ARCHÉTYPE : LE GARDIEN DU SEUIL

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Tous les héros rencontrent des obstacles au cours de leur parcours à travers l’intrigue. S’il n’y avait pas d’obstacles, c’est-à-dire de conflits, l’intrigue n’existerait pas.

Pour Joseph Campbell, l’intrigue est un nouveau lieu pour le héros. C’est un monde qu’il ne connaît pas. Ce monde est pourtant limité par des frontières. Pour pénétrer ce monde, il existe un seuil. Ce seuil est gardé.

Le puissant gardien est censé interdire l’entrée dans le monde à ceux qui sont indignes de ce monde. Et lorsqu’il se présente au seuil, le héros fait face à ce gardien du seuil. C’est un obstacle qu’il doit franchir.
Néanmoins, c’est une épreuve qu’il peut surmonter en comprenant qui est ce gardien. Le héros pourrait même s’en faire un allié.
Ce gardien du seuil, qu’il soit incarné ou non, peut être le héros lui-même dont le passé le retient d’avancer dans sa vie. Lorsque nous faisons sa connaissance dans l’acte Un, il est dans un état de statut quo. Sa vie est dans une impasse.

Ouvrir les yeux

L’effort que doit faire le héros face au Gardien du seuil est de comprendre la nature de la force qui s’oppose à lui. Ainsi, cela peut l’aider à se déterminer sur la façon dont il doit gérer cet obstacle.
Par exemple, dans Le Verdict, le Gardien du seuil est cette jeune femme dans le coma. Le but externe et initial de Frank Galvin est de gagner le procès pour son client. Mais en fin de compte, ce but devient le besoin interne qu’il éprouve de reconquérir sa dignité.

Ce gardien n’est pas l’antagoniste. Habituellement, il serait plutôt un allié de celui-ci. Mais qui peut être retourné par le héros.
C’est un personnage qui est placé là pour empêcher le héros de progresser vers la rencontre avec l’antagoniste. Ou simplement il fait partie de ce monde que le héros découvre et il n’est qu’une étape à franchir.

Les épreuves que subit le héros au cours de l’intrigue sont souvent le moyen de tester sa volonté à atteindre son objectif. Elles lui servent aussi à dépasser ses propres limitations.

Un obstacle commun

Nous rencontrons dans notre quotidien des obstacles à tout ce que nous souhaitons entreprendre. Ce peut être le mauvais temps qui vient contrarier notre intention d’une balade en forêt.
Ou bien la malchance lorsque le sort semble s’acharner sur nous. Ce peut être des préjugés à notre encontre ou une forme quelconque de harcèlement…

Et ce peut être aussi simplement quelqu’un qui refuse d’accéder à votre demande comme la serveuse dans Cinq pièces faciles de Carole Eastman et Bob Rafelson qui refuse à Bobby les toasts qu’il lui demande.

En fait, tous ces obstacles nous renvoient à nos propres démons : nos névroses telles les phobies, nos blessures émotionnelles (généralement de notre enfance), nos comportements déviants, nos dépendances, toutes ces passions qui nous retiennent et nous empêchent d’accomplir pleinement nos vies.

Un héros, somme toute, est en quête de lui-même. Il cherche à changer, à devenir autre (généralement pour quelque chose de meilleur). Mais c’est un véritable défi qu’il se prépare  à relever. Parce que chaque fois qu’il tentera de changer le cours des choses de sa vie, ses vieux démons remonteront puissamment à la surface. Soit pour le stopper dans son élan, soit comme une épreuve pour déterminer s’il est vraiment prêt à accepter le changement.

Dans notre quotidien, nous rencontrons toutes sortes de résistance à notre éventuel changement. Nos proches aussi sont souvent réticents à nous voir changer.
Parce que cela les effraie. Alors ils se comportent comme des gardiens du seuil mais sans intention de nuire. Nous pouvons alors les considérer comme s’il testait à la fois notre capacité à changer mais aussi notre détermination à changer.

En tant qu’archétype, le gardien du seuil est d’abord une fonction.

Et cette fonction consiste à tester la détermination du héros. De ce fait, la relation qui pourrait exister entre ce dernier et le gardien du seuil est habituellement  peu travaillée.

Le héros a plusieurs options pour surmonter l’obstacle du gardien. Il peut simplement le contourner ce qui n’est pas recommandé car il élude le problème. Plus dramatique est le conflit direct ou bien une tentative de séduction ou de soudoiement.
Et il peut aussi s’en faire un allié.

L’allié du héros ou du méchant de l’histoire est  souvent une figure collective et en tant qu’archétype, elle représente un ensemble de personnages. L’allié est davantage une idée et elle peut être illustrée par un nombre presque infini de personnages différents.
La figure de l’allié fait toujours écho dans l’esprit du lecteur qui le reconnait et dans le même temps suspecte en elle peut-être un double jeu. C’est une sorte de convention.

Ainsi, il n’est pas illogique qu’un gardien du seuil d’abord opposant du héros devienne par l’action de celui-ci son allié.

Une autre façon de faire est de se faire un allié provisoire du gardien. Dans Le magicien d’Oz, lorsque Dorothée est gardée captive dans le château de la méchante sorcière défendu par une armée de singes volants, il n’y a aucun moyen pour l’épouvantail, l’homme en fer blanc et le lion de vaincre une telle force.
Alors, les trois compères vont s’emparer des uniformes et des armes de trois sentinelles et ainsi parader avec les troupes ennemis jusqu’au château.

Ils se sont fait indirectement des alliés de leurs ennemis.

Le gardien du seuil n’est pas vraiment une menace

Très souvent, le gardien du seuil est un allié potentiel pour le héros. C’est à ce dernier à ne pas le traiter en ennemi. Même si la première impression que l’on a de lui semble révéler un danger.

Toutes les épreuves sur l’itinéraire du héros ont pour résultat de le renforcer. La force de chaque opposition peut se retourner contre elle.
Peut-être même que le héros peut ressentir une certaine compassion pour ses ennemis.

L’action pure commande de détruire les ennemis. Mais pour le gardien du seuil, il est préférable de transcender cette opposition et de trouver en elle une révélation.
Ce ne sera pas encore le changement. Mais l’une des prises de conscience vers le changement. Le gardien du seuil devient une étape importante du cheminement du héros.

Pour Joseph Campbell, si l’on se contente des apparences, nous n’atteindrons jamais à la vérité des choses. Au-delà de la semblance réside la réalité intérieure.
Et cette réalité est le monde dans lequel le héros s’apprête à pénétrer. Il doit donc la saisir. Le gardien du seuil invite à la fois le héros à franchir le seuil et le repousse aussi s’il n’est pas prêt à s’engager dans son aventure.

Lorsque le gardien est introduit dans l’histoire (à la fin de l’acte Un au moment où le héros prend en charge son problème), il bloque le chemin du héros.
Ce peut être n’importe quoi ou n’importe qui tant qu’il offre une résistance temporaire à entrer dans l’intrigue.

Il est probablement la première des épreuves pour le héros. Dans ce voyage du héros, c’est le début de l’apprentissage. Mais le gardien donne aussi des indices sur les contours du monde dans lequel le héros sera jeté.

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