sidekick génial, Samsaget Gamegie, dit Sam.

Gandalf nous est aussi introduit comme le mentor de Frodon. Et bien sûr, il nous est présenté le principal méchant de cette histoire : Sauron.
Ce premier tome construit la tension. Vous constaterez souvent à propos de tension que celle-ci fonctionne plutôt bien en suivant le motif Tension – Tension – Relâchement.
Soit deux poussées de tension avant de relâcher celle-ci (résolution ou rebondissement).

Dans La Communauté de l’Anneau, la tension se construit alors que Frodon s’engage à détruire le fatidique Anneau.
Cette première partie de la trilogie se structure comme si elle était une histoire singulière avec des personnages qui doivent surmonter des obstacles alors que les périls de cette quête sont de plus en plus menaçants.

Trois impératifs

Le premier tome de la trilogie doit insister sur :

La charge émotionnelle des personnages.

C’est par elle que la tension s’installera. Frodon, par exemple, doit gérer émotionnellement la disparition de personnages clés de son petit groupe.

A propos de cette charge émotionnelle, nous vous proposons la lecture de

Ainsi que :
LES 12 PRINCIPES A LA SOURCE D’UN SCENARIO

L’ultime obstacle laisse une situation éprouvante.

Ainsi, Frodon est plus vulnérable à la fin du tome qu’il ne l’était au début de l’histoire. Il n’y a plus qu’un seul personnage qui va l’accompagner dans ce territoire encore inconnu et dangereux.

L’action de l’histoire se déplace

De nouveaux lieux sont possibles avec une promesse de surprises encore inconnues. En quelque sorte, il faut accrocher le lecteur dès la fin du premier tome avec des promesses.

Les Deux Tours

Dans ce second tome, Tolkien introduit de nouveaux personnages. Et surtout, il multiplie les conflits ce qui crée d’autres questions dramatiques. Plus le lecteur se pose de questions dramatiques, plus la tension persiste.

De plus, comme le groupe est éparpillé, cela crée des lignes dramatiques distinctes. L’action se produit simultanément en des lieux différents. C’est le même principe que pour les séries. Le parcours du héros est un parmi d’autres.

Cet enchevêtrement intrigue le lecteur qui se soucie non pas d’un résultat (celui de la quête principale) mais de plusieurs.

Le Retour du Roi

Ce troisième tome regroupe précisément ce que la dernière partie d’une trilogie doit présenter :

  • Résoudre les tensions et les lignes dramatiques majeures ce qui donne à la trilogie et à la courbe dramatique de celle-ci (en somme, le parcours de la quête entre le premier et le dernier tome) une conclusion satisfaisante.
    Notez : une conclusion c’est-à-dire que la trilogie en soi n’est plus un projet.
    Et satisfaisante pour ne pas frustrer le lecteur sur des questions auxquelles il n’aura pas été répondu.
  • Conclure mais sans être trop prévisible. Frodon, par exemple, revient dans son village mais celui-ci est profondément changé. C’est le retour du héros conformément au Voyage du héros tel que Joseph Campbell l’a découvert en mythologie et qui doit transmettre la parole pour faire profiter les siens de ce qu’il a appris au cours de son aventure.
    La trilogie, peut-être à cause de la durée qu’elle suggère, implique cependant que le monde a changé (indépendamment du héros). Et le héros ne retrouve pas les choses telles qu’il les avait laissées.
  • Ajout de suspense avant la résolution finale. Il faut jouer sur l’incertitude le plus longtemps possible. Frodon qui cède par exemple au pouvoir maléfique de l’Anneau et qui le passe à son doigt.
    A l’intérieur de la résolution de l’œuvre, il y a encore des moments de tension et de relâchement.

Le principe consiste à créer des arcs dramatiques mineurs à l’intérieur de chacun des tomes afin de maintenir l’intérêt tout au long de la trilogie.
Tolkien par exemple a modifié son histoire entre La communauté de l’Anneau et Les Deux Tours d’une quête d’un groupe devenue multiples histoires et situations difficiles.

UN FIL CONDUCTEUR

C’est l’un des plus importants conseils pour écrire une trilogie. Pour une série télévisée, c’est le moteur narratif.

Il est nécessaire que chacun des tomes soit chapeauté par une sorte de continuum. Une idée qui s’étend sur toute la durée de l’histoire. Si les trois parties se focalisent sur des histoires qui ne soient pas reliées par une même idée, jamais vous n’obtiendrez une trilogie.
Chez Tolkien, c’est cette recherche de la Montagne du Destin qui unit le tout. Les deux premiers tomes construisent le final pour aboutir à un climax gorgé de conflit.

Quel que soit le genre, un thème majeur doit pouvoir se lire à travers toute la trilogie. Si votre thème par exemple est de prendre conscience de sa place dans le monde, il doit être exploré tout au long de l’œuvre.

Quel que soit ce qui va unifier votre œuvre, il faut le faire apparaître dès le premier tome pour accrocher le lecteur jusqu’au dernier tome où il aura enfin les réponses à ses questions.

LE SECOND LIVRE DE LA TRILOGIE

Certainement le plus difficile à écrire. Parce que si l’auteur continue sur les données du premier tome, les personnages seront foncièrement identiques les privant d’une liberté à la fois émotionnelle et active.

Le monde sera égal à lui-même. Le lecteur a besoin de se sentir dépaysé à chaque tome. Et là, c’est l’auteur qui se prive d’une liberté en se confinant lui-même dans les limites d’un territoire narratif qu’il vient déjà d’explorer.

Les problèmes sont les mêmes. Donc les conflits ne seront pas nouveaux.

Pour répondre à ces interrogations, le second tome d’une trilogie devrait contenir :

  • Un nouveau lieu pour l’action.
  • De nouveaux personnages apparaissent ou bien des personnages du premier tome sont partis ou morts.
  • Des choses données comme vraies dans le premier tome sont invalidées dans le second. Par exemple, un personnage présenté d’abord comme corrompu s’avérera peut-être moins débauché dans le second ou bien s’il était donné pour mort, le second tome révélera qu’il est encore en vie.

Ce tome 2 doit évidemment apporter son lot de surprises mais il doit aussi ajouter à la tension, aux incertitudes… Le second tome d’une trilogie se projette dans la troisième partie.
Les Deux Tours y parvient comme ceci :

  • Mise en place de plusieurs lieux de l’action avec leur propre jeu de personnages affrontant leurs propres défis.
  • Des personnages font un retour inattendu (Gandalf par exemple présumé mort).
  • Introduction de nouveaux personnages (pas nécessairement de confiance) qui tiendront un rôle décisif par la suite.

Le tome 2 doit jouer sur les éléments de surprise et l’incertitude sur le devenir des personnages afin de susciter la curiosité de son lecteur.

UNE CONCLUSION SATISFAISANTE

Après avoir créé autant de suspense et d’intrigues au cours de trois tomes, il est important de créer une fin satisfaisante qui soit à la hauteur de cet effort.
Par ailleurs, cette fin ne doit pas être prévisible, évidente car sinon à quoi bon avoir attendu trois tomes pour connaître une fin que nous connaissons.

Tolkien par exemple à ajouter des événements dramatiques qui se sont déroulés dans la Comté et qui sont introduits après le climax de la ligne dramatique principale. Et un Frodon qui ne peut accepter ce renouveau.

C’est un moyen de dépasser le simple aboutissement de l’objectif, de surprendre le lecteur une dernière fois avant de clore la trilogie.

Ce qu’il faut éviter dans le troisième tome :

  • Trop de récapitulations. Ne pensez surtout pas que le lecteur n’a plus de souvenirs des deux premiers tomes. Les récapitulations doivent être pertinentes avec l’action en cours. Et non pas parce que vous avez assumé que le lecteur a oublié certains détails.
  • Le Deus Ex Machina. C’est-à-dire n’insérez pas d’intervention de la Providence pour sortir vos personnages (et vous par le même coup) de situations où vous vous êtes vous-mêmes fourvoyés.
    Planifiez votre histoire avant de l’écrire, faites-en un résumé.
  • Le retour du héros dans le meilleur des mondes. Frodon, par exemple, ne retourne pas dans la Comté pour y trouver que tout est rose. Le conflit s’est étendu même à la Comté indépendamment de lui. Comme nous l’avons vu, c’est une différence fondamentale avec la théorie du Voyage du héros élaborée par Joseph Campbell.

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